Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
Des opposants algériens sous surveillance en France : le magazine «Marianne» multiplie les révélations sur les méthodes mafieuses du régime d'Abdelmadjid Tebboune
Plusieurs dissidents algériens réfugiés en France font état de menaces croissantes et d'intimidations attribuées aux réseaux du régime d'Alger. Une enquête approfondie de Marianne dans sa dernière livraison dévoile les mécanismes insidieux par lesquels le pouvoir algérien chercherait à museler ses détracteurs exilés. Documents judiciaires, récits d'agressions et informations issues des services de renseignement pointent vers une stratégie concertée, allant de la surveillance discrète aux tentatives d'enlèvement. Une cible de choix : Hichem Aboud sous pression Ancien officier du renseignement algérien, devenu critique acerbe du pouvoir, Hichem Aboud a été l'un des premiers à alerter les autorités françaises sur des menaces pesant contre lui. Selon les éléments recueillis par Marianne, une enquête a été ouverte en février 2022 par le parquet national antiterroriste (PNAT) après des signalements troublants. Le magazine rapporte : «Selon un informateur rattaché aux services français, un plan avait été conçu pour 'neutraliser' Aboud en Europe. L'opération aurait été confiée à un ancien militaire algérien, chargé d'approcher sa cible sous couvert de contacts amicaux.» Cette tentative aurait été révélée par l'un des exécutants présumés, saisi de remords, qui aurait confié à un agent du renseignement français les détails du projet. Marianne poursuit : «Ce projet aurait été minutieusement préparé dès novembre 2021. En Belgique, où Hichem Aboud résidait alors, un ex-officier des services spéciaux l'aurait informé qu'une 'action' se préparait contre lui. L'informateur, un ancien militaire français, lui aurait affirmé que l'opération était 'en cours de mise en œuvre'.» Les investigations menées par la police belge et les services français ont révélé des échanges suspects impliquant des membres des cercles du renseignement algérien. L'enquête a notamment mis en lumière un déplacement suspect entre Liège et Barcelone en décembre 2021, avant que l'opposant ne trouve refuge en France. Agressions et intimidations : un climat délétère D'autres figures de l'exil affirment avoir été directement visées. Le 15 août 2023, Abdou Semmar, journaliste réfugié en France depuis 2019, a été agressé à Paris en pleine journée. Son témoignage, relayé par Marianne, est édifiant : «J'étais en train de marcher quand un homme m'a aspergé le visage de gaz lacrymogène. Mon téléphone m'a été arraché. Je suis convaincu que l'objectif était de me terroriser et de voler mes contacts.» L'agression a donné lieu à une plainte, mais l'assaillant n'a jamais été identifié. Selon le journaliste, cette attaque s'inscrit dans un harcèlement plus large : «On nous fait comprendre que nous ne sommes jamais hors d'atteinte.» Le cas de Ghilas Aïnouche, dessinateur politique condamné par contumace en Algérie à trente ans de prison pour ses caricatures, illustre lui aussi ces pressions. Installé en France, il dit vivre dans la peur d'une opération clandestine : «Personne ne vient chez moi, même mes proches. Je mesure chaque déplacement, je surveille chaque regard.» Marianne souligne que ces intimidations ne sont pas des faits isolés, mais s'inscrivent dans un contexte de répression transnationale. «Plusieurs dissidents algériens ont rapporté des épisodes similaires : menaces anonymes, filatures, tentatives d'agression. Certains affirment avoir été approchés par des 'intermédiaires' leur enjoignant de cesser leurs activités.» Une stratégie d'élimination au-delà des frontières ? L'enquête de Marianne met en lumière une volonté du pouvoir algérien d'étendre sa répression au-delà de ses frontières. L'affaire Hichem Aboud est emblématique de cette lignée : «Un projet de 'neutralisation' a été envisagé non seulement en Belgique, mais aussi en Espagne et, potentiellement, en France.» Les méthodes décrites rappellent celles employées dans d'autres affaires de dissidences ciblées à l'étranger. Marianne évoque le cas des moines de Tibhirine, dont l'assassinat en 1996 demeure entouré de zones d'ombre, ainsi que les accusations de manipulation des Groupes islamiques armés (GIA) par les services algériens. Un dissident algérien interrogé par Marianne conclut avec gravité : «Si l'on pense que l'exil protège, c'est une erreur. Alger a toujours eu des relais pour frapper ses opposants là où ils se croient à l'abri.»