La crise COVID-19 pourrait être une opportunité pour développer et bâtir l'Afrique et, par ricochet, assurer la souveraineté économique et industrielle de l'Afrique et du Maroc. L'Association Marocaine des Exportateurs (ASMEX), en partenariat avec l'Institut AMADEUS, ont organisé le 05 juin 2020 une rencontre de Haut Niveau sous le thème « La crise du Covid19 : une opportunité pour l'émergence et l'indépendance de l'économie africaine ». Cette conférence digitalisée s'inscrit dans le cadre du lancement d'un nouveau projet d'accompagnement, d'écoute et de mobilisation des entreprises exportatrices en période de Crise, initié et cordonné par l'ASMEX en la personne de Amine Laghidi, Président de la Commission du Capital Immatériel et des Nouvelles Economies, Vice-Président de l'ASMEX. Le but de cette rencontre est de savoir comment maitriser, dans l'immédiat, l'impact négatif de la crise pandémique mondiale, tout en la transformant, à terme, en un catalyseur de développement. Cette table-ronde virtuelle a été animée par des experts nationaux et internationaux, à savoir, Rockoya Modougou, ex-ministre et conseiller spécial PR Togo ; Amine Laghidi, Président du Panel, Président de la Commission développement de l'économie immatérielle et directeur général de Africa Lion et Abdou Diop, Managing Partner Mazars. Les groupements économiques : la planche de salut Outre les panélistes, le webinar a connu la participation de plusieurs chefs d'entreprises venus partager leurs témoignages et expériences en Afrique. Il s'agit notamment de Mohammed Fikrat, PDG de Cosumar ; Nouzha Taarji, DG de Energy Transfo ; Mohamed Lacham, président de l'Amica et Ahmed Bennis, Directeur Développement Groupe de Tanger-Med. En guise d'introduction, le président de l'ASMEX, Hassan Sentissi a appelé à transformer la crise COVID-19 en opportunité de développer et de bâtir l'Afrique main dans la main pour assurer la souveraineté économique et industrielle de l'Afrique et du Maroc. Dans ce sillage, l'importance des groupements régionaux tels que la CEDAO et la Zone de Libre-échange continentale africaine (ZLECA) ont été mis en évidence. « Le Maroc, disposant d'un écosystème industriel mature et innovant, a un rôle indéniable à jouer en la matière en Afrique. La ZLECA est en mesure de permettre à la fois la création des chaînes de valeurs afro-africaines et le développement d'une industrie continentale », a-t-il relevé. Pour lui, la Chine est le pays à capter en termes d'investissements dans l'avenir proche pour être l'intermédiaire entre la Chine et d'autres pays. Même son de cloche chez Rockoya Modougou pour qui les pays africains ne peuvent plus se limiter à l'exportation des matières premières mais doivent aller vers les produits finis et semi-finis capables de créer plus de valeur et donc plus d'emplois pour assurer la relance. « Cette pandémie rend indispensable ce commerce intra-africain qui est actuellement de 15% uniquement contre 67% de commerce intra-union européenne. On ne peut y arriver que par le financement lourd du secteur productif », poursuit-elle. Dans la même foulée, Abdou Diop, managing partner Mazars explique que la forte dépendance des pays africains vis-à-vis de l'Europe et de l'Asie doit être l'élément motivateur qui va pousser les Etats à agir pour créer une souveraineté industrielle non seulement nationale mais régionale et continentale. C'est ainsi que l'Afrique pourra se positionner comme un hub en étant proche avec la Chine et l'Occident et donc relier les acteurs économiques. Et le Maroc est en mesure de jouer un rôle prépondérant dans cette future dynamique régionale grâce notamment à ses infrastructures portuaires. Ahmed Bennis, Directeur Développement Groupe de Tanger Med dans son intervention a mis l'accent sur le rôle que joue le Port Tanger Med pour le Maroc ainsi que les différents pays africains en termes de commerce international. Inauguré en 2007, le port de Tanger Med est considéré aujourd'hui au même niveau que le premier port européen de Rotterdam. Il est capable d'accueillir les plus grands cargos du Monde et est relié à près de 180 ports et 70 pays dans 5 continents différents et dispose d'une plateforme industrielle. L'année dernière, le port a triplé sa capacité, lui permettant d'entrer désormais dans la cour des plus grandes plateformes portuaires internationales. Tanger Med est passé de la 83e à la 17e place dans le classement de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement. Il sera certainement un atout majeur dans cette reconfiguration régionale et internationale post-Covid19. Quelques témoignages Présentant l'expérience de Cosumar en Afrique, le PDG, Mohammed Fikrat, a déclaré : « La pandémie nous a montré la nécessité de coopérer dans les "industries de vie" tel que l'agroalimentaire. Ce dernier est un secteur stratégique parce qu'uniquement 50% des terres fertiles en Afrique sont exploitées et à l'échelle mondiale, 50% des terres fertiles non exploitées se situent en Afrique. C'est une opportunité à saisir à condition d'injecter des milliards de dollars en tant qu'investissement dans ce domaine ». Les participants ont également pu s'enquérir du savoir-faire et de l'expertise des fleurons nationaux tels que l'AMICA et Cosumar mais aussi de pépites prometteuses telles que Energy Transfo qui sont la preuve vivante que le business intracontinental crée de la valeur et présente un grand potentiel encore inexploité. C'est ce gisement de développement extraordinaire qui doit être exploité dans les mois qui viennent pour transformer la crise en accélérateur de développement économique et social au Maroc et en Afrique, profitant ainsi des nouvelles technologies et de l'élan de solidarité public-privé observé ces derniers mois. Lire également : [Entretien] Abdou Diop : « L'entrée en vigueur de la Zlecaf devrait être maintenue pour juillet 2020 »