L'abaissement historique du taux directeur de la Banque centrale à 2,75%, le taux le plus bas depuis que Abdellatif Jouahri est aux commandes, a coïncidé avec des prévisions d'inflation autour de 0,7% pour l'année 2014, malgré la hausse des prix de l'eau et de l'électricité. Tout laissait pourtant penser que BAM allait émettre des craintes sur une déflation. Niet, répond cette dernière. Cette décision a pour unique but de relancer l'activité par le crédit, rien de plus. La tentation était grande à l'issue du Conseil de BAM de comparer sa décision d'abaissement du taux directeur aux décisions récentes de la BCE d'abaisser successivement le taux central de la zone Euro pour faire face au spectre de la déflation. Il faut dire que plusieurs facteurs militent pour le parallèle. Les derniers chiffres du HCP montrent une contraction des prix dans plusieurs domaines d'activité, alors que le gouverneur de la Banque centrale prévoit une inflation d'à peine 0,7% pour l'année 2014, et ce malgré la hausse des prix de l'énergie. «Sans ces hausses de prix, l'inflation aurait été quasi nulle cette année, mais sans virer en territoire négatif», déclare Abdellatif Jouahri. Ensuite, il faut rappeler que le gouverneur a longuement parlé de déflation lors de la réunion trimestrielle de juin dernier en expliquant que ce risque est à prendre très au sérieux en Europe. Lors de cette réunion, rappelez-vous, le Conseil avait «difficilement maintenu le taux directeur inchangé après une longue discussion», dixit jouahri. En somme, un ensemble d'éléments qui facilitent la comparaison avec les récentes décisions de la BCE. Mais la Banque centrale a été claire et intraitable, malgré les nombreuses questions des journalistes. Cet abaissement a pour objectif de soutenir une activité de crédit qui tarde à décoller, jugeant que les évolutions annuelles à 3 ou 4% du crédit bancaire sont insuffisantes. Jouahri a même appelé à nuancer l'interprétation des chiffres du HCP en expliquant que les produits qui ont subi une plus grande baisse des prix sont principalement ceux dits volatils et que cette situation n'est par définition pas durable. Et d'ajouter enfin que «lorsque la Banque centrale s'aperçoit qu'un risque déflationniste ou désinflationniste pèse sur l'économie, ses décisions sont beaucoup plus drastiques qu'un simple abaissement du taux directeur d'un quart de point». Jouahri s'est ensuite lancé dans un grand exercice pédagogique pour éviter toute interprétation erronée par la presse. Un exercice finalement utile et convaincant. Au final, Abdellatif Jouahri a résumé les raisons de la décision du Conseil d'abaisser le taux directeur à 2,75% par les raisons suivantes : l'absence de risques sur l'inflation, encore moins importée, l'objectif de relancer une activité de crédit encore atone et des réserves de change internationales jugées en amélioration. A noter que les prévisions d'inflation sont de 1,6% en moyenne sur les six prochains semestres et à 1,9% au terme de l'horizon de prévision de BAM, soit des niveaux en ligne avec l'objectif de stabilité des prix. Enfin, au niveau des finances publiques, BAM relève que le déficit budgétaire s'est établi à 42,5 Mds de dirhams à fin août 2014, contre 42,2 Mds de dirhams à la même période de l'année précédente. A noter que les charges ordinaires ont augmenté de 0,6%, alors que les dépenses d'investissement se sont accrues de 17,3%. Sur le marché de l'immobilier, l'indice des prix des actifs a accusé au deuxième trimestre une nouvelle baisse de 1,3% en glissement trimestriel, après celle de 0,2% un trimestre auparavant. Dans ces conditions, l'indice des prix à la consommation est resté stable sous l'effet de l'accentuation de la baisse des prix des produits alimentaires à prix volatils qui est passée de 7,1% à 9,9% et qui a été compensée par la hausse de 12,8% de l'eau et l'assainissement et de 6,5% de l'électricité. Ainsi, sur les 8 premiers mois de l'année, l'inflation ressort à 0,3%.