Plutôt que de taxer les sociétés étatiques de jeux de hasard, au risque de casser le système, mieux vaut instaurer un petit impôt sur les gains, en aval. Le problème qui oppose l'industrie du jeu de hasard (hormis les casinos) au fisc remet sur la table la question complexe d'une activité pas comme les autres, à la fois au regard de la loi, au regard de ses promoteurs, et en prenant en considération la spécificité du Maroc. Voilà donc une activité qui ne s'apparente ni à la vente d'un bien, ni à celle d'un service et dont le caractère commercial ne trouverait sa justification que dans le cas de sociétés à but lucratif. Or, en vertu de leurs statuts, soit ces dernières n'ont pas le droit de faire des bénéfices, soit ces derniers, quand il y en a, vont intégralement à des associations d'utilité publique. Voilà aussi un système de monopole, au sein duquel l'Etat et ses établissements publics est à la fois actionnaire principal et concédant. Voilà, enfin, une activité autorisée et même gérée par un Etat, qui en profite soit directement à travers des redevances de monopoles, soit indirectement en alimentant des fonds d'utilité publique, mais qui dans le même temps inscrit dans l'article 6 de sa Constitution que «l'Islam est la religion de l'Etat». Ce qui est contradictoire, mais compréhensible, si l'on considère que, primo, les recettes vont à la collectivité ou à des activités d'intérêt public ; secundo, mieux vaut canaliser un vice que de le laisser se développer de manière clandestine. A cet ensemble de contradictions, vient se greffer un problème de fiscalité. Faut-il payer la TVA sur le chiffre d'affaires ou en défalquer ce qui est immédiatement reversé aux parieurs ? A première vue c'est comme les importations en AT, on ne taxe que ce qui rentre réellement. Mais le fisc ne l'entend pas de cette oreille et la loi c'est la loi. Autre question, l'argent versé au Fonds de développement du sport est-il assujetti à l'IS ? Et pourquoi pas celui des redevances de monopole, puisque les deux versements sont obligatoires ? L'imposition supplémentaire du système, nonobstant le risque d'incapacité de paiement qu'encouraient ces sociétés, générerait deux types d'effet : soit une augmentation du prix du ticket ou de la mise, soit une baisse du taux de redistribution, soit les deux à la fois. Le risque est de voir les parieurs s'en détourner en raison d'une barrière à l'entrée ou d'une perspective de gain diminué. Le mieux est plutôt d'instaurer une taxe en aval -de l'ordre de 10% par exemple- sur ces petites fortunes. Sachant que 60% des 4 milliards de DH annuels générés par le jeu reviennent aux parieurs, cela ferait 240 MDH de recettes fiscales chaque année. Après tout, il serait illogique de taxer des revenus issus de spéculation boursière et pas ceux émanant de gains sur jeux de hasard. Non ?