Le CNDH appelle à l'abolition de l'article 20 du code de la famille Le mariage des mineures est encore largement répandu dans notre société. Selon les statistiques annoncées, vendredi 22 mars, par le ministre de la justice, Mohamed Aujjar, 25.514 actes ont été recensés en 2018, soit 9% du nombre total de mariages conclus durant l'année. Le phénomène a reculé par rapport à l'année 2011 où 39.031 actes avaient été notifiés, soit 12% du total des actes de mariage établis au cours de la même année. Lors d'une rencontre nationale sur le mariage des mineures organisée par le Comité national des droits de l'Homme (CNDH) et le Conseil de l'Europe, le ministre a fait remarquer qu'en dépit des efforts menés par son département, les institutions nationales, les magistrats et la société civile pour lutter contre ce phénomène, le nombre de mariages précoces demeure encore élevé. Pour mettre fin à cette pratique, la présidente du CNDH, Amina Bouayach, a appelé à une révision du code de la famille en supprimant les dispositions juridiques autorisant le mariage des mineures. Pour sa part, le ministre a souligné que la révision de l'article 20 du Code de la famille ainsi que son article 16 relatif à la régularisation du mariage coutumier doivent faire l'objet d'un débat national. Il faut rappeler à ce sujet que le code de la famille fixe à 18 ans révolus l'âge légal du mariage, sauf dans des cas exceptionnels soumis à l'appréciation du juge. Ainsi, l'article 19 stipule que «l'aptitude au mariage s'acquiert pour l'homme et pour la femme jouissant de leurs facultés mentales, à 18 ans grégoriens révolus». Toutefois, une dispense d'âge est prévue par l'article 20. Cet article précise que «le juge de la famille chargé du mariage peut autoriser le mariage du garçon et de la fille avant l'âge de la capacité prévu, à savoir 18 ans, par décision motivée précisant l'intérêt et les motifs justifiant ce mariage, après avoir entendu les parents du mineur ou son représentant légal, et après avoir eu recours à une expertise médicale ou procédé à une enquête sociale». Cette rencontre s'inscrit dans le cadre d'une campagne nationale sur le mariage des mineures, lancée le 6 mars 2019 par le CNDH à travers ses commissions régionales. Cette campagne a ainsi pour finalité d'élaborer un mémorandum sur le mariage des mineures et de lancer la mobilisation de tous les acteurs autour de ce phénomène préoccupant. Plusieurs associations telles que l'association Droit et Justice revendiquent des sanctions, à savoir de lourdes amendes et des peines d'emprisonnement, à l'encontre de toute personne qui se permet d'autoriser ces mariages. La situation est d'autant plus alarmante que des juges continuent de donner des autorisations de mariage sans se soucier des conséquences de tels actes. Ces mariages entraînent souvent des violences et abus sexuels de la part du mari, et des relations sexuelles sont souvent forcées. Les mineures se retrouvent pour la plupart avec des enfants à un âge très précoce et doivent abandonner l'école. Rappelons que le 29 mars 2018, le procureur général du Roi près la Cour de cassation, président du ministère public, Mohammed Abdennabaoui, avait adressé une circulaire à l'attention des avocats, des procureurs généraux du Roi et des magistrats du ministère public, les appelant «à ne pas hésiter à s'opposer à toute demande de mariage ne tenant pas compte des intérêts du mineur». Ladite circulaire considère le mariage des mineurs comme une violation des droits de l'enfant. Dans sa circulaire, le président du parquet cite pour référence l'article 32 de la Constitution et les articles 3 et 54 du code de la famille, tout en mentionnant les engagements pris par le Maroc dans le cadre des conventions internationales. Le chef du parquet avait également exigé qu'il lui soit soumis tous les trois mois des rapports comportant les statistiques des demandes de mariage des mineurs et des remarques et autres difficultés qui se posent dans ce domaine.