En matière de concurrence sur le marché marocain, certaines dispositions de la loi 104-12 demeurent floues ou incomprises pour bon nombre d'acteurs économiques. Voici ce qu'il faut savoir. Les règles du jeu en matière de concurrence sur le marché marocain restent encore incomprises pour bon nombre de personnes. Même si le Conseil de la concurrence a été remis sur pied avec la nomination de Driss Guerraoui pour veiller au grain, il n'en demeure pas moins que certaines dispositions régissant le cadre légal de la concurrence restent méconnues. Afin d'apporter un peu plus de lumière sur la question au profit de ses membres, la Chambre française de commerce et d'industrie du Maroc (CFCIM) a récemment organisé une rencontre sous le thème : « Loi N° 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence : Ambitions et limites ». Animée par l'avocat, Abbes Sekkat du cabinet Sekkat&Sekkat, cette rencontre a permis aux participants de mieux comprendre l'univers de la concurrence au Maroc. Lire aussi: Le Conseil de la Concurrence renforce sa démarche Rappelons que la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence a été adoptée en juin 2014. Abbes Sekkat a ainsi souligné que cette loi a pour objectif de préserver les acquis de la loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence votée en juillet 2000. On note ainsi qu'en matière de pratiques anticoncurrentielles, la loi 104-12 prône, entre autres, une absolution des accords d'importance mineure en matière d'entente et d'abus de domination. La loi prône aussi l'interdiction des prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation. L'autre nouveauté qu'elle apporte concerne la non-contestation de pratiques prohibées. Ainsi, lorsqu'une entreprise ou un organisme ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le montant maximum de la sanction encourue peut être réduit de moitié. Elle apporte également plus de transparence dans la mesure où elle contraint les acteurs économiques à l'obligation d'émission et de remise de facture et à l'obligation de communication du barème de prix et des conditions de vente. De même, la loi 104-12 apporte une refonte de la procédure de contrôle des opérations de concentration économique. Dans le détail, le texte adopte une nouvelle définition de ce type d'opérations axée sur la notion de contrôle ainsi que de nouveaux critères de l'opération de concentration économique. Et donne au Conseil de la concurrence le pouvoir de procéder à un examen de droit commun de l'opération de concentration économique. Il s'agit pour le conseil de constater, par décision motivée, que l'opération qui lui a été notifiée n'entre pas dans le champ des opérations de concentration économique, ou ne remplie pas les critères, d'autoriser l'opération, en la subordonnant, éventuellement, à la réalisation effective des engagements par les parties. « Le conseil de la concurrence se prononce sur l'opération dans un délai de 60 jours, (pouvant être étendu de 20 jours en cas d'engagements et suspendu à la demande des parties dans la limite de 20 jours pour finaliser les engagements) à compter de la date de la réception de la notification complète. Si le conseil de la concurrence ne prend pas de décision dans le délai de 60 jours, il en informe l'administration », stipule loi. L'autre procédure prônée par la loi de 2014 concerne l'examen approfondi de l'opération de concentration économique. A ce niveau, le conseil examine si la concentration économique est de nature à porter atteinte à la concurrence, notamment par création ou renforcement d'une position dominante ou par création ou renforcement d'une puissance d'achat qui place les fournisseurs en situation de dépendance économique, stipule le texte, ajoutant que le conseil apprécie si l'opération apporte au progrès économique une contribution suffisante pour compenser les atteintes à la concurrence. Aussi, la loi confère beaucoup de prérogatives au conseil de la concurrence (pouvoir d'auto-saisine, pouvoir de décision, possibilités de prendre des mesures conservatoires, saisine du Procureur du Roi). Le conseil peut également réaliser des expertises; il dispose du pouvoir de sanction en cas de non-exécution de ses injonctions ou de non-respect des engagements en matière de pratiques anti-concurrentielles. Toutefois, malgré les nouveautés apportées par la loi 104-12, des limites subsistent encore. A ce titre, Maître Abbes Sekkat a fait remarquer qu'il y a une présence trop importante de l'administration dans l'appareil du conseil de la concurrence ainsi que des garde-fous excessifs et une remise en cause de la place centrale du conseil de la concurrence. A titre d'exemple, l'Exécutif nomme par décret un commissaire du gouvernement au sein du conseil de la concurrence. De même, sur la liberté des prix, le conseil n'a qu'un simple rôle consultatif et surtout un pouvoir inexistant en matière d'homologation des prix.