Selon les enseignes et les emplacements, la fréquentation a reculé de 5% à 15% et le panier moyen de 20% à 30%. Carrefour est la seule parmi les grandes enseignes à avoir enregistré un chiffre d'affaires en hausse. Le fléchissement de l'activité est plus important dans les grandes villes comme Casablanca, Rabat et Marrakech. La grande distribution traverse une période peu favorable. «L'année 2016 s'est soldée par une régression des ventes et 2017 s'annonce encore très difficile», constate le patron d'une enseigne. A l'origine de ce fléchissement, la baisse de la fréquentation et du pouvoir d'achat des clients. «Les consommateurs ont tendance à retourner vers la distribution traditionnelle. Dans le secteur, on note une baisse du trafic allant de 5 à 15% en fonction des enseignes et des villes», précise la même source. De plus, «les consommateurs qui sont restés fidèles à la distribution moderne ont réduit leur budget mensuel. Plus de 90% du montant dépensé ne concerne que des produits de base», déclare un concurrent. A l'exception du groupe Carrefour dont le chiffre d'affaires a progressé de 12,3% pour un panier moyen de 80 à 250 DH dans les super et hypermarchés et 1 600 DH dans les hypercash, «les opérateurs ont du mal à maintenir les mêmes niveaux de vente et de panier moyen qu'en 2015», déclare un autre professionnel. D'après les chiffres avancés, le panier moyen s'est replié de 20% à 30% en fonction des enseignes, de la taille des magasins, mais surtout des régions et villes. Le rythme des ouvertures a ralenti compte tenu de la conjoncture «C'est au niveau des grandes villes, en l'occurrence Casablanca, Rabat et Marrakech, que le recul est le plus important. Dans les moyennes et petites villes où la consommation est déjà limitée au nécessaire, la baisse reste très légère», explique un opérateur. Dans les grandes villes, le panier moyen est estimé à 200 DH dans les hypermarchés contre 260 DH en 2015, soit une contraction de 30%. Elle est encore plus importante chez l'un des opérateurs qui confie que le panier moyen de ses hypermarchés s'est établi à 150 DH. Les supermarchés de proximité ont accusé quant à eux un recul du panier moyen de l'ordre de 20%, à 90 DH. Le turc BIM a le plus souffert. Son revenu moyen par client est tombé de 110 DH à 80 DH, soit une baisse de plus de 37% et cela sur tout le Maroc. «Le panier moyen des vendredis de BIM a quant à lui nettement baissé. Les clients ne sont plus emballés par le concept. Ils font des achats très réfléchis et se concentrent sur les produits de base», déclare une source au sein de l'enseigne. Enfin, les grands hypermarchés et les Cash & Carry ont pu maintenir les achats à 600 DH par client contre 700 DH en 2015. «Si les grands magasins ont enregistré une baisse relativement moins importante que celle notée par les autres types de magasins, c'est parce que les ventes dans ces lieux sont soutenues par les professionnels qui ont gardé le même niveau d'achat». La crise du secteur s'est traduite également par un ralentissement du rythme d'expansion. Le tandem Marjane-Acima a ouvert trois magasins en 2016 (Marjane Tachfine, Acima à Oujda et Acima à Tanger) et en compte maintenant 81. Bien que le groupe ait ralenti le rythme de ses ouvertures, il occupe toujours la première place avec 55% (à fin 2015) du marché de la grande distribution. Reste qu'il est loin des objectifs fixés dans son plan de développement 2020 qui prévoit l'ouverture de 5 à 6 hypermarchés et de 4 à 5 supermarchés par an. Label'Vie (30% du marché) a, quant à lui, ouvert 7 nouveaux points de vente dont 5 super, 1 hyper et 1 hypercash grâce à un investissement de 254 MDH. Cela a permis de porter le réseau à 70 magasins et de créer 800 emplois directs. Le plan de développement prévoit 116 points de vente d'ici 2018. Le groupe paraît très près de son objectif, puisque «17 nouveaux magasins seront inaugurés en 2017», confirme un haut cadre. Le groupe Aswak Assalam, qui possède 12 implantations et contrôle 8,51% du marché, n'a procédé à aucune ouverture, alors qu'il en avait programmé trois sur l'axe Casablanca-Tanger dès le début de 2016. Carrefour à la conquête du monde rural Pour Bim, l'année 2016 était très difficile. L'enseigne turque a terminé l'année sur un chiffre d'affaires en baisse mais est surtout passée à côté de ses objectifs. Elle prévoyait en effet 80 nouveaux magasins, alors qu'elle n'en a ouvert que 50 en 2016, en plus d'une troisième plateforme. Aujourd'hui son réseau est passé de 279 à 329 magasins. Un nombre que l'enseigne envisage de porter à 389 d'ici la fin de l'année. Dans cette conjoncture morose, le groupe Carrefour est la seule enseigne à surnager. L'enseigne veut développer la part de la grande distribution en allant à la conquête du marché du monde rural. «Un nouveau concept dédié à ce segment est en cours de finalisation», confie un responsable du groupe. Et d'ajouter : «Le principe sera de mettre en place des supermarchés ambulants qui vont sillonner les marchés hebdomadaires ruraux avec des offres et des promotions adaptées à cette clientèle». Somme toute, le groupe franco-marocain a compris que malgré la faiblesse du pouvoir d'achat dans ces zones, l'introduction de ce type d'offres pourrait créer le besoin et inciter les populations à vivre l'expérience de la grande distribution le temps d'un souk hebdomadaire.