Suite aux révélations de la presse allemande montrant que la police fédérale du pays, le Bundeskriminalamt (BKA), avait utilisé le logiciel espion Pegasus début 2020, l'hebdomadaire Die Zeit vient faire une révélation et déclare que le service de renseignement extérieur allemand, le Bundesnachrichtendienst (BND), est également client du très controversé mouchard informatique. Conçu par la société israélienne NSO Group qui le vend exclusivement aux forces de police ou de renseignement, Pegasus permet de prendre un contrôle quasi total sur un téléphone, qu'il fonctionne avec Android ou iOS, à l'insu de son utilisateur. Une fois installé, le programme permet d'écouter les conversations, de connaître la géolocalisation de l'appareil, et même d'activer l'appareil photo ou d'enregistrer les archives des messageries chiffrées comme WhatsApp. Les circonstances dans lesquelles le BND a pu utiliser Pegasus sont inconnues. « Mais lorsque le BKA avait signé un contrat avec NSO Group, les services juridiques de la police fédérale s'étaient eux-mêmes inquiétés des capacités du logiciel : ils craignaient que son utilisation, même dans le cadre d'enquêtes en bonne et due forme, soit contraire à la Constitution allemande, qui garantit le droit à la vie privée. Le BKA avait spécifiquement demandé à NSO Group de limiter les capacités du logiciel pour son usage », rapporte le média LeMonde. Vendredi 8 octobre, la députée Die Linke (gauche) Martina Renner a interpellé, plusieurs responsables du parti écologiste Die Grünen et du FDP, deux partis qui ont plaidé ces derniers mois pour un encadrement ou une interdiction des logiciels espions et qui sont aujourd'hui en position de « faiseurs de rois » pour la formation du futur gouvernement allemand. En ce qui concerne l'Europe, selon des sources internes à NSO Group et au sein des services de renseignement de plusieurs pays européens, l'Allemagne est loin d'être le seul pays de l'Union à avoir utilisé Pegasus. En Espagne, des militants indépendantistes catalans ont été ciblés par le logiciel espion, sans que l'on ne sache précisément quel service de sécurité du pays en était le client. Quant à la France, NSO Group a approché, ces dernières années, plusieurs services de police ou de renseignement dans l'Hexagone, mais aucun n'a acquis de licence pour le logiciel, d'après les informations du Monde. La source rapporte qu'une source familière du fonctionnement interne de NSO Group, Pegasus ne permet désormais plus de cibler les pays de l'alliance « Five Eyes », qui regroupe les Etats-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. D'après cette source, le logiciel peut uniquement espionner les téléphones de ces pays lorsque le client est du même pays : un client australien de Pegasus (service de maintien de l'ordre ou de renseignement) pourrait ainsi surveiller seulement des téléphones australiens. LeMonde révèle également que la ministre française des armées, Florence Parly, a demandé aux autorités israéliennes que les numéros français soient eux aussi protégés, a-t-elle révélé fin septembre dans un entretien au Monde. « Nous avons eu une réponse nous disant que ce serait le cas. Je ne peux rien vous dire de plus », a déclaré Mme Parly.