Lundi, alors que les Marocains célébraient Aïd Al Fitr dans la sérénité et l'unité, ceux de la ville occupée de Sebta l'accomplissaient, pour la première fois depuis 14 siècles, dans la tension et la division. Au moment de la prière d'Al Aïd, et contrairement à ce qui a toujours été fait, les Marocains de Sebta se sont divisés en deux clans. Pour la première fois dans l'histoire de Sebta, les musulmans sunnites malékites ont été contraints d'improviser un lieu de prière autre que celui où ils avaient l'habitude d'organiser ce rituel d'Al Aïd. La prière a été célébrée à la mosquée Sidi Mbarek dont les membres de la Fédération espagnole des entités religieuses islamiques (FEERI) ont dû aménager l'esplanade afin de pouvoir y accueillir des centaines de fidèles. Et malgré le fait que des installations ont été incendiées par des inconnus la veille de la fête, la prière a quand même pu être organisée grâce aux efforts déployés par les membres locaux de la FEERI et le prêche a été prononcé par l'imam Ahmed Taher Hammou, membre du Conseil régional des ouléma de la région Tanger-Tétouan qui couvre la ville occupée de Sebta et prédicateur de la mosquée Al Amir, la plus importante de la ville. La prière du deuxième clan a été organisée par «l'Union des communautés islamiques de Ceuta» (UCIDCE), une organisation créée en juillet 2007 sur instigation des services d'intelligence espagnols afin de «réduire l'influence islamique marocaine» à Sebta et de «mettre fin à l'allégeance des musulmans de Ceuta au Roi du Maroc comme commandeur des croyants». Une opération qui a bénéficié, évidemment, du soutien des autorités locales. La prière du lundi organisée par l'UCIDCE a été «honorée» par la présence du président de la ville autonome, Juan Vivas, du Parti Populaire (PP). Il est à signaler que les renseignements espagnols ont lancé l'opération «Media luna» (croissant lunaire) détectée par leurs homologues marocains durant l'été 2007 (voir ALM n° 1480 du 17 août 2007) et qui consiste à encourager la création d'associations musulmanes prônant d'autres doctrines que le rite malékite. Une opération à haut risque qui va faire de la ville une bombe à retardement qui risque d'exploser à tout moment. «Créer une situation aussi dangereuse et incontrôlable juste pour réduire l'influence marocaine, cela ressemble, indique un connaisseur, à une politique de terre brûlée». À Madrid, on semble avoir senti le début de la fin s'approcher!