Traquée des deux côtés des Pyrénées et privée de son bras politique Batasuna, l'organisation séparatiste basque a annoncé jeudi qu'elle continuerait de «combattre» la «dictature» de Madrid. Une nouvelle phase pour l'indépendance du Pays basque semblait être lancée ce jeudi par ETA, l'organisation séparatiste armée, qui entendait répondre aux récentes arrestations de ses militants en France comme en Espagne. «L'agression fasciste de l'Etat espagnol est une étape importante et violente qui ouvre une nouvelle ère. En Espagne, il existe une dictature, monarchique et parlementaire peut-être, mais une dictature», a accusé ETA dans un communiqué paru dans le journal régional Gara. L'organisation avait d'ailleurs annoncé les prémices de cette «nouvelle ère» en début de semaine avec deux premiers attentats, l'un – manqué - à Bilbao, et l'autre en Navarre. Mardi, un garde civil avait été tué et quatre autres blessés dans l'explosion d'un panneau au logo d'ETA piégé près de Leiza. «Il est très clair que les auteurs de cet attentat sont d'ETA», avait alors déclaré le préfet du Pays Basque Enrique Villar tandis que le roi espagnol condamnait cette «attaque cruelle et insensée». «Ces vermines n'ont pas assez avec l'odeur de leur propre sang qu'il ont eu hier avec la mort de deux des leurs. Cela aurait dû les faire réfléchir» avait encore ajouté le préfet Villar, allusion faite aux deux militants tués lundi soir à Bilbao. L'explosion s'était produite accidentellement dans le véhicule où se trouvaient les deux hommes qui «s'apprêtaient à commettre un attentat» selon la police. Ces deux attaques étaient intervenues plus d'un mois après le dernier attentat attribué à ETA, lorsque l'explosion d'une voiture piégée à Santa Pola (Alicante, sud-est) avait provoqué la mort d'un passant et d'une fillette de six ans le 4 août. Entre temps, le gouvernement espagnol a multiplié les mesures pour bâillonner le parti radical Batasuna (ex-Herri Batasuna), considéré par la justice comme le bras politique de l'organisation armée. Le 26 août, le juge Garzon a suspendu pour trois ans les activités de la formation et ordonné la fermeture de ses bureaux. Le Congrès a emboîté le pas en votant en faveur d'une mise hors la loi de Batasuna pour avoir refusé de condamner les attentats imputés à ETA. Un processus politico-judiciaire qui devrait à terme aboutir à l'interdiction du parti, réclamée par José Maria Aznar. «Ils ont placé la terre basque sous le joug de la dictature quand les forces armées espagnoles ont fermé le siège national de Batasuna le 26 août, en faisant usage de la force», a ainsi répondu ETA dans son communiqué de jeudi. Madrid a par ailleurs insisté pour que Paris intensifie la traque des séparatistes sur son territoire, et pas seulement au Pays basque français. L'Espagne a aussi multiplié ses efforts pour obtenir l'extradition des militants arrêtés par son voisin. La cour d'appel d'Agen (sud-ouest) a d'ailleurs émis mercredi un avis favorable concernant la demande d'extradition d'Eneko Aizpuru Giraldo, 21 ans, membre de l'Organisation de la jeunesse radicale basque SEGI, soupçonné de violences urbaines et interpellé mi-avril à Bayonne (Pyrénées-Atlantiques). SEGI et Askatasuna, association de soutien aux prisonniers politiques basques, ont été récemment déclarées «illégales» par le juge Garzon. Deux membres d'ETA, ont quant à eux été mis en examen puis écroués mardi à Paris. Oscar Celarain Ortiz et Andoni Ortegi, tous deux de nationalité espagnole, sont accusés par le ministère de l'intérieur espagnol d'avoir constitué une unité commando s'apprêtant à frapper dans la province de Guipuzcoa (nord). Ces deux mises en examen faisaient suite à celles de vendredi dernier à Paris du chef présumé des commandos militaires d'ETA, Juan Antonio Olarra Guridi, alias «Oskarbi», et de sa compagne espagnole, ainsi que de deux Français accusés de leur avoir fourni un soutien logistique.