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Les omissions coupables de Human Rights Watch
Publié dans Barlamane le 22 - 09 - 2020

Omar Radi est jugé «du seul fait de ses opinions», ne cesse de répéter HRW. La reconnaissance des victimes, elle, reste occultée, oubliée, marginalisée.
Non pas un rapport, mais une lecture prophétique, creuse et pâteuse, intensément sélective d'une affaire judiciaire. Absence de prise en compte du contexte, des énonciations non prouvées. Human Rights Watch, l'ONGI américaine, a publié sur son site Internet, le 21 septembre, un long récit peu structuré par un impératif d'impartialité. Les rhétoriciens de l'ONGI ont bien compris qu'il est toujours plus facile de légitimer des arguments par des suppositions. Des arguments «moraux» à défaut d'arguments «réels», des apparences de réponses, et un «amalgame» invraisemblable de personnages. Cette matière informative est commode puisque, par définition, invérifiable. En effet de qui et de quoi s'agit-il ?
Le temps est à la négation des plaignants et de leur droit à l'existence, au primat du verbe sur la réalité. La même antienne, incessante : «l'inculpation ne repose sur aucun élément probant», détention «arbitraire», «insuffisance de preuves» et «pas de témoignages à charge». Tous «nient tous les faits qui leur sont reprochés», dénoncent des «affaires politiques» et des «preuves fabriquées», et affirment des «relations consenties.» La manière dont HRW rend compte des affaires judiciaires, comme si celle-ci se déroulait en vase clos, indépendamment des faits, reflète une déconnexion chronique. Plus globalement, elle est symptomatique des travers de la couverture de certaines ONGI. La hantise de défendre certaines personnes passe pour un déni de la souffrance de leurs plaignants.
Que signifie le fait de publier un document sur le journaliste Omar Radi, placé en détention depuis le 29 juillet, pour «viol» et «réception de fonds étrangers en vue de porter atteinte à la sécurité intérieure de l'État», 24 heures avant le début de son procès ? HRW, dans son rapport, récolte la parole de proches de Omar Radi, sans la traiter par avec la prudence que devrait imposer sa marge d'erreur.
HRW dit que tout est «délits de presse», «délit d'opinion» à grand renfort des «petites phrases», et d'une personnalisation effrénée des affaires judiciaires. Le manque de distanciation entraîne au mieux une forme de myopie ; au pis, une connivence ; parfois une passive complicité.
Omar Radi interpellé le 5 juillet au soir pour «ivresse publique et violences» puis placé en garde à vue à Casablanca ? Tout a été «provoqué», dit HRW. La justice marocaine condamne Taoufik Bouachrine à quinze ans de prison pour des violences sexuelles, «traite d'êtres humains», «abus de pouvoir à des fins sexuelles», «viol et tentative de viol» ? HRW dit qu'il a été poursuivi pour son travail malgré les preuves, les huit plaignantes et les témoignages.
HRW fait l'impasse sur des «délits relatifs à l'attentat à la pudeur avec violence et viol», après une «plainte déposée par une femme» qui affirme que sa voix n'est pas étendue. HRW lui consacre une seule ligne dans son rapport.
Omar Radi fait également l'objet d'une deuxième enquête «au sujet de la réception de fonds de parties étrangères en vue de porter atteinte à la sécurité intérieure de l'État» et «de mener des contacts avec des agents de pays étrangers pour nuire à la situation diplomatique du Maroc», selon le parquet. Ailleurs, ces accusations sont prises très au sérieux.
HRW omet de citer le fait que les autorités marocaines ont «réfuté catégoriquement» les allégations infondées d'Amnesty International, selon lesquelles le Maroc a piraté le téléphone de Omar Radi avec un logiciel espion. Dans un communiqué, le gouvernement appelle l'ONG à «étayer» son rapport «par des preuves». Ce qui n'a pas encore été fait.
Un groupe obscur de 110 journalistes a appelé les autorités marocaines à prendre des mesures contre les «médias de diffamation (sic !)» qui s'attaquent aux «voix critiques (resic!)». Du jamais vu. Les opinions participant de la pluralité des positionnements et des présupposés appelées à se taire. La liberté d'expression est toujours un pilier de l'État de droit au Maroc, ne nécessitant aucune autorisation préalable.
L'ex-rédacteur en chef du quotidien proche des islamistes Akhbar al-Yaoum, Soulaiman Raissouni a été interpellé fin mai à la suite d'accusations publiées sur Facebook par un militant pour les droits des personnes LGBT (lesbiennes, gays, bisexuelles, trans). Le juge d'instruction près de la cour d'appel de Casablanca avait décidé «de placer Soulaiman Raissouni en détention préventive pour les besoins d'une enquête sur des faits présumés d'attentat à la pudeur avec violence et séquestration».
Malgré cela, Soulaiman Raissouni n'est «que» victime de ses opinions.
Les autorités marocaines ont toujours affirmé que les procédures judiciaires sont conformes aux normes internationales. La nouvelle constitution accorde une place spécifique à la justice, le chantier reste ouvert et la mise en place des mécanismes propres à un État de droit, dans l'acceptation communément admise, ne cesse de continuer. La voici, la vérité.


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