Un audit approfondi des comptes des partis politiques, dévoilé par la Cour des comptes et réalisé dans le cadre du soutien public qui leur est alloué, confirme des dérèglements structurels dans la gestion des ressources et des dépenses. Ce rapport très accablant, révélant une série d'anomalies, souligne l'urgence d'une réforme législative et organisationnelle qui appuiera la transparence et la responsabilité des formations politiques. Selon le document, les 29 partis ayant soumis leurs comptes pour l'exercice 2022 ont déclaré des ressources totales atteignant 152,96 millions de dirhams. Ce montant inclut notamment un soutien public supplémentaire accordé à sept partis pour financer des études et des recherches. Cependant, les dépenses déclarées s'élèvent à seulement 130 millions de dirhams, exposant un écart préoccupant entre les ressources perçues et leur utilisation effective. En outre, des déficiences significatives ont été constatées dans la justification des ressources collectées par cinq partis, pour un total de 5,19 millions de dirhams. Parmi ces anomalies figurent l'absence de justificatifs légaux pour des ressources d'une valeur de 3,08 millions de dirhams ainsi que non-respect du plafond légal pour les paiements en espèces, avec des montants atteignant 2,11 millions de dirhams, alors que la limite est fixée à 10 000 dirhams par transaction. Une gestion des dépenses opaque et insuffisamment documentée Sur le volet des dépenses, 24 partis n'ont pas été en mesure de justifier 26 % des sommes engagées, soit un total de 34,35 millions de dirhams. Ce montant inclut : 17,25 millions de dirhams de dépenses non accompagnées de justificatifs légaux. 1,46 million de dirhams de dépenses mal documentées ou non attribuées au parti. 15,64 millions de dirhams liés au soutien annuel supplémentaire, dépensés sans justificatifs adéquats. Défaillances structurelles et recommandations du Conseil Le rapport critique également la qualité de la comptabilité des partis, pointant des lacunes dans le respect des normes établies par le référentiel général des normes comptables et le plan comptable unifié. Parmi les irrégularités relevées : Une documentation comptable insuffisante et incomplète. Le recours à des paiements en espèces pour des montants dépassant les seuils légaux. Des carences dans les rapports soumis par les experts-comptables mandatés. Face à ces constats alarmants, le Conseil recommande une intervention renforcée du ministère de l'Intérieur. Cela inclut : 1. L'organisation de formations ciblées pour les cadres des partis politiques, afin de les familiariser avec les exigences du plan comptable unifié. 2. L'élaboration d'un guide détaillé des procédures comptables, garantissant une gestion plus rigoureuse. 3. La mise en place d'un système d'information comptable unifié, permettant une exploitation optimale des ressources publiques. Un système à réformer d'urgence Ces défaillances récurrentes soulignent l'incapacité chronique des partis politiques à gérer de manière responsable les fonds publics qui leur sont confiés. Alors que ces formations prétendent jouer un rôle central dans la consolidation démocratique, leur manque de transparence et de discipline financière constitue un obstacle majeur à la confiance citoyenne. Seule une réforme structurelle associant encadrement législatif rigoureux et mécanismes de contrôle renforcés permettra d'assainir un système gangrené par des pratiques opaques et contraires aux principes de bonne gouvernance.