Les choix opérés conformément au Plan Emergence s'inscrivent dans le cadre d'une mise à profit des avantages compétitifs. Le capital étranger joue un rôle important dans le développement industriel du Maroc. Des difficultés sont à aplanir. Le déclin industriel qui se profile à l'horizon annonce l'émergence d'une nouvelle division internationale du travail. Le Centre Marocain de Conjoncture consacre sa dernière lettre à la problématique particulièrement sensible de l'industrie dans un contexte de crise exacerbé. Dans un premier temps, les conjoncturistes ont fait le point sur les tendances mondiales de l'industrie face à la crise. Force est de constater que la production manufacturière mondiale se déplace progressivement des pays développés vers les pays en développement, à mesure que les entreprises délocalisent leurs activités afin de bénéficier d'une main-d'œuvre moins chère, d'infrastructures de qualité, de coûts sociaux inférieurs et, dans certains pays, d'un marché plus vaste. «On assiste à la désindustrialisation progressive des pays développés exacerbée par le phénomène des délocalisations», constatent les conjoncturistes. Toutefois, il existe de fortes différences régionales dans la région Asie de l'Est et Pacifique qui représente plus de 60% de l'emploi manufacturier dans les pays en développement. Les chiffres dévoilés par l'ONUDI montrent que la crise a le pus affecté les pays développés dont la VAM a diminué de 8,1% entre 2008 et 2009. Dans les pays en développement, la croissance de la VAM a diminué de 2,9% en 2009. La crise de 2008-2009 a brutalement stoppé la croissance des exportations de produits manufacturés dont le volume a chuté de 18,7% dans les économies en développement et de 23,2% dans les économies développées en 2009. Dans la région MENA (Moyen-Orient, Afrique du Nord), la VAM a baissé de 0,5% entre 2008 et 2009. «Malgré la baisse des revenus pétroliers, certains pays exportateurs de pétrole ont utilisé leurs substantielles réserves de devises pour de grands programmes d'investissement. Au Maroc, de fortes ambitions Les analystes de l'Observatoire de Conjoncture ont également passé au peigne fin la stratégie industrielle du Maroc. Depuis 2005 le Maroc s'est engagé dans une dynamique de modernisation de son industrie avec l'adoption du plan Emergence. L'ambition de ce plan consiste à relever les défis de la création d'emplois sur le plan interne et à gagner des parts de marché au niveau extérieur par le biais de créneaux porteurs de spécialisation et de diversification des exportations. La stratégie globale repose sur la mise à profit des grands chantiers d'infrastructures et de réformes institutionnelles pour drainer vers le Maroc des opportunités capitales en matière de délocalisation, et sur la volonté de promouvoir de nouveaux métiers et de nouvelles filières porteuses de valeurs. Après quelques années, on s'aperçoit que la situation est d'autant plus inquiétante et demande un traitement de choc. Le secteur souffre de faiblesses inhérentes à sa composition constituée essentiellement de PME souvent familiales, à la faiblesse de la qualification de la main-d'œuvre, à la rareté des entreprises engagées dans la recherche et le développement et à la forte présence du secteur informel qui s'accapare entre 20 et 30% du tissu de ce secteur. La nouvelle stratégie, essentiellement matérialisée par le Pacte National pour l'Emergence Industrielle 2009-2015, n'a d'autre alternative que d'embrasser une modernisation accélérée de l'industrie, à travers une relance économique fondée sur la compétitivité et sur un gain en crédibilité pour attirer les investisseurs étrangers. Quant aux résultats escomptés à l'horizon 2015, ce programme offrira 220.000 nouveaux emplois et favorisera l'accroissement du PIB industriel de quelque 50 Mds DH. Les secteurs sollicités dans une concentration de l'investissement pour mieux répondre aux exigences de la mondialisation et de la concurrence internationale sont tournés vers l'offshoring, l'automobile, l'aéronautique, l'électronique, l'agroalimentaire... Ce programme est accompagné d'un brassage de mesures. Elles concernent à la fois la fiscalité par la mise en place de cadres incitatifs qui peuvent concerner l'impôt sur le revenu effectif plafonné à 20%, l'aide aux opérateurs pour encourager la formation à l'embauche... la mobilisation d'instruments de financement au bénéfice des PME... D'après les analystes de l'Observatoire de Conjoncture ces mesures sont censées offrir au Maroc un avantage comparatif vis-à-vis de la rive Sud de la Méditerranée allant de 30 à 35%. Les prémices des résultats peuvent pousser à l'optimisme, mais cela n'empêche pas de dire que des difficultés restent à aplanir. Les problèmes de la gouvernance, de la bureaucratie administrative, la pression fiscale, l'exode des PME vers l'informel, la vulnérabilité des chaînes de production... autant de difficultés qui restent posées. L'autre point important analysé par les conjoncturistes, est le capital étranger. Il a été constaté que ce dernier joue un rôle important dans le développement industriel du Maroc. Avec une valeur de 15,3 Mds DH en 2010, en croissance annuelle moyenne de 8% sur la période 1990-2010, le capital estimé des investisseurs étrangers représente 25% en moyenne du capital investi dans les industries de transformation. Les conjoncturistes mettent également le point sur la faible productivité industrielle de l'économie marocaine. Le déclin industriel, qui semble se profiler à l'horizon, annonce l'émergence d'une nouvelle division internationale du travail.