Un amendement controversé introduit à la hâte dans la loi de finances 2023 prévoyait une réduction significative du taux d'imposition sur les bénéfices de certaines entreprises. Selon le texte, les sociétés créées après janvier 2023, investissant dans des projets de partenariat public-privé (PPP) pour un montant supérieur à 1,5 milliard de dirhams, disposeraient d'une réduction de l'impôt sur les bénéfices, passant de 35 % à 20 %. Une mesure qui, selon le PJD, semble taillée sur mesure pour une entreprise créée précisément dans ce cadre, le 15 janvier 2023, liée au projet de station de dessalement de Casablanca. Idriss El Azami, ancien ministre délégué au budget issu du Parti justice et développement (PJD, opposition), a dévoilé le 19 décembre une affaire qui pourrait ébranler la confiance dans la gouvernance économique du pays. Lors d'une intervention publique, il a révélé les contours d'un amendement fiscal intégré à la loi de finances 2023 permettant une réduction substantielle de l'impôt sur les bénéfices pour les entreprises investissant dans des projets de partenariat public-privé (PPP) dépassant 1,5 milliard de dirhams. Cette réduction, abaissant le taux d'imposition de 35 % à 20 %, ne s'applique qu'aux sociétés créées après janvier 2023. M. El Azami a affirmé que cette disposition semble taillée sur mesure pour une société fondée le 15 janvier 2023, par Aziz Akhannouch, chef du gouvernement. Cette entreprise aurait été spécifiquement créée pour remporter le marché de la station de dessalement de Casablanca, un projet structurant réalisé dans le cadre d'un PPP. Si ces allégations s'avèrent exactes, elles soulèveraient des questions fondamentales sur la neutralité des politiques fiscales et l'usage des dispositifs législatifs au profit d'intérêts privés. Des soupçons de conflit d'intérêts au sommet de l'Etat Dans le prolongement de ces révélations, Abdellah Bouanou, président du groupe parlementaire du Parti de la justice et du développement (PJD), a pris la parole pour dénoncer une situation qu'il qualifie de scandaleuse. Selon lui, Aziz Akhannouch exploiterait ses fonctions à la primature pour favoriser ses entreprises, notamment dans le cadre du projet de dessalement de Casablanca, remporté par deux de ses sociétés : Afriquia Gaz et Green of Africa. M. Bouanou a également pointé l'implication d'une ministre membre du bureau politique du Rassemblement national des indépendants (RNI), qui aurait présidé la commission de dialogue compétitif ayant validé les entreprises éligibles. Par ailleurs, il a souligné que ces sociétés ne remplissaient pas les critères du cahier des charges, lequel stipule explicitement l'absence de conflit d'intérêts parmi les candidats. Ces accusations vont plus loin : M. Bouanou affirme que le chef du gouvernement aurait tiré parti des dispositifs législatifs, notamment la loi 86-12 sur les PPP, pour verrouiller l'accès à ces marchés. En outre, il a qualifié de mensongères les déclarations d'Akhannouch au Parlement, où ce dernier a nié que ses projets aient bénéficié de subventions publiques. Pourtant, M. Bouanou soutient que le projet de Casablanca a bel et bien bénéficié d'un soutien financier dans le cadre des investissements stratégiques supervisés par la commission nationale de l'investissement, présidée par Akhannouch lui-même. Ces graves révélations soulèvent des questions d'une importance capitale pour la gouvernance au Maroc. Comment le pays peut-il attirer des investisseurs étrangers et garantir la confiance publique si des suspicions aussi graves planent sur la transparence des processus décisionnels ? Les accusations portées par MM. El Azami et Bouanou mettent en exergue une problématique majeure : la nécessité de séparer les intérêts privés des fonctions publiques, afin de préserver l'intégrité des institutions et l'équité des règles économiques. Aziz Akhannouch est, désormais, sans une situation très délicate.