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Boualem Sansal : «En Algérie, le Sahara est le domaine exclusif du président et de son cabinet noir; le pays est régenté par l'armée, les milieux d'affaires associés et les courants islamistes sous-jacents»
Dans un entretien accordé à l'hebdomadaire français Valeurs Actuelles, Boualem Sansal, romancier et essayiste algérien, a soutenu qu'«en Algérie, le Sahara est le domaine exclusif du président et de son cabinet noir.» L'Algérie importe deux tiers de ce qu'elle consomme, consacre près de 22 milliards de dollars à ses dépenses militaires, en particulier auprès de la Russie. «Il ne lui manque plus que l'arme nucléaire pour que sa panoplie soit complète», a-t-il juré. «La crise actuelle entre Paris et Alger est une de plus, peut-être la dernière, ce qui nous reposerait tous. Pour les jeunes des deux pays, Tebboune, Macron et leurs crises, parce que ce sont leurs crises, ce n'est pas le sujet. Ils regardent leur avenir et voient qu'il est noir, et ça, ça les tue», a clamé le lauréat du Grand prix du roman de l'Académie française. «Il n'y a pas d'opinions en Algérie», dit l'écrivain pour qui, «aujourd'hui, le climat s'est durci après l'échec du Hirak (2019-2020), brisé par le Covid et par sa propre inconsistance.» En marge de cela, «le pouvoir a interdit toute manifestation publique et a considérablement accru la répression. Des journaux ont été fermés, des journalistes, embastillés, certains seraient morts sous la torture. Fatiguée, la population a cédé sur tout et ne réclame plus rien. C'est l'isolement au sens de Hannah Arendt, accoucheur de fascisme.» Pour M. Sansal, «la grande masse a choisi l'amnésie, elle ne se souvient plus du Hirak et de ses rêves de démocratie joyeuse. Le nouveau pouvoir porté par M. Tebboune lui a offert des compensations financières apaisantes, distribué au goutte-à-goutte de petites hausses de salaires, accordées à l'occasion et par surprise tous les trois, six ou neuf mois, créant ainsi la sensation d'une dynamique de progrès et de justice. Le tour de magie a bien fonctionné.» L'état des jeunes algériens est désespérant. «Ceux qui n'ont pas basculé dans l'islam radical tentent d'acquérir leur autonomie dans les réseaux d'affaires locaux ou cherchent à émigrer en faisant le siège des ambassades occidentales pour obtenir le fameux visa, avec au besoin l'aide des réseaux d'influence bien huilés de la diaspora en France ou au Canada, où elle est nombreuse, organisée et de mieux en mieux écoutée», divulgue l'auteur de 2084. «L'Algérie est régentée par l'armée et les milieux d'affaires associés, et les courants islamistes sous-jacents. Si une opinion démocrate laïque civile organisée existe, elle est de l'ordre d'epsilon. Rien n'a changé, l'économie reste plus que jamais une économie de rente», déplore, en définitive, M. Sansal.