Au lendemain de l'attentat qui a tué 27 civils samedi dans la région cachemirie qu'elle contrôle, l'Inde a accusé le Pakistan d'être derrière l'attaque «terroriste». Une nouvelle escalade en perspective. «Il est évident que (cet attentat) a été inspiré par le Pakistan», a affirmé dimanche le ministre indien des Affaires étrangères Yashwant Sinha sur une chaîne de télévision nationale. Cette réaction aussi directe qu'attendue est-elle l'amorce d'une nouvelle crise ouverte entre les deux voisins asiatiques ? Le Pakistan a eu beau condamner l'attentat et affirmer qu'il s'agissait d'un acte « terroriste » destiné à accroître les tensions dans la région, la réaction indienne était à prévoir. Peu de temps après l'attaque, les autorités locales de Jammu, la capitale d'hiver du Cachemire indien, avaient déjà accusé un groupe islamiste basé au Pakistan d'être responsable de ces violences, et, depuis New Delhi, le Premier ministre indien Atal Behari Vajpayee avait aussitôt convoqué pour le lendemain une réunion d'urgence pour examiner la situation. Il faut dire que cette attaque est la troisième du genre après celles du Parlement indien de New Delhi, le 13 décembre 2001 (14 morts), et d'une caserne de soldats indiens, le 14 mai dernier (32 soldats et membres de leurs familles tués) près de Jammu. Ces attentats avaient précipité l'Inde et le Pakistan au bord d'une nouvelle guerre, la première accusant son voisin d'aider la rébellion séparatiste musulmane dans sa zone. Samedi soir, trois à cinq militants islamistes déguisés en prêtres hindous, selon la police et des témoins, ont cette fois-ci fait irruption dans un quartier populaire de la périphérie de Jammu. Ils ont lancé des grenades, puis ouvert le feu aveuglément à la Kalachnikov sur les civils, avant de recommencer dans deux petits temples hindous situés un peu plus loin. Le dernier bilan de cette tuerie s'élevait dimanche à 27 morts - dont treize femmes et un enfant de trois ans - et de 35 blessés, dont neuf dans un état critique. Les soupçons de la police s'étant portés sur le groupe islamiste Lashkar-e-Taiba, basé au Pakistan malgré son interdiction depuis janvier, la chasse à l'homme avait aussitôt été lancée pour tenter de retrouver les assaillants. Dimanche, le gouverneur du Cachemire indien, M. Saxena, a même décidé de renforcer les postes de police de la région et d'augmenter les effectifs des forces de l'ordre lancées à la poursuite des auteurs du massacre. Le chef du gouvernement cachemiri, Farooq Abdullah, a pour sa part déploré que «tant que les grandes puissances, Etats-Unis et autres, ne comprendront pas que la base du terrorisme se trouve au Pakistan, ce genre de violence continuera». Confortée par le nouveau contexte international né du 11 septembre, New-Delhi a pourtant fait de la lutte contre le terrorisme sa priorité. Un «terrorisme» qui sévit dans la région cachemirie qu'elle contrôle depuis les années 1990, et qu'elle incombe à des mouvements séparatistes soutenus par Islamabad. Depuis décembre dernier et l'attaque du Parlement indien, les relations entre les deux puissances nucléaires ont oscillé entre surenchères verbales, menaces réciproques, et finalement apaisement. Prêts en cas de guerre ouverte -un million de soldats ont été mobilisés le long de leur frontière commune-, aucun des deux voisins n'a toutefois osé franchir le pas. Même si, à chaque escalade, la provocation a toujours été de mise, à l'image de l'annonce faite dimanche par le Pakistan d'entamer mardi des manœuvres militaires afin de «tester l'état de préparation des troupes massées sur la frontière avec l'Inde»…