Casablanca. Les faux mendiants opèrent partout. Ils se livrent à de véritables harcèlements des passants, barrant la route aux vrais pauvres. Le phénomène prend de plus en plus d'ampleur. Il est temps de combattre ce fléau qui ternit l'image de notre société. La mendicité. Un mal social. Et chaque région à ses mendiants que les différentes composantes de la société tentent, tant bien que mal, d'aider à se réintégrer, d'une façon ou d'une autre, au sein de la famille ou des institutions étatiques. Cependant, force est de constater que le phénomène est en voie de devenir une profession, notamment dans les grandes villes. Casablanca, la capitale économique du pays en est un exemple illustratif. Certains ruraux y débarquent, louent une chambre dans un quartier populaire dans la périphérie et se livre à l'harcèlement. Dans les principaux boulevards de la métropole, devant les boulangeries, dans les parages des mosquées, surtout le vendredi, il n'est plus question d'une personne démunie qui sollicite l'aide des autres pour lutter contre la pauvreté dans laquelle elle se débat, difficilement en vue de subvenir à ses besoins ainsi qu'à ceux de sa famille. Mais, il s'agit des professionnels qui feignent l'indigence, sous toute ses formes, se présentant comme des personnes accablées par la pauvreté. Ces personnes tendent la main, non pas pour vivre mais pour mieux vivre. Ces faux mendiants opèrent partout, dans la rue, devant les boutiques, dans les stations de taxi ou d'autobus, dans les parkings, devant les stations de distributions d'hydro-carbures, aux carrefours autour des voitures dès que le feu rouge change de couleur, sur les trottoirs, etc. Ils se livrent à de véritables harcèlements des passants, guettant le moment où le client met sa main dans la poche. Le fléau touche tous les âges et toutes les catégories de la société, hors de besoin, vieilles personnes, adolescents, enfants, handicapés et bien portants, citadins et ruraux. Tous les prétextes sont bons pour arracher quelques sous. Sur le boulevard Mohammed V, au centre ville, une vieille femme portant des habits de deuil, comme quoi elle vient de perdre son époux. Dans les cafés, une jeune fille distribue sur les clients des bouts de papiers dont le texte, pathétique, dit qu'elle prend en charge ses frères après la mort de ses parents dans un accident de la circulation. A la gare routière de Ouled Ziane un jeune adolescent cherche toujours l'argent de transport pour rejoindre sa famille à Sebt Gzoula, en prétendant être délesté de son portefeuille par des malfrats. Dans les quartiers populaires une femme âgée qui sonne tôt le matin pour expliquer aux ménagères que son mari vient de la renvoyer dans la rue et qu'elle cherche uniquement les frais de transport pour regagner son patelin. Au centre ville, une vieille femme a élu domicile au passage Tazi, avec deux petits-enfants, apparemment loués, portant des habits déchirés pour attirer l'attention des passants, etc. Et chaque occasion religieuse est mise à profit en vue d'obtenir la pitié des autres. Ces faux mendiants ont barré la route aux vrais pauvres. Le soir, ils échangent les pièces de monnaie par des billets de banque chez les propriétaires des épiceries et des bureaux de tabac. Ces commerçants les connaissent très bien et savent combien leur rapporte la journée et quels sont les jours les plus fructueux de la semaine. Les âmes charitables ne savent plus maintenant qui est dans le besoin et qui cherche à les induire en erreur par des histoires pathétiques. Les vrais pauvres sont souvent oubliés. Quant aux faux démunis, ils ne doivent pas être tolérés sur le clavier de la société. Notre société est basée sur la dignité, source de toutes les vertus, et sur le labeur, base des valeurs humaines et sociales. Si le combat contre la pauvreté par le développement socioéconomique est déclenché, il est temps de combattre également ceux, hors de besoin, qui ont plaqué leur dignité et leur honneur contre la main tendue, le sacrifice de l'éducation des enfants et l'éclatement de la famille.