Ils estiment que l'échantillon de la commission parlementaire est peu représentatif de la consommation et que les bases de comparaison sont biaisées. Marges, génériques, ils recommandent la révision du système de fixation des prix. «Nous restons très réservés et sommes déçus par les conclusions du rapport de la commission parlementaire sur les prix du médicament». C'est la réaction de Ali Sedrati, président de l'Association marocaine de l'industrie pharmaceutique, à l'issue de la réunion tenue vendredi 13 novembre par la profession pour examiner et se prononcer sur le rapport réalisé par une commission parlementaire à propos du prix des médicaments. Pour la profession, il n'est pas possible de «faire une évaluation de la compétitivité du secteur en se basant uniquement sur un panier de dix produits qui ne représentent que 10% de la consommation alors que le marché porte sur 4 600 à 5 000 médicaments !». Dans le même sens, les industriels relèvent que la comparaison entre les prix en pharmacie et ceux, plus bas, pratiqués par la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (Cnops) ne se justifie pas dans la mesure où cet organisme a un système particulier de négociation des prix. De plus, dénoncent-ils, le benchmarking avec des pays comme la Tunisie ou encore la Thaïlande est inopportun puisque le système de fixation des prix est totalement différent. «En Tunisie, c'est la Pharmacie centrale de Tunisie qui achète les médicaments et subventionne les produits coûteux. Ce qui n'est pas le cas du Maroc où les prix sont réglementés par l'administration et où il n'y a pas de subventions», s'indigne M. Sedrati saluant tout de même le travail effectué par la commission parlementaire qui peut, poursuit-il, «constituer une première base pour l'élaboration d'une politique du médicament au Maroc». Notons qu'aujourd'hui une telle politique fait défaut. Par ailleurs, la profession pointe du doigt le fait que «le rapport parlementaire désigne uniquement l'industrie pharmaceutique comme le premier responsable de la cherté du prix du médicament. Ce qui n'est pas juste parce qu'il faut avoir une démarche un peu plus globale pour étudier cette problématique du coût». Les industriels préconisent la baisse du prix des princeps dès qu'ils tombent dans le domaine public Pour se défendre, l'Amip a décidé de lancer sa propre étude dont les premières conclusions seront finalisées dans quelques semaines. L'objectif est de démontrer que le prix du médicament au Maroc n'est pas aussi cher que le laisse supposer l'étude des députés. La démarche adoptée pour réaliser cette étude consiste à comparer les prix de fabrication et non pas les prix au consommateur. Cela est plus significatif dans la mesure où le prix du médicament est composé du prix industriel auquel il faut ajouter les marges du grossiste (10%) et du pharmacien (30%). Ce qui situe le prix du fabricant à 58,88% du prix public du médicament. Le reste du prix est composé des marges et de la TVA (7%). Par ailleurs, et se basant sur cette comparaison, les industriels avancent que le prix moyen du médicament au Maroc est de l'ordre de 27 DH. Il est donc inférieur à celui de plusieurs pays ayant un niveau de qualité comparable. «Les résultats seront d'abord communiqués au grand public avant d'être remis à un cabinet d'études qui sera chargé de faire un travail plus approfondi», signale-t-on à l'Amip chez qui l'on rappelle que le système de fixation des prix devrait être revu par les pouvoirs publics. Dans ce cadre, les industriels pharmaceutiques recommandent aux pouvoirs publics de prendre des mesures visant à la fois la régulation du marché et la baisse du prix des médicaments. Premièrement, l'Etat devrait procéder à la baisse du prix des princeps dès qu'ils tombent dans le domaine public. «C'est-à-dire que les pouvoirs publics doivent obliger un laboratoire qui a vendu pendant 20 ans son médicament innovant à un prix fort de revoir celui-ci à la baisse dès que sont mis sur le marché un ou plusieurs génériques. Cela incitera les multinationales à continuer à faire de l'innovation et non pas d'asseoir leur business au Maroc sur les génériques», expliquent des industriels. Deuxièmement, ils estiment qu'il faut agir au niveau des pharmaciens qui, dans leur grande majorité, conseillent presque systématiquement les princeps, qui coûtent cher. L'idée est de mettre en place deux marges en vue de les inciter à conseiller des génériques. Pour les génériques, par exemple, la marge serait de l'ordre de 40% alors que pour les princeps elle serait fixée à 10%. Et enfin, en troisième lieu, les industriels recommandent de sensibiliser les médecins aux génériques. «Aujourd'hui, l'Etat ne maîtrise pas les dépenses en médicaments puisqu'il n'a aucun contrôle sur les prescriptions des médecins. Ceux-ci continuent à prescrire des médicaments chers même lorsqu'ils sont génériqués !», expliquent les professionnels du médicament. Pour remédier à cela, ils recommandent l'élaboration de protocoles thérapeutiques et d'accorder le droit de substitution aux pharmaciens.