ALM : Que traduisent les critiques du porte-parole du gouvernement vis-à-vis des interventions des députés de la majorité ? Mohamed Darif : Une autre fois c'est le problème de l'homogénéité qui s'impose au gouvernement. La cohésion de la majorité est à chaque fois affectée bien que Benkirane essaie toujours d'y remédier et de rassembler les chefs de la majorité pour mettre les points sur les «i». D'ailleurs récemment, il a décidé d'élargir l'action de la majorité en rassemblant également tous les parlementaires et pas seulement les chefs. Cette fois encore, le fait que le porte-parole du gouvernement critique un groupe parlementaire, en l'occurrence celui de l'Istiqlal, qui a exprimé des positions hostiles en mettant en cause le projet de loi de Finances pose un problème d'homogénéité. Parce qu'avant de présenter ce projet de loi de Finances au Parlement, la logique exige qu'il y ait un minimum de coordination et de collaboration entre les chefs de la majorité et ses parlementaires. On en conclut par cette polémique donc que le gouvernement agit seul sans ces députés qui ont permis sa formation, il adopte vis-à-vis d'eux la même attitude qu'il a avec l'opposition. Qu'en est-il du communiqué publié par l'Istiqlal dans lequel il a vivement critiqué l'attitude du gouvernement ? Ce communiqué accentue les divergences qui existent entre l'Istiqlal et le PJD. Divergences qui sont apparues dès l'élection de Hamid Chabat en tant que secrétaire général de l'Istiqlal lorsqu'il a appelé à un remaniement. Ainsi aujourd'hui encore, il ne s'agit pas d'un malentendu mais d'une contradiction entre deux visions de voir la gestion de la chose publique et les priorités. Alors que Chabat voit le gouvernement dirigé par le PJD comme étant une coalition de quatre partis qui doit agir de manière collégiale, le PJD se comporte comme étant le parti qui a été choisi par le peuple, celui qui a eu le plus de voix, donc celui qui dirige et assume seul la responsabilité du gouvernement.
Que révèle encore cette polémique ? Ce qui a aussi suscité la colère du groupe parlementaire, c'est aussi le fait que le PJD n'ait pas toléré les interventions et les critiques des parlementaires de l'Istiqlal alors qu'il laisse une marge de liberté à ses députés, notamment Abdellah Bouanou qui a ouvertement critiqué le projet de loi de Finances le considérant comme ne répondant pas aux attentes des Marocains. Un autre aspect concerne le fait que le gouvernement fait l'amalgame entre le parti politique qui compose la majorité et le travail du groupe parlementaire. Outre d'exercer son rôle de légiférer, un parlementaire assume celui de contrôler l'action du gouvernement. Enfin, le communiqué publié à l'issue du Conseil de gouvernement a soit été diffusé à l'insu des six ministres istiqlaliens qui composent le gouvernement, soit ils sont pour cela. Dans ce cas, le problème qui se pose concerne la nature du rapport qu'ont ces ministres avec Hamid Chabat.