* La fiscalisation à elle seule nest pas suffisante pour remédier au déséquilibre entre loffre et la demande. * A défaut de critères bien définis, lAdministration disposera dune marge dinterprétation. Ce qui ouvre la voie à la corruption. * La taxe sur les logements vacants est plus une mesure à caractère financier quéconomique. * Lactivation de la taxe sur les terrains non bâtis donne aussi matière à réflexion. Une réflexion est en cours aujourdhui au ministère de lHabitat : il sagit de la taxe sur les logements vacants. Linstauration dune telle taxe fait suite à la crise du logement que connaît le Maroc et qui sest traduite par une hausse des prix. En effet, cette mesure sinscrit dans un arsenal de douze mesures adoptées par le même département avec pour leitmotiv : réguler les prix de limmobilier et mettre un terme à ce déficit chronique en logements. On peut citer comme carte maîtresse le code de lurbanisme qui en est aujourdhui à ses dernières retouches. «Nous formulons lespoir quil arrive au Conseil du Gouvernement dici juin 2008 pour pouvoir être déposé au Parlement à la session de septembre prochain», annonce Abderrahmane Chorfi, Directeur général de lUrbanisme, de lArchitecture et de lAménagement du territoire à loccasion dune table-ronde organisée récemment par la Chambre britannique du commerce sur le thème : «Coût de limmobilier au Maroc : opportunités et limites». Toujours dans le même sillage, le ministère de tutelle a dautres mesures dans le pipe. Il travaille actuellement sur un code de commercialisation qui permettrait de lutter contre la spéculation. Aussi, de nouvelles villes sont-elles en cours détude dans les périmètres de Tanger, Agadir et Nador. Last but not least, le ministère lancera un nouveau programme dhabitat menaçant ruine. Une enveloppe de 600 MDH sera ainsi mobilisée pour la période couvrant 2008-2012. Toutes ces mesures, comme expliqué plus haut, ont pour principal dessein une démocratisation du logement. De par son caractère un peu sensible, la taxe sur les logements vacants risque dempiéter sur le droit de tout citoyen daccéder au logement secondaire. Et donc un défi de taille qui se pose pour les décideurs. Le Maroc confirme cette manie de sinspirer chaque fois de lHexagone pour faire face à un problème donné. France : Des critères bien dosés Dans lHexagone, depuis le 1er janvier 1999, une taxe annuelle est instituée sur les logements vacants dans les communes appartenant à des agglomérations de plus de 200.000 habitants où existe un déséquilibre fort entre loffre et la demande de logements. Cette taxe doit être payée par les propriétaires, usufruitiers ou preneurs de bail à construction ou à réhabilitation. La liste des communes soumises à cette taxe est fixée par décret publié au journal officiel. En France, sont imposables les logements vacants depuis au moins deux années consécutives au 1er janvier de lannée dimposition. Le logement doit être habitable, cest-à-dire clos, couvert et pourvu des éléments de confort minimum. Il doit être aussi inhabité et vide de meubles, ou pourvu dun immobilier insuffisant pour permettre lhabitation et donc non soumis à la taxe dhabitation. La taxe nest cependant pas due lorsque la vacance est indépendante de la volonté du propriétaire. Cest le cas des logements qui doivent, dans un délai proche, disparaître ou faire lobjet de travaux dans le cadre dopérations durbanisme. Cest aussi le cas des logements mis en location ou en vente au prix du marché mais ne trouvant pas acquéreur. Ne sont pas concernés les résidences secondaires et les logements qui ne pourraient être habitables quau prix de travaux importants. Pour être imposable, le logement doit être libre de toute occupation pendant deux années consécutives. Toutefois, loccupation momentanée et inférieure à 30 jours consécutifs au cours de lune des deux années ne remet pas en cause la situation de vacance du logement. Pour ce qui est du calcul de la taxe, celui-ci seffectue à partir de la valeur locative de lhabitation. Le taux appliqué varie en fonction de la durée de vacance du logement. Une mesure plus pécuniaire Au Maroc, linstauration de cette taxe en est toujours au stade de la réflexion. Elle risque par ailleurs de créer des confusions si les critères ne sont pas bien déterminés. A partir de quel moment un logement peut-il être considéré comme vacant ? Selon A. Chorfi, «il faut écarter trois composantes : les logements des MRE, ceux en cours de commercialisation et les logements vraiment secondaires». Comment, dans ces conditions, faire la différence entre un logement vacant et une résidence secondaire ? Interrogé à cet égard, Abouali, fiscaliste, considère cette mesure comme étant insuffisante. Il explique : «si les prix continuent daugmenter, même sil y a impôt, le déséquilibre entre loffre et la demande va continuer». Daprès le fiscaliste, cette taxe ne va se répercuter que sur les consommateurs et les intermédiaires. Cette mesure est plus à caractère financier quéconomique. Il donne aussi lexemple des villes périphériques. Comment peut-on sattendre à ce quun cadre moyen puisse accéder à ces villes à défaut dune infrastructure adéquate ? Même son de cloche chez un promoteur qui considère que cette mesure est vaine parce que lAdministration est dépourvue de moyens pour sassurer de la vacance du logement. La facture de leau et de lélectricité comme justificatif semble inadéquate parce que les astuces sont très nombreuses. Une autre mesure mérite une attention particulière : il sagit de la taxe sur les terrains non bâtis. Cette mesure va être réactivée parce quelle a été abandonnée à un moment donné. Notre fiscaliste ne voit pas lintérêt dune telle mesure à cause de la rareté des terrains vacants. Il donne même lexemple des promoteurs qui recourent à la démolition pour construire. Une chose est sûre : à défaut de critères bien définis, on laissera à lAdministration une large marge de manuvre et dinterprétation et cest là où le bât blesse. Parce que dans ces conditions on ouvre la porte aux pots de vin. Le ministre de lHabitat nest pas enthousiaste quant à la mise en place dune taxe en vue de réduire le nombre des unités vacants estimé à 800.000 logements. T. Hejira plaide essentiellement pour la création dune Agence nationale dintermédiation de location au Maroc qui permettrait de mobiliser les 800.000 logements au service de la promotion du logement locatif.