La nature impatiente et le tempérament éruptif de Nicolas Sarkozy le classeraient plutôt dans la catégorie de ceux qui voudraient remanier en opérant un grand changement. Entre les deux tours de ce scrutin municipal, le spectacle était permanent et la méthode Coué de rigueur. Tandis que la majorité présidentielle, soulagée, se gaussait de cette petite vaguelette rose qui vient d'éclabousser les urnes contrairement au tsunami maintes fois annoncé, la gauche et le Parti socialiste se disent certains que dimanche, une belle claque résonnera bruyamment aux oreilles présidentielles pour lui rappeler le cumul des mécontentements contre sa politique. En attendant le grand jour, certaines divergences au sommet de l'Etat et de l'appareil commencent à faire surface. D'abord sur le comportement politique à observer au lendemain d'un désaveu annoncé. La nature impatiente et le tempérament éruptif de Nicolas Sarkozy le classeraient plutôt dans la catégorie de ceux qui voudraient remanier en opérant un grand changement. Il ne ferait que «tenir compte» du résultat de dimanche, mais son Premier ministre François Fillon adopte la positon inverse et s'accroche au statu quo : «Je prône, et tout le monde le sait depuis longtemps, une stabilité gouvernementale, mais ce n'est pas à moi à prendre cette décision, c'est le président de la République (…)». «La France est le seul pays en Europe qui change plusieurs fois de gouvernement entre deux élections législatives (..) Tous les grands pays modernes choisissent une équipe de gouvernement, choisissent un projet politique et le mettent en œuvre pendant 4 ou 5 ans». Avant de relativiser son propos et laisser une étroite marge de manœuvre au président de la république : «Mais ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas changer tel ou tel individu». François Fillon, déjà gâté par les sondages, est en train de vivre une vraie résurrection politique. Après avoir froidement ignoré Nicolas Sarkozy rangé brusquement au rang des pestiférés qu'on ne montre pas, de nombreux candidats en difficultés s'arrachent la présence de François Fillon à leurs côtés. Tous voudraient bénéficier de la baraka des instituts de sondages qui le protège. Pour Nicolas Sarkozy, même l'élection d'Alain Juppé à Bordeaux n'est pas forcement une bonne nouvelle. La légende voudrait que sitôt le résultat connu, le président de la république s'est jeté sur son téléphone pour féliciter l'heureux vainqueur bordelais. C'était sans oublier qu'Alain Juppé n'a pu accéder à son élection que grâce au MoDem de François Bayrou, l'ennemi intime de Nicolas Sarkozy. Ce soutien se paie cash et le renvoi d'ascenseur est immédiat. Non seulement Alain Juppé plaide discrètement la cause de François Bayrou auprès de l'Elysée, mais fait publiquement savoir sa position à la presse : «Je souhaite le succès à François Bayrou à Pau et si j'étais électeur à Pau je voterais pour lui, d'abord parce que j'apprécie beaucoup ses qualités humaines, même si nous avons eu parfois des divergences et si sa stratégie actuelle me paraît parfois un peu confuse». Alain Juppé, éphémère ministre du premier gouvernement de François Fillon, brutalement recalé lors des dernières législatives, est un véritable miraculé. Il se permet même quelques coups de griffes à l'encontre de la stratégie de Nicolas Sarkozy qui en disent long sur ses possibles ambitions politiques : «C'était une erreur de vouloir politiser cette élection. C'était un mauvais mélange des genres, encore moins bon quand la situation nationale n'est pas porteuse (…) Quand il (Nicolas Sarkozy) est venu à Bordeaux, sur le chemin de Pau, je lui ai dit que ce n'était pas une bonne stratégie et il a compris». L'autre grand souci de Nicolas Sarkozy lui vient de sa propre formation politique l'UMP. L'humeur présidentielle était tellement maussade sur le sujet qu'il a laissé un de ses proches, le député UMP des Hauts-de-Seine et maire de Levallois-Perret, Patrick Balkany déverser ses menaces sur l'avenir du Parti : «Je pense qu'il y a eu quelques manques, quelques oublis. Il n'y a pas eu de campagne de mobilisation, on n'a pas eu de grande campagne de sensibilisation (…) personne n'est immuable (…) peut-être qu'il y aura des ajustements à faire au niveau de la direction nationale». L'homme qui est visé par cette charge est le secrétaire général de l'UMP, Patrick Devedjian qu'on annonce au gouvernement pour mieux le remplacer à la tête de l'UMP.