- Le HCP accorde peu de crédit aux chiffres de l'emploi industriel rendus publics par la tutelle. - L'entité indépendante, qui fait l'objet d'audits réguliers de la part d'instances internationales, revendique la fiabilité de ses enquêtes et de ses données.
Fait très rare pour être souligné d'emblée : une rencontre de présentation des résultats d'une enquête sur l'emploi n'a jamais suscité autant d'intérêt et d'engouement auprès de la presse nationale. Et pour cause, suite aux chiffres inhérents aux emplois industriels rendus publics récemment par le département de l'industrie chapeauté par Moulay Hafid Elalamy (MHE), la rencontre du haut-commissariat au Plan (HCP) programmée cette semaine a sonné comme une réponse du berger à la bergère. Rappelons que le département de l'Industrie a annoncé la création de 45.000 emplois nets dans le secteur en 2017, quand le HCP en annoncé seulement 7.000. MHE avait notamment taclé le HCP en disant que «chaque institution joue son rôle, le HCP fait des enquêtes qui ont leurs limites. Par contre, eu égard à la méthodologie adoptée je certifie les chiffres que je vous communique». Face à la guerre des chiffres de l'emploi opposant le HCP au département de l'industrie, la rencontre qui s'est tenue récemment à Rabat a permis de lever bon nombre d'équivoques et d'éclairer sur l'avis du HCP quant à la récente sortie de Moulay Hafid Elalamy. Interpellé par nos soins sur l'important écart des chiffres de l'emploi au titre de l'année 2017 entre l'entité qu'il représente et celle de Elalamy, optimiste sur l'atteinte des objectifs du Plan d'accélération industrielle (PAI) en termes de postes de travail (500.000 en 2020), la réponse de Abdelhak Allalat, secrétaire général du HCP, qui a effectué la présentation, a le mérite d'être claire. «Nos données et nos enquêtes sont réalisées selon des normes internationales. La fiabilité des méthodes de travail du HCP est confortée par les audits réguliers effectués par les instances internationales», rétorque-t-il. Et d'ajouter, tout en rappelant la totale indépendance du HCP : «Nous ne nous fions qu'à nos chiffres». En d'autres termes, l'instance publique de prévisions n'accorde que peu de crédit aux statistiques du ministère de l'Industrie. Au-delà de cette clarification, l'évènement a permis de mettre en exergue les nouvelles thématiques couvertes par l'enquête nationale sur l'emploi, dont l'échantillon des ménages interrogés a été revu à la hausse pour atteindre 90.000 foyers contre 60.000 auparavant.
Principales nouveautés
Les hommes de Ahmed Lahlimi, haut-commissaire au Plan, sont formels, le ralentissement économique de ces dernières années est, en partie, à l'origine de la baisse de création d'emplois. «Un point de croissance ne crée actuellement que 15.000 emplois contre 30.000 durant les années 2000», souligne-t-on du côté du HCP. Au niveau national, le taux d'activité a reculé de 47% à 46,7% entre 2016 et 2017. A cela, il faudrait ajouter que l'année dernière a été caractérisée par la faible qualification de la main-d'œuvre, le mode précaire d'insertion et un environnement de travail peu organisé et faiblement protégé. D'ailleurs, 2/3 des salariés ne disposent pas de contrat de travail. De plus, le chômage a été plus important chez les jeunes de 15-24 ans avec un taux de chômage en milieu urbain de 42,8%. Les détenteurs d'un diplôme supérieur, avec un taux de chômage de 23,3% et les femmes (14,7%), n'ont pas aussi été épargnés. Au-delà de ces données qui montrent que du chemin reste encore à faire sur le front de l'emploi, l'enquête du HCP est enrichie des nouvelles thématiques suivantes : la dimension régionale (cinq régions regroupent ¾ de l'emploi), l'accès de la gente féminine à l'emploi (52,7% des femmes sont en dehors du marché du travail), l'adéquation entre le diplôme et l'emploi, le profil des entrepreneurs, la couverture sociale et les immigrants au Maroc. Parmi, les informations de taille révélées, notons que le taux de chômage des détenteurs d'un diplôme de formation professionnelle (22,7%) est supérieur à celui de l'ensemble des diplômés âgés de 15 ans et plus. De plus, près de 9 entrepreneurs sur 10 (88,2%) sont des hommes et 98,2% d'entre eux gèrent des unités économiques de taille ne dépassant pas 5 employés. ■