La relation entre Nicolas Sarkozy et Patrick Devedjian n'a pas connu de répit à cause des résultats catastrophiques de la droite lors des dernières municipales. Il a été reproché au secrétaire général de l'UMP de ne pas avoir su transformer ce parti en machine à gagner. Parce qu'à un moment donné de sa longue carrière politique, Patrick Devedjian avait incarné avec un relief bien marqué le rôle de fidèle flibustier de Nicolas Sarkozy qu'aujourd'hui la moindre des humeurs de l'actuel secrétaire général de l'UMP le fait passer pour un incorrigible insurgé. Patrick Devedjian avait débuté le quinquennat de Nicolas Sarkozy par un éclat que les annales avaient capté goulûment. N'avait-il pas demandé, dans un grand éclat de rire jaune, lorsque le président de la république avait fini de monter l'échafaudage original de l'ouverture, que celle-ci puisse se détendre jusqu'aux sarkozystes. Sur le coup, cette charge avait fait rire les fidèles et sourire les adversaires. Une saillie drolatique capable de décrocher avec honneur le prix de l'humour politique. Peu d'observateurs avaient senti à l'époque qu'à la place de cette autodérision passagère, un malaise profond était à l'œuvre. Patrick Devedjian se muait en silence en opposant aux grands choix de l'ère Sarko. Il faut dire que le calvaire de Patrick Devedjian avait commencé au tout début de cette aventure présidentielle, lorsque Nicolas Sarkozy, justifiant l'ouverture, avait lancé une croisade psychologique contre l'Etat UMP qu'il voulait absolument éviter. Cela s'est poursuivi avec le casting gouvernemental. Non seulement Patrick Devedjian s'est vu priver du seul poste qu'il guignait, celui de Garde des sceaux ministre de la Justice au profit d'une novice et d'une inconnue en politique, Rachida Dati, mais même à la tête de l'UMP, il fut flanqué d'une direction collégiale avec la présence de l'insubmersible Jean-Pierre Raffarin. Avec tout de même un lot de consolations : la présidence du Conseil général des Hauts de Seine. Depuis, ce député d'origine arménienne, farouche opposant de l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, ne rate aucune occasion de marquer sa différence. Sur le ton «l'UMP soutient le gouvernement mais elle ne doit pas avoir peur d'ouvrir les débats qui la préoccupent», Patrick Devedjian continue de faire la difficile synthèse entre «sa loyauté» à l'égard de Nicolas Sarkozy et sa «liberté de pensée» qui le fait exister. A tout ceux qui lui rappellent les enjeux d'une telle posture, Patrick Devedjian joue les blasés : «J'ai 63 ans, je ne veux pas être président de la république ni Premier ministre. Ministre ? Mmm… Et puis, il reste tant de livre à lire…». La relation entre Nicolas Sarkozy et Patrick Devedjian n'a pas connu de répit à cause des résultats catastrophiques pour la droite des dernières municipales. Il a été longtemps reproché au secrétaire général de l'UMP de ne pas avoir su transformer ce parti en machine à gagner. Voulant signifier une vraie reprise en main, Nicolas Sarkozy avait nommé deux adjoints de taille à Patrick Devedjian en la personne du fidèle Xavier Bertrand ministre du Travail et de la combative Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat à l'Ecologie. La relation au sein de ce trio est glaciale et l'ambiance des plus lugubres. Sans doute, pour bien manifester la profondeur de sa mauvaise humeur, Patrick Devedjian a récemment mis un coup d'accélérateur en demandant ouvertement le démantèlement des 35 heures, durée légale du travail instaurée par la socialiste Martine Aubry. Cette positon de principe a le don d'agacer au plus haut niveau Nicolas Sarkozy et son ministre du Travail Xavier Bertrand déjà engagés avec les partenaires sociaux dans un bras de fer sensible. Pour Patrick Devedjian, ce débat a de fortes chances d'être amplifié lors de la convention sociale de l'UMP prévue ce 12 juin. L'occasion de mettre davantage l'exécutif dans un situation des plus inconfortables avec les leaders syndicaux qui s'arcboutent sur la protection des 35h. A l'image de Jean-François Copé, patron du groupe UMP à l'Assemblée, Patrick Devedjian inscrit son action dans une sourde opposition tellement évidente que certains observateurs estiment que l'une des erreurs stratégiques de Nicolas Sarkozy est de ne pas avoir pensé à offrir des fauteuils ministériels à ces deux indomptables tempéraments, la meilleure manière de désarmer leur capacité de nuisance. Les stratèges de l'Elysée peuvent toujours murmurer qu'il n'est pas trop tard pour combler ce déficit.