Mauritanie. Issu de l'ex-majorité présidentielle, le candidat Sidi Ould Cheikh Abdellahi est en pôle position pour le second tour des élections présidentielles mauritaniennes prévues ce dimanche 25 mars. Les balanceurs d'encensoirs voient déjà dans Sidi Ould Cheikh Abdellahi le premier locataire du Palais Gris à n'avoir pas franchi ce sanctuaire, l'arme à la main. Tout un symbole. Pourtant, le scrutin de ce 25 mars est des plus ouverts. Mathématiquement rien n'est joué. Certes, le candidat négro-africain, Ibrahima Moktar Sarr, a lancé une consigne de vote en faveur d'Ahmed Ould Daddah, adversaire de Abdellah Ould Cheikh, imitant en cela le progressiste Mohamed Ould Maouloud lequel a encore du mal à convaincre son bureau politique à l'heure où s'écrivent ces lignes. De l'autre côté, le camp de Sidi Ould Cheikh Abdellahi, déjà nourri du report des petits poucets (ceux qui ont obtenu entre 1 et 2%), s'est renforcé du ralliement de Zeidane Ould Ziedane (arrivé 15e lors du premier tour) et, ce qui constitue la grosse surprise de l'entre deux tours, du suffrage Messaoud Ould Boukheir leader de la communauté haratine, arrivé quatrième lors du premier tour. En tout, 11 candidats se sont rangés du côté du candidat issu de l'ex-majorité présidentielle contre seulement 6 pour son adversaire. En additionnant les scores des uns et des autres, le report est favorable à Ould Cheikh Abdellahi, avec 57% des voix contre 43% pour son adversaire. Un décompte qui ne tient pas compte bien entendu du comportement de l'électeur mauritanien d'essence indiscipliné. Longtemps accusé d'être l'homme de paille des militaires, Sidi Ould Abdellah Cheikh, issu d'une famille maraboutique des environs d'Aleg (300 km au sud de Nouakchott), refute cette «rumeur » et se pose en homme du changement serein : «je suis pour la démocratie, pour la séparation des pouvoirs législatifs, judiciaire et exécutif et contre la crispation des rapports entre les militaires et le gouvernement élu», déclare-t-il à la presse étrangère. Et de poursuivre «ma priorité sera, par un certain nombre d'actes, de montrer aux Mauritaniens, qu'un véritable changement va s'opérer et que ce changement sera basé sur la recherche d'un climat consensuel, pour pouvoir mettre en chantier un certain nombre de réformes qui sont prévues dans mon programme», explique-t-il à Radio France Internationale. Presque tous les médias étrangers à l'image d'Al Jazeera dont le correspondant local, menacé de mort, a reçu une visite d'hommes armés, et de Radio France Internationale, soupçonnée de sympathie pour Ahmed Ould Daddah, sont accusés de faire le jeu de l'un ou l'autre candidat. La télévision publique n'échappe pas à la critique, ce qui justifie la sortie circonstanciée de la HAPA (Haute autorité de presse et de l'audiovisuel), qui a expliqué le semblant de déséquilibre par le volume d'activité des deux candidats. Du reste, cette posture supposée d'homme de candidat des militaires provoque chez Sidioca un véritable ras-de-marée de la part des thuriféraires de l'ancien régime et de certaines notabilités qui ne veulent pas «se retrouver dans le mauvais camp». Ces ralliements, à l'image de cette «Caravane de l'espoir », formée par les notabilités de Kiffa, pèseront-ils dans le scrutin ? En tout cas, ces mouvements de notables sous fond d'alliances tribales relèguent au deuxième plan le débat et les programmes politiques des uns et des autres. Le face-à-face entre les deux candidats qui devait être retransmis, jeudi 22 mars, en direct sur la chaîne de télévision publique nationale, devait réhabiliter les questions de fond en attendant le grand jour. Quoi qu'il en soit, le prochain président de la Mauritanie sera un homme qui n'a jamais porté d'uniforme. Une première depuis un certain 10 juillet 1978.