Les personnes âgées de 60 ans et plus représenteront 23% de la population totale en 2050, au lieu de 9% en 2014, et de 7% en 1994. Elles vivent aujourd'hui dans une famille en voie de nucléarisation, avec un faible taux de couverture médicale. Le modèle historique de prise en charge basé sur la solidarité familiale est de moins en moins adapté. Depuis quelques années, le secteur des retraites au Maroc s'est engagé dans un «processus de réforme», visant à structurer et à étendre la couverture du risque vieillesse à l'ensemble de la population active. A l'heure actuelle, le système de protection sociale ne couvre que de façon très limitée la population âgée. Ainsi, selon le rapport de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) pour l'année 2017, seulement 24,5% des personnes âgées de plus de 60 ans disposent d'une couverture retraite, soit un effectif de 868 000 personnes pour une population de près de 3,5 millions d'individus. Autrement dit, ce sont près de 2,7 millions de Marocains qui ne disposent pas de pension de retraite. A l'horizon 2050, la population marocaine devrait, selon le HCP, atteindre près de 43,6 millions d'habitants, contre 34,32 millions en 2014. L'espérance de vie serait, elle, de plus de 80 ans, au lieu de plus de 75 ans en 2014. Quant à la population des 18-24 ans sur le marché du travail, elle serait de près de 4 millions en 2050, soit une baisse de 10% par rapport à son niveau de 2014. L'effectif des personnes âgées de 60 ans et plus passerait, lui, à 10 millions en 2050, au lieu de 3 millions en 2014. Cette proportion de la population représenterait 23% de la population totale en 2050, au lieu de 9% en 2014 et de 7% en 1994. Or, il est à craindre qu'une part importante de cette tranche continue à ne pas disposer de pension de retraite. En effet, les estimations de l'ACAPS font ressortir un taux de couverture retraite qui ne dépasse pas les 42% en 2017 et les projections du HCP ne laissent pas présager, à législation inchangée, une amélioration du taux de couverture retraite. Ces questions ont été débattues lors de l'édition 2019 du Forum CDG Prévoyance, organisé le 24 juin à Rabat, sous le thème: «Notre rapport à notre retraite et à nos aînés». Un défi social Selon Abdellatif Zaghnoun, DG de la CDG, «le vieillissement de la population pose des défis économiques et sociaux majeurs pour notre société et nous oblige à revoir l'attitude des gouvernements envers le pilotage des soins de santé et des régimes de retraite». Et d'ajouter que «la prise en charge du vieillissement, particulièrement dans son aspect dépendance, est, avant tout, un défi sociétal. Elle doit être pensée et réfléchie sous cet angle, en même temps que la réflexion doit porter sur le financement des caisses de retraite». Hassan Boubrik, président de l'ACAPS, a, quant à lui, fait remarquer que «le modèle historique basé sur la solidarité familiale est de moins en moins adapté, du fait de l'exode rural, de la baisse du taux de fécondité et de la nucléarisation de la famille». La taille du ménage marocain est, en effet, passée de 6, en 1982, à 4,61, en 2014, et devrait diminuer à 3,18, en 2050. Cette baisse s'explique par la diminution du nombre d'enfants par ménage et aussi de la part d'adultes par ménage, du fait de la montée relative des familles monoparentales. En outre, la montée prévisible à moyen et long terme de l'insertion des femmes dans le marché de l'emploi va certainement mettre la solidarité familiale à rude épreuve. De ce fait, les personnes âgées vivent aujourd'hui dans une famille en voie de nucléarisation, avec un faible taux de couverture médicale. Maisons de retraite Dans le même sens, Ahmed Réda Chami, président du CESE, constate, à son tour, que «la famille ne joue plus, en matière de solidarité, le rôle qu'elle jouait auparavant. C'est pourquoi il convient d'instaurer un revenu minimum vieillesse pour les personnes n'ayant pas cotisé pour leur retraite». A noter que le rapport du CESE sur les personnes âgées au Maroc préconise l'amélioration de la protection sociale, en particulier pour les personnes qui sont en situation de dépendance et de vulnérabilité. De même, il suggère l'unification des régimes de prévoyance sociale en matière de pensions de retraite, et ce, par l'instauration d'un régime de base unifié par répartition, incluant à la fois le public et le privé, auquel s'ajoutent des régimes complémentaires. Enfin, le rapport met l'accent sur la nécessité de développer des maisons de retraite et d'assurer la sécurité et la circulation des personnes âgées en leur garantissant l'accès aux transports publics. Enfin, CDG Prévoyance a l'intention de mener une enquête, à l'échelle nationale, complémentaire des dispositifs statistiques et dont les résultats permettraient de mieux qualifier les conditions des personnes âgées et les besoins qui en découlent, les leviers de l'épargne, les disparités régionales, ainsi que la nature des relations d'entraide entre générations. A Lire aussi : La retraite ? Ça peut attendre...