Martine Aubry a formulé un rêve qui semble avoir donné des cauchemars à beaucoup, à droite comme à gauche. Celui de prétendre publiquement que le PS peut réaliser le grand chelem lors des prochaines élections régionales. C'est un rêve éveillé que la première secrétaire des socialistes, Martine Aubry a formulé et qui semble avoir donné des cauchemars à beaucoup, à droite comme à gauche. Celui de prétendre publiquement que le PS peut réaliser le grand chelem lors des prochaines élections régionales, remporter les vingt-deux régions que compte la carte électorale française. Le PS en contrôle déjà vingt. Et il ne lui manque que l'Alsace et la Corse. Il est vrai qu'une ambition pareille, dans le contexte des profonds antagonismes que vit le PS, peut facilement faire sourire. Martine Aubry ne serait-elle pas en train de se livrer à un exercice d'auto-conviction pour se donner du courage à son propre leadership et de l'espérance aux troupes socialistes, hésitantes et interrogatives, qui attendent que le cap soit tracé et que le projet de victoire soit dessiné. Il n'empêche que lorsque Martine Aubry a déroulé son ambition, les sourires moqueurs qui avaient l'habitude d'accompagner ses sorties des deux bords, se sont figés. Et si par bonne fortune pour les uns, par malheur pour les autres, le vœu électoral de Martine Aubry se réalise, il y a de quoi revoir de nombreux desseins politiques qui attendaient patiemment ce scrutin régional pour positionner leurs stratégies. A droite, signe que la frénésie est à son comble, la déclaration de Martine Aubry fut accueillie avec une fraîcheur inhabituelle : «Un péché d'orgueil», dit Yves Jégo, conseiller politique de l'UMP, «une arrogance qui frise l'aveuglement», lui renvoie en écho, Fréderic Lefebvre, porte-parole du parti présidentiel. C'est que le but visé par Martine Aubry, si immodeste, si ambitieux soit-il, est loin de faire partie du fantasme inaccessible. La campagne que mène l'UMP dans les régions est loin d'accrocher l'électeur. Handicap majeur, les candidats doivent, même s'ils n'en portent pas la responsabilité directe, rendre compte sur l'ensemble de la politique du gouvernement. Les sondages montrent quotidiennement que ces résultats sont loin d'être populaires et satisfaisants. Le style de campagne choisi par l'UMP a aussi de quoi défriser. La dernière création qui fait hurler de rire et d'indignation fut le clip des jeunes UMP où de nombreux ministres se déhanchent sur un karaoké endiablé de ridicule et de grossièreté selon ses détracteurs. A gauche aussi, le grand chelem promis par Martine Aubry ne serait pas une bonne affaire pour beaucoup. Le PS s'apprête à organiser des primaires pour enfanter un candidat capable de défier Nicolas Sarkozy lors des présidentielles de 2012. Un excellent résultat des socialistes lors de régionales mettraient définitivement Martine Aubry dans une orbite indéboulonnable. C'est dans cette optique qu'il faut comprendre la réaction de Ségolène Royal aux propos de Martine Aubry lorsqu'elle invite la première secrétaire à ne «jamais préempter des résultats électoraux». C'est dans ce sens qu'il faut saisir la réponse amère de François Hollande lorsque les journalistes commencent à comparer Martine Aubry à la chancelière allemande Angela Merkel : «Je crois qu'elle est là pour être première secrétaire», avait-il lâché, bougon.