On aurait pu craindre que le décès du chef d'état-major de l'ANP, le général de corps d'armée et vice-ministre de la Défense Ahmed Gaid Salah allait atténuer les ardeurs de la rue algérienne dans son Hirak, il n'en a rien été, si l'on s'en tient à la mobilisation engendrée lors de ce 44e mardi de la rébellion populaire algérienne. D'aucuns avaient même prédit l'annulation pure et simple de la traditionnelle marche estudiantine du mardi en Algérie. Mais il semblerait que les réseaux sociaux aient bien fonctionné et le mot d'ordre rassembleur ait été entendu. La marche a eu lieu comme à son accoutumée, et ce en dépit du deuil de trois jours décrété par la présidence. Cela n'a nullement refroidi la ferveur populaire des manifestants toujours décidés à faire entendre leurs revendications. Bref, comme d'habitude on a défilé un peu partout en Algérie dans plusieurs villes et wilayas, à la capitale Alger, Constantine, Oran, Béjaïa, Tizi Ouzou, Bouira, Jijel et autres. À Alger, la mobilisation a été très forte. Après s'être rassemblés, la marche a démarré comme d'habitude de la Place des Martyrs. Enormément de citoyens se sont solidarisés avec les étudiants. Les services de sécurité, présents en grand nombre comme chaque mardi, se sont contentés d'accompagner les marcheurs et d'observer. Aucun incident majeur n'a été signalé jusqu'en fin d'après-midi quand la foule a été dispersée. Ni dans les pancartes brandies ni dans les slogans scandés, il n'a été fait mention de Gaid Salah. Les manifestants ont surtout réitéré que le Hirak en Algérie continuera jusqu'à ce que toutes les revendications populaires soient satisfaites à savoir : un Etat de droit, une presse indépendante, une justice libre... On a également exprimé le rejet des résultats de la dernière élection présidentielle. L'appel au dialogue proposé a également été rejeté et n'a pas échappé à la vindicte populaire. C'est dire le désamour entre la rue en Algérie et le nouveau président de la République, Abdelmadjid Tebboune. Bref, « Dialogue impossible, le Hirak continue », c'est le mot d'ordre des pancartes, mais aussi avec la libération de tous les détenus d'opinion et l'éternel « un Etat civil et non militaire » ont été ressassés lors de cette 44e marche de mardi. Les manifestants ont rendu un vibrant hommage à Hocine Aït Ahmed, décédé il y a quatre ans presque jour pour jour. « Allah irahmek ya da el Hocine », « Aït Ahmed Rabi Yarahmou », a notamment scandé la foule algéroise. À Bouira, comme partout ailleurs en Algérie, les étudiants soutenus par des citoyens ont battu le pavé en nombre tout en réitérant leur engagement total dans la lutte pour le changement radical en Algérie. Ils ont notamment scandé les slogans qui ont toujours marqué les manifestations populaires en Algérie et que l'arrivée de Tebboune au pouvoir n'a pas atténués, « les étudiants en colère refusent le dialogue », « notre lutte est "silmya" pacifique », « l'armée out d'El-Mouaradia » et le meilleur pour la fin avec cette allusion au fils de Tebboune emprisonné « libérez nos détenus ce ne sont pas des dealers de cocaïne ». Cela étant le général Gaïd Salah par qui tous les malheurs des manifestants du Hirak sont arrivés, sera inhumé après la prière du Dohr mercredi au carré des Martyrs du cimetière Al-Alia (Est de la capitale), où sont enterrés les anciens présidents et autres personnalités algériennes. Sa dépouille sera exposée durant la matinée au Palais du peuple pour permettre à la population de lui rendre un « dernier hommage » selon le communiqué d'El Mouradia.