Dominique Strauss-Kahn a présenté, en conclusion du Forum de Paris organisé récemment à Casablanca, un tour du monde de l'économie. Il a dressé un portrait de l'économie mondiale en commençant par les Etats-Unis pour s'arrêter au Maroc. C'est sur un ton léger, agréable et moqueur que DSK a présenté le sujet très sérieux de la situation de l'économie internationale. «Je vous invite à faire un tour du monde de l'économie en ma compagnie», a-t-il déclaré au début de sa présentation. Strauss-Kahn paraissait moins euphorique que les dirigeants de ce monde sur l'avenir de l'économie mondiale. Selon lui, «le FMI table sur une croissance américaine autour de 2,5% pour 2013. Beaucoup d'Etats Européens s'en contenteront volontiers mais le problème des Etats-Unis n'est pas la croissance». Il a ajouté que le réel problème des Etats-Unis se situe au niveau du plafond de la dette autorisé par le Congrès : «L'accord trouvé sur la falaise budgétaire en décembre dernier a été présenté comme une réelle solution par les hommes politiques mais c'en est pas une. Le Congrès n'a fait que retarder l'échéance». Tout en signalant qu'en cas de désaccord sur le relèvement du plafond de la dette l'administration publique américaine s'arrêterait tout simplement, Strauss-Kahn a donné du crédit au gouvernement américain actuel : «Il faut accorder au président américain son envie de faire passer l'économie avant les considérations politiques, ce qui est une bonne chose pour ce pays». La solution pour ne pas atteindre le plafond de la dette serait de réduire les dépenses publiques, ce qui impactera défavorablement la croissance. L'économiste estime qu'un compromis entre relèvement du plafond de la dette et coupes budgétaires sera globalement l'orientation que prendra le gouvernement américain les années à venir et, d'après DSK, les Etats-Unis s'en sortent plutôt bien. En Asie, la croissance sera moins importante que d'habitude en Chine. Mais, elle tournera tout de même autour de 8,5% l'année prochaine. Concernant le Japon, les nouvelles mesures prises par le gouvernement l'automne dernier ne devront pas apporter une réelle solution à la faiblesse des exportations du pays. «Lorsque des économistes spécialisés du Japon au sein du FMI maintiennent les même prévisions de croissance môle pour l'économie nipponne, il faut comprendre que ce énième plan de relance n'apportera pas de réel coup de pouce». L'Europe évite le risque systémique mais traine toujours Si le risque systémique, celui de l'éclatement de la zone euro, a été évité l'été dernier il n'en demeure pas moins que l'Europe n'a toujours pas retrouvé le chemin de la croissance. Selon DSK, le problème est d'abord monétaire car l'instauration de l'Euro en 1999 nécessitait la mise en place en parallèle d'une union bancaire «réelle» ou d'une union budgétaire au sein de la zone euro. «A défaut de pouvoir se mettre d'accord sur l'union budgétaire qui enlève aux parlements une partie de leurs pouvoirs de contrôle, les dirigeants européens ont choisi de tout miser sur l'union bancaire. De plus, cette solution est technique et facilite la tâche aux dirigeants car la population n'y comprend rien», déclare Strauss-Kahn sur un ton ironique. La non convergence entre les politiques budgétaires et bancaires au sein de la zone Euro entraîne selon lui, les écarts observés actuellement entre les taux de financement des économies des pays en bonnes santé celles des pays périphériques. Une des solutions serait d'après DSK de «reverser les gains réalisés sur les financements par les économies fortes comme l'Allemagne aux pays du Sud. Cela agira sur les flux et non sur les stocks de capitaux et coûtera moins cher à l'Allemagne qui ne veut pas entendre parler d'euro-bonds». Enfin, Strauss-Kahn a évoqué la situation de l'Afrique et de l'Amérique latine. Pour lui, c'est dans ces deux zones géographiques que se joue l'avenir de la croissance mondiale. En parlant de l'Afrique, l'économiste s'est beaucoup référé au discours de Mohamed Kettani, président du groupe Attijariwafa bank qui présentait les opportunités qui se présenteraient si des pays africains du sud et du nord s'unissaient économiquement. Les deux estiment qu'une union entre pays est nécessaire pour relancer la croissance en Afrique et limiter le risque politique. Par ailleurs, Strauss-Kahn relève que l'Afrique met moins de temps à se relever de la crise que d'habitude. «Cela crée une rupture avec les tendances passées», déclare-t-il. Quid du Maroc ? Dominique Strauss-Kahn a présenté deux opportunités que le Maroc pourrait saisir : continuer l'expansion en Afrique subsaharienne et faire du Royaume un véritable hub financier régional. Afin d'atteindre ces objectifs, le Maroc doit accroitre son attractivité. Pour ce faire, DSK préconise de mettre l'accent sur deux points : «la compétitivité et l'équilibre budgétaire. Le premier point permettra d'améliorer l'attractivité du produit marocain à l'international et le deuxième permettra d'améliorer la liquidité dans le circuit économique du Royaume pour attirer les investisseurs».