A fin septembre 2019, la Caisse nationale de sécurité sociale compte 40 879 affiliés débiteurs. Parmi eux, 350 font l'objet d'un recouvrement forcé. Pour récupérer sa créance globale de 8 milliards de DH, la caisse a décidé d'appliquer l'article 75 du Dahir de 1972. Elle a aussi recruté, en 2018-19, 16 nouveaux agents et ouvert trois nouvelles perceptions. La CNSS renforce son partenariat avec les huissiers de justice et les avocats. Porter le taux de recouvrement des créances à 98 ou 100%. C'est l'objectif de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) qui ambitionne de s'aligner en la matière sur les pays européens. Selon sa direction du recouvrement, ce taux se situe actuellement à 93%. Une performance qu'il faut impérativement améliorer, selon Said Hafideddine, directeur du recouvrement, «car le versement des cotisations détermine la pérennité du régime de la CNSS qui est, rappelons-le, un régime contributif et de répartition. Et le défaut de paiement des cotisations implique, le délai passé, la fermeture des droits à l'assurance maladie obligatoire et aux indemnités journalières de maladie. Deux prestations sociales importantes pour le salarié». En vue donc de l'amélioration du recouvrement, la CNSS a, durant ces deux dernières années, renforcé les dispositifs de recouvrement notamment le processus amiable ainsi que le recouvrement forcé. Ainsi, en ce qui concerne le recouvrement amiable, pour les créances dites fraîches, il a été procédé à une réorganisation de la procédure en 2018. Les entreprises sont, dès le premier mois de retard, relancées par SMS ou par mailing. Ensuite, lorsqu'ils cumulent deux mois d'impayés, les affiliés reçoivent un avis ou une lettre de relance amiable. Si les entreprises ne se manifestent pas, quinze jours après la réception de l'avis de relance, elles reçoivent la visite d'un chargé de clientèle. Ce sera là la dernière étape de la procédure amiable avant d'envoyer une lettre de mise en demeure et donc le transfert au recouvrement forcé. Dans le souci de gain de temps et de facilitation de ce mode de recouvrement, deux mesures sont en passe d'être mises en place : la généralisation du télépaiement devant intervenir à l'horizon 2021. Le décret devrait être publié incessamment, apprend-on à la direction du recouvrement. Celle-ci s'apprête, dans un deuxième temps, à externaliser le recouvrement dans l'objectif de sa professionnalisation. L'appel d'offres sera lancé une fois le cahier des charges rédigé. L'externalisation, selon les prévisions de la CNSS, interviendra dès l'année prochaine. La créance globale s'élève à 8 milliards de dirhams Pour les affiliés récalcitrants, la direction du recouvrement n'a d'autre choix que de recourir au recouvrement forcé des créances consolidées. La procédure est lancée, conformément aux dispositions légales de l'article 28 au Code de recouvrement des créances publiques. Le recouvrement forcé ne peut être engagé qu'après l'envoi d'un dernier avis sans frais au redevable. Ainsi, après la publication de l'état de produit, les entreprises font l'objet de relances téléphoniques et de visites directes effectuées par les agents de recouvrement. Si passé un délai de vingt jours le paiement n'a pas eu lieu, la direction de recouvrement procède à la saisie mobilière et immobilière. Huit jours après, on décide de la vente des biens. Interviendront après les poursuites judiciaires conformément à l'article 75 du Dahir de 1972 relatif au régime de la sécurité sociale géré par la CNSS. En effet, selon Said Hafidedine, la CNSS a décidé, en vue d'améliorer le taux de recouvrement de ses créances, «d'actionner l'article 75 du dahir de 1972 à l'encontre des affiliés récalcitrants. Cet article porte sur la responsabilité pénale des employeurs pour la rétention de la part salariale». L'article 75 dispose que «l'employeur qui a retenu par-devers lui, indûment, la contribution ouvrière précomptée sur le salaire, est passible d'un emprisonnement de six mois à trois ans et d'une amende de 120 à 1 000 DH». Le directeur du recouvrement précise que seront soumis à cet article les affiliés traités à des stades de recouvrement avancés mais sans résultat concret, les affiliés ayant plus de 12 mois déclarés sans paiement de cotisations après émission du commandement sans aucun retour de la part de l'affilié débiteur. Selon les statistiques communiquées par la caisse, sur les 40 879 entreprises débitrices 300 à 350 sont aujourd'hui concernées par le recouvrement forcé. Cependant, il est précisé que les affiliés dont la créance à recouvrer est constituée principalement de régularisations et de redressements opérés dans le cadre des missions de contrôle et d'inspection doivent être exclus de la cible de l'article 75. Une fois le représentant légal identifié par la perception et la part salariale déterminée, la perception envoie une relance à l'adresse personnelle du représentant légal de l'entreprise, soulignant sa responsabilité en sa qualité d'employeur et l'invitant à prendre contact avec la CNSS en vue d'apurer sa créance et ce, dans un délai d'un mois. S'il ne se manifeste pas, passé ce délai, la perception adresse une mise en demeure. Si l'affilié n'obtempère pas, la procédure judiciaire est déclenchée. Pour améliorer les procédures de recouvrement forcé et en vue de plus de professionnalisme, la direction du recouvrement, qui travaille déjà avec 60 huissiers, a signé, en 2019, une convention avec de nouveaux huissiers de justice dont le nombre passera désormais à 120. Leur rôle : mener les actions de saisie et de vente des biens mobiliers et immobiliers des affiliés récalcitrants. Par ailleurs, la CNSS a lancé un appel d'offres pour le conventionnement d'avocats. La caisse travaille déjà avec une dizaine d'avocats. Toujours dans le souci d'améliorer le recouvrement, la caisse a ouvert trois nouvelles perceptions (Laâyoune, Hay Hassani à Casablanca et Kénitra) et a renforcé son effectif d'agents de recouvrement en recrutant 16 personnes en 2019. Et la caisse procédera au recrutement de 20 autres agents au cours de 2020. Si la CNSS a décidé de renforcer son recouvrement c'est principalement, selon M. Hafidedine, pour deux raisons : d'abord, le non-paiement des cotisations, et en particulier de la part salariale, prive les assurés de leurs droits à l'AMO et aux IJM. Ensuite, parce qu'aujourd'hui la créance totale s'élève à 8 milliards de DH et ce sont 40 879 entreprises qui sont concernées. La répartition géographique de la créance révèle que Casa-Anfa et Agadir arrivent en tête avec respectivement 1,1 et 1milliard de DH. Et c'est Casa-Anfa qui se place en tête de peloton avec 5 263 affiliés débiteurs, suivie de Marrakech avec 4 900 affiliés. La répartition par branches d'activités laisse apparaître que les secteurs du commerce, réparation d'automobiles et de motocycles comptent le plus grand nombre de débiteurs (9750) suivi de la construction (7090), l'hébergement et la restauration (4652) et l'industrie manufacturière avec 4189 entreprises débitrices.