Le Mouvement Unicité et Réforme (MUR) accuse explicitement les services de sécurité et les autorités judiciaires d'avoir inventé l'existence de la nébuleuse terroriste de la Salafiya Jihadia. Rien que ça ! Le Mouvement Unicité et Réforme (MUR) a tenu, hier mercredi 18 mai, dans un article publié dans sans quotidien Attajdid et signé par son vice-président, Mohamed Yatim, à "apporter des précisions" sur le communiqué que le Bureau exécutif de ce mouvement avait rendu public, le lundi 16 mai, concernant les détenus de la Salafiya Jihadia. Dans son article, M. Yatim, qui est aussi député à la Chambre des représentants pour le Parti de la Justice et du Développement (PJD), a essayé de recadrer les prises de position affichées par ledit communiqué du MUR. Il est à rappeler que le texte signé et approuvé par le Bureau exécutif du Mouvement fondé et dirigé de facto par Ahmed Raïssouni, avait lancé un appel aux membres de la Salafiya Jihadia détenus et condamnés dans le cadre de l'affaire des attentats terroristes qui ont frappé Casablanca pour qu'ils mettent fin à leur grève de la faim, et a demandé aux autorités de procéder à la révision des procès des Salafistes. Un appel qui, à première vue, semble être une initiative visant à pousser les détenus à mettre un terme à leur grève de la faim dans un geste purement humanitaire et non intéressé. Mais, le rédacteur du communiqué a tenu à y faire passer plusieurs messages à caractère grave dont l'accusation directe et explicite du pouvoir judiciaire marocain de partialité, l'accusation indirecte des services de sécurité marocains d'avoir inventé l'existence de la nébuleuse terroriste de la Salafiya Jihadia et l'incitation de l'opinion publique à douter de la véracité de l'origine islamiste des attentats terroristes du 16 mai. Ces différentes accusations sont d'une gravité énorme et tombent sous l'effet de la loi pénale. Aussi, les rédacteurs du texte devraient-ils être poursuivis par le ministère public et traduits devant la Justice afin de s'expliquer sur leurs affirmations infondées. Ce qui est tout à fait normal dans un Etat de droit. Or, après les membres du Bureau exécutif du MUR, censés avoir signé ledit communiqué -en fait, il a été rédigé par Ahmed Raïssouni et remis pour signature à l'actuel président- auraient manifesté leur mécontentement suite à cette prise de position adoptée en leur nom et à leur insu. C'est ce qui explique l'article de Mohamed Yatim publié par Attajdid, hier, et dont le but est de rectifier le tir. Mais, comme d'habitude, le vice-président du MUR a commencé son article par accuser la presse nationale d'avoir dévié le texte de son sens et d'en avoir déformé les propos. "Un journal francophone est allé très loin en appelant indirectement le gouvernement à poursuivre en justice le Bureau exécutif du Mouvement Unicité et Réforme car le communiqué qu'il a rendu public sur le sujet de la grève de ce que l'on appelle les Chioukhs de la Salafiya Jihadia accuse directement le pouvoir judiciaire de partialité et de violation des droits des détenus dans le cadre des événements du 16 mai", dit M. Yatim. Dans ce passage de l'article qu'il veut explicatif, le vice-président du MUR a réitéré sa position quant à l'existence de la nébuleuse terroriste de la Salafiya Jihadia puisqu'il se réfère aux détenus en parlant des Chioukhs de "ce que l'on appelle la Salafiya Jihadia". D'ailleurs cette expression qui jette le doute sur l'existence de cette organisation terroriste, on la retrouve dans tous les communiqués du Mouvement d'Ahmed Raïssouni ainsi que ceux du PJD. Ce qui suppose plusieurs interrogations. Le PJD, un parti politique légalement constitué et qui affirme agir dans le cadre de la loi et du système démocratique, accuse-t-il les services de sécurité et l'appareil judiciaire de l'Etat de conspiration ? Car, dire que la Salafiya Jihadia n'existe pas, signifie que quelqu'un l'a inventée dans un but précis. Or, être responsable politiquement, c'est assumer la responsabilité de ses dires et de ses positions. Ce qui signifie que prétendre que la Salafiya Jihadia n'existe pas devrait être argumenté et matériellement prouvé par ceux qui avancent cette thèse. Ce qui n'est pas le cas pour le PJD et le MUR qui se contentent à démentir l'existence de l'organisation salafiste sans argumenter leur thèse. "Le Mouvement réitère sa condamnation de tous les actes de violence et de terrorisme et sa dénonciation des attentats perpétrés le 16 mai 2003 et leur incrimination ainsi que tous les actes similaires partout dans le monde estimant qu'il s'agit d'actions égarées", indique M. Yatim dans son article avant de rajouter que "le communiqué rejette les dérapages qui ont marqué la gestion de ces événements dont les arrestations et les conditions de détention et des interrogatoires, les procès inéquitables qui se sont caractérisés par le manque de garanties juridiques". C'est en ces termes que le vice-président essaye de justifier devant l'opinion publique les allégations insidieuses du communiqué de son mouvement. Ainsi, le MUR donne lui-même la preuve du danger que constitue son discours. Car, accuser tout le système d'injustice et de violations des droits des détenus islamistes qu'il considère comme des "Musulmans innocents" est un discours qui s'approche de celui tenu par les takfiristes qui considèrent que l'Etat est impie et qu'il faut le combattre.