Garde à vue de Ferhat Mehenni, projet d'attentat en Algérie attribué au Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK, indépendantiste) sans preuves, convention d'extradition avec la France, MAK et Rachad déclarées comme organisations terroristes, le régime algérien veut enterrer le projet pour l'autonomie de la Kabylie (PAK), qui se présente aujourd'hui comme l'une des alternatives les plus sérieuses pour le règlement du dossier kabyle en Algérie, et Ferhat Mehenni avec. La résurgence de groupes politiques réclamant l'autonomie politique puis l'indépendance de la Kabylie est une réalité qui change la donne pour le régime algérien, alors que la participation de la Kabylie dans le Hirak ainsi que les récentes initiatives pour élargir le mouvement populaire afin d'en finir avec les caciques en place constituent un cauchemar pour le système politico-militaire algérien en mal de légitimité. Coïncidence ? Retraçons l'histoire. Début avril, Tebboune participe à une réunion du Haut-Conseil de sécurité (HCS), qui regroupe les principaux hauts responsables de l'Etat, notamment le premier ministre, le chef de la diplomatie, le ministre de l'intérieur et le chef d'état-major de l'armée et le patron de la gendarmerie. Lors de cette réunion, le HCS «s'est penché sur les actes subversifs et les graves dérapages émanant de milieux séparatistes et de mouvances illégales proches du terrorisme, qui exploitent les marches hebdomadaires», du Hirak, selon le communiqué diffusé par les relais du régime algérien. Le texte vise spécifiquement le Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK, indépendantiste), interdit, et le mouvement islamo-conservateur Rachad, qui n'a pas d'existence légale en Algérie. Ces deux organisations ont été déclarées terroristes le 18 mai, en marge d'une garde à vue contre le président du mouvement kabyle, Ferhat Mehenni, à Paris. Selon Jeune Afrique, le leader du Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie «a été entendu par la police française dans le cadre d'une enquête pour blanchiment en bande organisée en relation avec les paris sportifs. Le même jour, Alger a décidé de classer le mouvement séparatiste comme organisation terroriste» et parle d'un «dossier vide». Basé à Paris, le mouvement de Mehenni, né dans le sillage du «Printemps kabyle» de 2001, est une des bêtes noires du régime. La Kabylie est une région berbérophone du nord-est de l'Algérie traditionnellement frondeuse vis-à-vis d'un Etat très centralisé. Elle est un des fiefs du Hirak. Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a promulgué la nouvelle convention d'extradition entre son régime et la France, selon un décret présidentiel paru au Journal officiel mercredi 12 mai. Le gouvernement algérien et le gouvernement français «s'engagent à se livrer réciproquement, selon les règles et sous les conditions établies par [cette] convention, les personnes poursuivies ou condamnées par leurs autorités judiciaires compétentes», précise le texte. Les infractions pouvant donner lieu à extradition sont celles «punies par les lois des parties d'une peine privative de liberté d'au moins une année ou d'une peine d'emprisonnement plus sévère», poursuit-il. Entre 2014 et 2019, 38 demandes d'extradition ont été finalisées entre les deux pays, dont 30 vers la France et 8 vers l'Algérie, selon des sources françaises. Le régime algérien cherche par tous les moyens, notamment médiatiques, à discréditer le mouvement Hirak. La croisade des autorités algériennes contre Mehenni s'inscrit dans le long registre de la répression menée par le pouvoir à l'encontre des leaders et des populations kabyles depuis les années 80 en passant par les événements du printemps noir de 2001 qui ont fait des centaines de morts et de disparus. Mais la France livrera-t-elle Ferhat Mehenni à l'Algérie ?