Nadia, âgée de 16 ans, a entretenu une relation amoureuse avec un jeune homme, son aîné de quinze ans. Sa famille a réagi en portant plainte contre lui et en mettant fin à leur amour. «Je suis innocent, M. le président ». C'est la réponse qu'entend souvent ce magistrat à chaque fois qu'il interroge un suspect. Ce suspect qui se tenait, ce jour du mois d'avril, devant lui est-il vraiment innocent ? Peut-être. Nous sommes au tribunal de première instance à Casablanca. La salle d'audience à la chambre correctionnelle était archicomble. Au banc des accusés, il y avait plus d'une trentaine de suspects poursuivis pour différents délits. Parmi eux, Ahmed qui clamait son innocence. Ce jeune de trente et un ans, célibataire et sans profession, avait déjà purgé une peine d'emprisonnement de quatre mois pour coups et blessures. Depuis, il n'a jamais été interpellé par la police. «Tu es accusé de détournement d'une mineure et coups et blessures, qu'en dis-tu ? », lui a demandé le magistrat. Ahmed a gardé le silence comme s'il n'a rien entendu. Le juge lui a ordonné de répondre. «Elle était ma copine, M. le président», a-t-il répondu. Nadia se tenait, elle aussi, devant le juge. Non en suspecte, mais en victime. «Oui M. le juge, il m'a croisée quand j'étais de retour de mon collège et m'a demandé d'entretenir une relation amoureuse avec lui», a-t-elle balbutié devant le juge sans arriver à regarder Ahmed qui est au box des accusés. À son âge, il semble difficile de tourner le dos à un «beau gosse» qui choisit ses mots pour mettre une fille dans ses filets. Nadia n'a pu que lui sourire. Un sourire qui a encouragé Ahmed à l'inviter à un café. Facilement, elle l'a accompagné pour prendre un thé à la menthe et un jus de fruit. Ahmed n'a pas raté l'occasion pour lui peindre la vie en rose. Des mots qui n'ont pas permis à Nadia de se rendre compte de la différence d'âge entre eux. Quinze ans d'écart ? Inconcevable.«Je l'ai aimé, M. le juge», a affirmé Nadia devant le tribunal. Mais, selon la loi, ils n'ont pas le droit de s'aimer car elle est encore mineure. En fait, c'est lui qui va payer les pots cassés. Ahmed n'a pas hésité de conduire, de temps en temps, Nadia chez un ami pour coucher avec elle sans la déflorer. « J'ignorais, M. le juge, qu'un homme ne pouvait pas avoir de relation amoureuse avec une fille de 16 ans», déclare Ahmed. Tout se passait sans problème entre Nadia et Ahmed, jusqu'au jour où la famille de Nadia a été mise au courant de leur relation. Ses parents se sont adressés à Ahmed et lui ont demandé de ne plus rencontrer leur fille. Mais, ils ont remarqué qu'il n'hésitait pas, à chaque fois, de l'attendre devant le collège. Ils ont fini par porter plainte contre lui par le biais d'un avocat. Celui-ci a requis de soumettre l'affaire à la Cour d'appel, parce qu'il s'agit, selon lui, d'un crime. Une requête qui a été rejetée par le juge. Celui-ci a condamné, enfin, Ahmed à quatre mois de prison ferme.