Le ministre de la Justice affirme avoir ouvert des négociations avec les détenus islamistes observant une grève de la faim. Il les appelle toutefois à épuiser toutes les voies de recours pour recouvrer leur liberté. ALM : Quelles sont les dernières informations concernant le décès de Khalid Boukri dans la prison d'Outita 2 ? Mohamed Bouzoubaâ : Selon les dernières informations dont je dispose, je peux vous dire que le défunt était malade. Il souffrait d'un problème au niveau de l'appareil digestif. A cet effet, il bénéficiait d'un suivi médical régulier par le médecin de la prison. Toujours selon les dernières informations dont je dispose, Khalid Boukri ne faisait pas partie des grévistes de la faim, à cause justement de sa maladie. La veille de sa mort, il a passé la nuit au sein de l'infirmerie de la prison. Quand son état de santé s'est gravement détérioré, il fut transporté en ambulance vers l'hôpital. Et c'est justement en route qu'il a rendu son dernier souffle. Qu'avez-vous entrepris, en tant que ministre de la Justice, pour tirer toute cette affaire au clair ? J'ai dépêché immédiatement une commission d'enquête sur place. Aussi, j'ai demandé qu'une autopsie soit effectuée en bonne et due forme. Elle a été effectuée par le professeur Saïd El Ouahlia. Et je tiens à publier entièrement les résultats de cette autopcie. D'un autre côté, j'ai tenu à ce que des dispositions efficaces soient prises pour sauvegarder la vie des grévistes. Ainsi, les équipes médicales au sein des prisons ont été renforcées. Des ambulances sont stationnées de manière permanente devant les prisons. Elles demeurent prêtes à tout moment pour transporter les grévistes dans un état critique vers les hôpitaux les plus proches. En outre, il y a une commission qui effectue une tournée dans l'ensemble des prisons pour dialoguer avec les grévistes. Mercredi, cette commission s'est rendue à Kénitra, après avoir visité Outita 2, Salé et Casablanca. Comment faire pour stopper cette grève de la faim ? Je pense que le dialogue est la meilleure solution. Nous sommes d'ailleurs en contact régulier avec les grévistes. Ils considèrent que c'est une grève pour attirer l'attention de l'opinion publique nationale et internationale. Lors de nos rencontres avec eux, du moins avec les détenus de la prison de Salé, ils revendiquent une seule chose: la libération et la présentation d'excuses. Que répondez-vous à cette exigence ? Notre réponse est claire. Le ministère de la Justice est prêt à épuiser toutes les voies de recours existantes. Nous rappelons aux détenus qu'ils ont la possibilité de demander la grâce royale, la libération conditionnelle ou même la révision du jugement. Sur ce dernier point, la révision est envisageable dans le cadre juridique et légal, et il n'y a pas de raison pour qu'ils n'en bénéficient pas. Mais certains détenus, notamment les Chyoukhs, refusent de demander la grâce sous prétexte que cela reviendrait à reconnaître les griefs retenus contre eux. Qu'en pensez-vous ? Effectivement, lors de nos rencontres avec certains détenus, on nous a dit cela. Mais, pour ma part, je leur dis que la demande de la grâce est un droit dont bénéficie tous les détenus. C'est la même chose pour le recours en appel ou la demande d'une libération conditionnelle. Ce n'est absolument pas une reconnaissance. Quelles sont les conditions de détention des détenus islamistes? En somme, nous ne cessons de répéter aux détenus, dans le cadre de la loi antiterroriste, qu'ils ne font l'objet d'aucune injustice. Pour ce qui est de la grâce, tout d'abord, le Souverain en a octroyé 44 à l'occasion de la circoncision du Prince héritier. Et d'autres dossiers sont en cours d'examen par la commission des grâces. Pour ce qui est des conditions de détention, c'est la même chose. Les prisons respectent tous les droits de ces détenus. A ce titre, je tiens à affirmer que cette grève de la faim est un acte politique, extrêmement bien coordonné, surtout à quelques jours de la commémoration des attentats du 16 mai. Abou Hafs et Hassan Kettani ont été délogés de la prison centrale de Kénitra. Pourquoi ? En effet, cette mesure interne intervient dans le cadre du rapprochement des détenus de leurs familles. Parmi les recommandations faites par la délégation du CCDH qui a visité les prisons marocaines, il y a quelques mois, figure cette demande de rapprocher les prisonniers du lieu de résidence de leurs familles. C'est ainsi qu'Abou Hafs a été transféré vers Fès et Hassan Kettani vers Salé. Je tiens à préciser que cette mesure ne concerne pas uniquement ces deux hommes.