La coalition internationale anti-Etat islamique (EI), réunie mercredi au Maroc, s'est engagée à poursuivre la lutte contre la menace croissante de l'organisation djihadiste en Afrique et sa résurgence au Moyen-Orient et dans le reste du monde. L'Algérie, pays fragile politiquement, a boudé ce rendez-vous crucial. Pire, il a préféré critiquer le Maroc en évoquant encore une fois, de manière obsessionnelle, le Sahara. La réunion ministérielle de la «coalition contre Daech (Etat islamique, EI)» a mobilisé sous haute sécurité à Marrakech une quarantaine de chefs de la diplomatie et a connu une réussite considérable. Initialement co-hôte de la réunion avec son homologue marocain Nasser Bourita, le secrétaire d'Etat Antony Blinken, testé positif à la Covid-19, a été remplacé par la diplomate Victoria Nuland. Plus grand pays d'Afrique, l'Algérie partage plus de 6 600 kilomètres de frontières avec six pays, dont certains sont en proie à des conflits. Malgré cela, Alger a préféré bouder ce rendez-vous, et verser son fiel sur la salve de reconnaissances par plusieurs Etats ou de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, ou de la prééminence du plan d'anatomie marocain comme solution définitive au conflit. «Un vacarme de déclarations orchestrées par le pays-hôte», dit le communiqué rageur de la diplomatie algérienne, broyée par les luttes intestines. Un autre motif de la colère algérienne, les mots de Nasser Bourita : «Le séparatisme et le terrorisme sont souvent les deux faces d'une même pièce. Ceux qui financent, abritent, soutiennent et arment le séparatisme contribuent finalement à répandre le terrorisme, ainsi qu'à compromettre la sécurité de territoires en paix. Faisons bien attention, encourager le séparatisme, c'est bien être complice du terrorisme», a déclaré le chef de la diplomatie marocaine en ouverture de cette réunion très largement suivie mondialement. C'est la première fois que cette coalition – lancée en 2014 et qui rassemble 84 Etats et organisations internationales (dont l'OTAN et Interpol) – tenait cette assemblée sur le sol africain. Un fait tonitruant qui irrite au plus haut point le régime algérien. Mieux, dix-neuf pays africains ont participé à la réunion, y compris le Bénin pour la première fois. Alors que le monde entier lutte contre EI, et tandis que le groupe Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) revendique, de temps en temps, dans ses communiqués diffusés samedi sur Internet, la mort de plusieurs militaires algériens, le régime d'Abdelmadjid Tebboune choisi de classer, en 2021, comme «organisations terroristes» deux mouvements politiques antirégime basés à l'étranger, l'un indépendantiste kabyle et l'autre conservateur, un tour de vis sécuritaire vivement condamné à l'étranger. Cette décision a visé le Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK, indépendantiste), interdit en Algérie, et le mouvement Rachad, qui n'a pas d'existence légale dans le pays. Aucune démarche dans ce sens n'a été entreprise contre l'Etat islamique, dont les rapports avec le Polisario se confirment de plus en plus. Au Sahel, le nombre d'«incidents terroristes» a augmenté de 43 % entre 2018 et 2021, selon les chiffres du contre-terrorisme américain. L'Algérie, pourtant, n'en veut rien savoir. Le régime, par sa politique étrangère chancelante, a sans cesse tenté de récupérer pour son compte la guerre mondiale contre le terrorisme pour renforcer sa position, que ce soit à l'extérieur, à l'égard de puissances mondiales comme les Etats-Unis et certains Etats européens, ou à l'intérieur, en utilisant l'antiterrorisme pour consolider les prérogatives de ses services de sécurités et leurs multiples instruments de contrôle et de répression utilisés contre la population. Cette sortie hasardeuse intervient alors que l'Algérie vient d'accueillir le chef de la diplomatie russe, Sergei Lavrov. Dans son acrobatie qui tente de ne pas se mettre à dos Moscou, accablée sous les sanctions internationales, l'Algérie répète que ses capacités supplémentaires d'exportation vers l'Europe sont trop limitées pour se substituer au gaz russe. Signe que ce sont les humeurs de la diplomatie qui guident son action, le ministère algérien de l'énergie a menacé fin avril de rompre le contrat de fourniture de gaz à l'Espagne si cette dernière venait à l'acheminer «vers une destination tierce», en l'occurrence le Maroc. Selon les sources de Barlamane.com, Sonatrach, qui a fourni en 2021 plus de 40 % du gaz naturel importé par l'Espagne, a réduit de 25 % ses fournitures de gaz à l'Espagne après que Madrid a apporté publiquement son soutien au projet d'autonomie marocain et suscitant la colère d'Alger.