Sur fond de dissension entre les pays membres et de tensions géopolitiques, l'OPEP s'obstine à maintenir son niveau de production à 30 millions de barils par jour. S'affichant à moins de 60 dollars le baril, les cours du pétrole ont plongé de presque 50% au cours de l'exercice 2014. La surabondance de la production devrait prévaloir encore en 2015, mais les prix devraient légèrement augmenter. Le gouvernement marocain se frotte les mains et ne pouvait mieux espérer. Les cours du pétrole, qui pèsent énormément sur la facture énergétique, sont au plus bas. Mardi dernier, le baril de Brent évoluait sous la barre des 60 dollars pour la première fois depuis cinq ans. L'inquiétude est palpable, surtout si l'on sait qu'il y a juste quelques mois le cours du baril flirtait avec les 100 dollars. Au total, les cours du pétrole se sont effondrés de presque 50% au cours de l'exercice 2014. Dans un marché réputé pour sa volatilité, il paraît pourtant difficile de croire que la tendance baissière va s'inverser. Bien au contraire, plusieurs experts parient sur un maintien de la pression à la baisse. Et les arguments avancés ne manquent pas. En effet, les ventes massives et anarchiques des spéculateurs qui avaient acheté d'énormes quantités de pétrole en misant sur la hausse des cours, l'obstination des pays de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) à maintenir son niveau de production à 30 millions de barils par jour, la montée en puissance du pétrole de schiste aux Etats-Unis et le retour sur la scène internationale de certains pays producteurs comme la Libye... sont autant d'éléments qui militent pour tirer encore plus vers le bas les cours de l'or noir. Surtout que, de surcroît, le marché nourrit de fortes appréhensions à l'égard de la croissance de l'économie mondiale, grevée par une croissance quasi nulle en Europe et moins importante en Chine. De même, les dernières prévisions de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) qui table sur une aggravation du déséquilibre entre l'offre et la demande, viennent confirmer ce scénario. Selon l'AIE qui revoit à la baisse sa prévision de croissance de la demande mondiale en 2015 et mise sur une hausse de la production des pays hors OPEP, la consommation de pétrole devrait croître de 900.000 barils par jour l'an prochain pour atteindre 93,3 millions de barils par jour (mbj), contre 93,6 mbj comme anticipé précédemment. L'expert Marc Touati, président du cabinet ACDEFI, confiait pour sa part, dans récent un entretien accordé à Finances News Hebdo, que que «l'augmentation normale des cours du pétrole et des matières premières serait de l'ordre de 7% en 2015, sauf chocs géopolitiques importants». «Il ne faut donc pas s'attendre non plus à une flambée des cours, pour la simple raison que la production demeurera élevée», avertit-il. Une légère reprise donc, mais qui ne devrait pas éponger la forte dépréciation des cours qu'a connue l'or noir cette année. Les grands perdants La surabondance de la production exacerbe les tensions géopolitiques. Au sein de l'OPEP, les dissensions sont ainsi de plus en plus manifestes. Des pays comme le Venezuela, l'Iran et la Libye jouent les frondeurs face à l'Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis, le Qatar et le Koweit qui préfèrent jouer la carte du statu quo. Ryad est ainsi résolument décidée à ne pas baisser la production, histoire de ne pas perdre des parts de marché de façon permanente face aux producteurs américains de pétrole de schiste. Ces derniers devant être contraints, face à la baisse des cours et à l'érosion de leur profitabilité, de revoir leurs stratégies d'investissement dans le pétrole de schiste, plus cher à extraire. D'ailleurs, dans une réunion tenue dimanche dernier, les Emirats Arabes Unis ont maintenu la pression, le ministre de l'Energie laissant entendre que l'OPEP pourrait encaisser une baisse des prix jusqu'à 40 dollars le baril. Cette posture du cartel mine en tout cas les économies qui tirent l'essentiel de leurs revenus de l'exportation du brut. La Russie, dont le budget dépend à 50 % des hydrocarbures, est au bord de l'asphyxie. D'ailleurs, lundi, la monnaie russe a subi un revers historique en décrochant de 9,5%, étranglée par les sanctions occidentales liées à la crise ukrainienne et par la chute des cours du pétrole. Depuis le début de l'année, le Rouble s'est déprécié de 42% face à l'Euro et 49% face au Dollar. Le Venezuela, actuellement au bord de l'implosion économique et sociale, se voit contraint d'imposer des coupes budgétaires drastiques. L'Iran souffre également, pris dans l'étau des sanctions internationales et du plongeon de ses revenus issus de l'exportation du pétrole. Le secteur aérien applaudit Parmi les grands gagnants de cette chute des prix du pétrole, il y a le secteur aérien. D'ailleurs, l'Association internationale du transport aérien (IATA) vient de dévoiler des chiffres pour le moins encourageants pour le secteur. Selon l'IATA, les bénéfices nets cumulés des compagnies aériennes devraient s'établir à près de 20 milliards de dollars au titre de l'année en cours. Et la tendance à la hausse devrait se poursuivre l'année prochaine avec des bénéfices nettement meilleurs de 25 milliards de dollars. Ce contexte particulier ne va pas bénéficier qu'aux compagnies aériennes, mais également aux consommateurs. «Les prix des billets d'avion devraient être révisés à la baisse en 2015, dans un contexte de chute libre de la facture du carburant», indique l'organisation basée à Genève.