* Au moment où certains pays, de lHexagone rejettent lapplication des normes IFRS aux PME, un chantier y afférent est aujourdhui en gestation au Maroc. Il concerne tout le tissu économique ,sans aucune distinction. * Un plan daction bien ficelé est mis en place, mais le processus est en stand by au niveau du ministère des Finances. * Le passage du CGMC vers les normes IFRS induira des coûts importants. La crise mondiale qui a éclaté en 2007 et dont les effets continuent à se propager telle une onde de choc, a remis en cause un certain nombre de règles. Si, à titre dexemple, au niveau macroéconomique, le non-interventionnisme de lEtat a été pointé du doigt au niveau microéconomique, les normes IFRS ont montré leurs limites. En guise de rappel, en 2005, les Etats membres de lUnion européenne se sont clairement exprimés en faveur des normes IFRS comme référentiel comptable pour les sociétés cotées. Le Conseil National de la Comptabilité avait entrepris une rénovation en profondeur des règles comptables françaises dans le sens dune convergence vers les normes IFRS, en adoptant progressivement les principes comptables ainsi que les méthodes dévaluation des nouvelles normes internationales pour les comptes individuels en France. Au Maroc, quelques grandes entreprises ont basculé du CGMC (Code Général Marocain Comptable) vers les normes IFRS, et ce pour un alignement sur les standards internationaux. Mais, il faut dire quil sagit essentiellement dentités de grande taille, cotées à la Bourse de Casablanca, et de quelques filiales de multinationales suite à ladoption de ces standards par lUnion européenne. Et, depuis 2008, les établissements de crédit, sous limpulsion de la Banque centrale, ont basculé vers les normes IFRS. Et cette mouvance ne compte pas sarrêter de sitôt à cause des engagements pris par le Maroc auprès des instances internationales pour améliorer son référentiel comptable. Et pour preuve : le Conseil National de la Comptabilité a mis en place les jalons dun grand chantier quest le passage des normes comptables vers celles IFRS. « Aujourdhui, les dés sont jetés : une commission a déjà été constituée et un plan daction a été mis en place fixant les modalités et la démarche du basculement vers les normes internationales», annonce A. Bernossi, président de lOrdre National des Experts-Comptables. Aussi, un cahier des charges a été dressé afin de désigner les experts-comptables qui vont travailler sur ce projet denvergure. «Aujourdhui, nous sommes dans une phase de stand by et nous attendons la décision du ministère des Finances», sempresse dajouter A. Bernossi. La crise y est-elle pour quelque chose ? Apparemment, cest plus le coût du basculement des normes marocaines vers celles internationales qui constitue un sérieux handicap. Lorsquun tel projet verra le jour, il concernera lensemble du tissu économique, sans distinction. Cette réflexion renvoie donc à un tissu économique très hétérogène nayant pas forcément les mêmes attentes en matière de comptabilité. Passage vers les normes IFRS : un chantier de longue haleine Donc, la question se pose demblée : est-ce que les PME, composante essentielle de notre tissu économique, seraient prêtes à adopter les normes IFRS qui se traduisent par dénormes investissements et qui vont nécessairement engendrer des coûts supplémentaires ? Interrogé à ce sujet, un professionnel, souhaitant garder lanonymat, répond : «Effectivement, léconomie marocaine est constituée essentiellement de PME dont la préoccupation primordiale est délaborer des états de synthèse tout en respectant notamment le volet fiscal. A mon avis, elles ne seraient pas intéressées par des normes internationales qui prônent des objectifs tels que la juste valeur et qui ne sont pas dactualité pour la PME marocaine». Il ajoute, par ailleurs, que la préparation des états conformément aux normes internationales se veut très coûteuse par la nécessité dintervention de spécialistes en la matière. Le président de lOEC ne semble pas partager cet avis : «Une fois que le projet aura vu le jour, il y aura nécessairement une période de transition au cours de laquelle des mesures daccompagnement seront mises en place. Les PME ne seront pas livrées à elles-mêmes et ne subiront donc pas seules les frais exorbitants de ce passage vers les normes internationales» A rappeler que les Français se sont fixés un délai de 5 ans pour assurer le basculement vers les normes IFRS. « Ceci pour vous dire quil sagit dun chantier de longue haleine et donc que son application nest pas pour demain », précise A. Bernossi. En parlant de lHexagone, il est à noter que la question de ladoption de ce référentiel par les PME est ainsi plus que jamais dactualité. Lapplication de cette disposition par les petites et moyennes entreprises na pas connu un réel succès et a été rejetée par les instances compétentes. Les PME et les grands groupes nont pas les mêmes besoins en termes dinformations comptables et financières et, surtout, nont pas les mêmes moyens humains et techniques pour appliquer le nouveau référentiel IAS/IFRS. Cest pourquoi l'IASB engage une réflexion sur lélaboration dun jeu simplifié et autonome de normes comptables adaptées aux PME. Cette réflexion na pas laissé le président de lOrdre des experts-comptables indifférent qui prétend que la convergence vers les normes IFRS prendra en considération les spécificités de léconomie marocaine. Est-il possible que la mise en place de normes internationales puissent prendre en considération des spécificités nationales ? Rien nest sûr. Ce qui est sûr par contre pour le moment, cest que nos PME ont dautres chats à fouetter.