L'alerte de l'AIVD contre les renseignements marocains a certainement provoqué des éclats de rire chez leurs homologues à travers le monde. Les services de renseignements des Pays-Bas alertent, dans un rapport rendu public le 21 avril, leur gouvernement sur le danger que constitueraient les activités de leurs homologues marocains sur le territoire néerlandais. Ce danger jugé «important» par les services secrets hollandais est justifié par plusieurs raisons selon l'AIVD. Dans son rapport annuel, ce service a tenu, cette année, à faire un arrêt assez particulier sur une présumée menace des services étrangers marocains, russes et chinois. L'AIVD indique dans son rapport que les Russes concentreraient leurs efforts d'espionnage sur l'OTAN, l'industrie de la Défense ou le secteur énergétique, alors que les Chinois essaieraient «d'influencer la prise de décision», et seraient à l'origine d'«attaques virtuelles» sur des réseaux informatiques néerlandais. Des accusations qui correspondent parfaitement aux menaces étrangères telles que présentées dans le cinéma hollywoodien. Certes, une dose minimale de paranoïa est nécessaire pour la réussite d'une action de contre-espionnage – les élèves officiers l'apprennent dès le premier jour de leur formation –, mais un minimum de bon sens est aussi exigé. Sinon, on tombe dans une phobie excessive qui conduit à des attitudes contreproductives ou, même, à des actions qui peuvent porter atteinte aux intérêts de l'État que l'on est censé protéger. D'ailleurs, il est remarquable comment les rédacteurs du rapport de l'AIVD révèlent inconsciemment le fait que, eux mêmes, ils ne croient beaucoup à la thèse qu'ils avancent. «Les responsables politiques et économiques néerlandais ne sont pas encore assez conscients des risques» qu'ils courent, d'autant que la «menace» est «importante et diverse », indique le rapport de l'AIVD. «Ils ne vont nous croire, parce qu'ils ne sont pas conscients du danger», semblent dire les agents de l'AIVD. Or, il est clair que la thèse de la menace que constitueraient les services marocains est une affaire ridicule qui a certainement provoqué des éclats de rire du siège de la CIA à Washington à celui du FSB à Moscou en passant par la DGSE française, le CNI espagnol, et tous leurs homologues, sérieux, à travers le monde. Les agents marocains à l'étranger ont toujours opéré dans le cadre du respect des limites conventionnellement tracées entre les services de sécurité dans le monde entier. C'est pour cela que, jamais, ces services ont toujours été appréciés pour leur discipline et, surtout, pour leur sens du partage de l'info. Ce qui est une chose très précieuse en ces moments où les Etats démocratiques mènent une guerre planétaire contre le terrorisme. Cela n'empêche pas qu'il y ait de temps en temps des fausses notes. Mais cela émane de services peu crédibles et très peu professionnels qui tentent de camoufler leur incompétence à travers des accusations infondées qui tournent généralement au ridicule. Le monde du renseignement en a vu deux cas durant cette année : la bourde des services belges dans l'affaire Belliraj et celle du rapport hollandais. Et, vu la proximité géographique et les relations osmotiques entre les services de ces deux pays, difficile de croire à la coïncidence.