Les négociations entre le Maroc et les Etats-Unis, en perspective d'un accord de libre-échange, ont démarré hier à Washington sur un fond de polémique. La guerre des déclarations entre Washington et l'Union Européenne est désormais lancée. Le torchon brûle entre les Etats-Unis et l'Union Européenne. La perspective de signature d'un accord de libre-échange entre le Maroc et les USA, dont les négociations ont été entamées hier mardi à Washington continue de susciter de vives réactions. Même si elle n'est pas encore déclarée, la guerre entre le vieux continent et le nouveau monde est à sa phase de déclarations. Cette fois, du côté américain. Réagissant aux propos tenus par le ministre délégué français au Commerce extérieur, François Loos, qui déconseillait «le Maroc de négocier un accord de libre-échange avec les Etats-Unis», le représentant des Etats-Unis pour le Commerce extérieur, Robert Zoellick, n'a pas mâché ses mots. «Il s'agit d'une vue européenne archaïque, remontant à l'ère du colonialisme et du mercantilisme…Je n'ai jamais tenu de propos de telle portée lorsque l'Europe est allée négocier avec l'Amérique latine ou d'autres régions», a déclaré, le 15 janvier dernier, le responsable américain lors du deuxième Forum de coopération économique et commerciale Etats-Unis/Afrique subsaharienne (AGOA). Lors d'une conférence de presse tenue à la fin de son séjour de deux jours au Maroc, M. Loos avait déclaré qu'il « y avait une contradiction possible dans l'approche marocaine, déclarant haut et fort à ses interlocuteurs marocains : «vous ne pouvez pas affirmer souhaiter un rapprochement avec l'UE et en même temps signer un accord de libre-échange avec les Etats-Unis. Ce serait un choix politique vide de tout fondement économique. Ce serait peut-être une perte de temps …il faut choisi r». Des déclarations pour le moins osées, en parfaite contradiction avec l'esprit et le contenu des accords de l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce), et dont la morale est que l'Union a bel et bien le droit de conclure de tels accords avec l'Afrique. Mais pas les Etats-Unis. «Il faudrait, entre autres actions, que le monde en développement adresse un message à des pays comme la France disant : l'époque coloniale est terminée. Nous aimerions être libre de vendre nos produits». Au-delà de ces déclarations où chaque partie essaye de tirer la couverture de son côté, une question commence déjà à faire parler d'elle : l'agriculture. Tout en se disant en accord avec les tentatives européennes d'arriver à une politique agricole commune, M. Zoellick a fait remarquer que certains pays européens vont les bloquer. L'allusion est faite à l'égard des dernières déclarations d'Hervé Gaymard, le ministre français de l'Agriculture, défendant les subventions agricoles. Pour lui, les Américains sont disposés à réduire leurs subventions. Avec une condition, que les Européens réduisent les leurs, qui sont trois ou quatre fois supérieurs. Il est à noter que les subventions européennes dont bénéficient certains pays membres constituent une des majeures entraves du bon déroulement des négociations en cours entre le Maroc et l'UE. Que l'Europe décide de les revoir à la baisse revient à dire que le produit agricole marocain aura sa marge de manœuvre et de commercialisation sur le marché européen. La diversification des partenaires économiques marocains pourrait contribuer à accélérer une telle décision. Un point, parmi tant d'autres, où cette diversification pourrait profiter au Maroc. « Mais, c'est à nous de défendre nos intérêts et être à la hauteur de ces interlocuteurs. Le plus important, et j'insiste la-dessus, est de savoir à qui on a affaire… », nous avait déclaré Rachid Slimi, directeur exécutif chargé du développement au sein de l'université Al Akhawayn. La guerre économique que mène le Maroc est décidément tout, sauf verbale.