L'affectation sur la ligne Gênes-Casablanca d'un navire affrété par la Comanav auprès du transporteur MSC, provoque des remous dans les rangs des armateurs marocains. Ceux-ci crient à l'atteinte à la loi. Le secteur maritime marocain connaîtra un mois de septembre agité. Pour cause, l'introduction par la Compagnie nationale de navigation, la Comanav, d'un navire affrété à l'étranger sur Gênes-Casablanca. Une provocation aux yeux de certains opérateurs qui estiment que le navire en question, n'a pas le droit d'exercice sur une ligne réservée exclusivement aux navires marocains. «Les Européens protègent bien leurs eaux. Pourquoi pas nous? clame un opérateur persuadé que cet affrètement n'est qu'une façon de faire accéder la puissante MSC (300 navires dans le monde), dans le régulier marocain et, partant, de contourner la fameuse circulaire de 1999, laquelle vient à peine d'être modifiée (le 24 août dernier) pour plus de flexibilité. Les feeders qui n'avaient pas droit aux lignes régulières ont désormais droit jusqu'à 10%. Cette concession et surtout l'affrètement de la Comanav suscitent beaucoup de critiques chez les armateurs présents sur les lignes régulières reliant le Maroc à l'Europe. «Au lieu de défendre le pavillon national, déclare-t-on, la compagnie nationale interfère sur les lignes régulières !» Mais pour le secrétaire général de la Marine Marchande, Azzedine Diouri, la loi n'a pas été bafouée. Au contraire, il ne s'agit ni plus ni moins que de l'application du jeu de la libre-concurrence qui se met en place. «Tout comme leurs homologues étrangers, les armateurs marocains ont le droit d'affréter des navires, de rentrer ou sortir des alliances». Une allusion sans doute à l'une des dernières actualité en date dans le secteur. En effet, depuis le 31 août 2004, la Comanav est sortie de l'alliance qui la liait à la société marocaine IMTC et à l'italienne Navimed. Un accord en vigueur depuis le premier septembre 2003 et qui ne faisait plus l'affaire de la Comanav, explique-t-on dans les parages de la Direction. « Nous n'avons fait rien de plus que d'introduire une dose de concurrence dans le Commerce extérieur marocain», tente-t-on d'expliquer au siège de la compagnie nationale. En principe, ce service qui démarre à partir du 6 septembre permettra aux opérateurs économiques de disposer de plus de choix, quant aux dates de départ, aux prix différents et aux services. Ce que le même cadre de la Comanav explique doctement par «la volonté de sortir des logiques de protectionnisme qui ne sont pas les nôtres». De l'autre côté, on rétorque sur le même ton. «La note 18-01-1999 est claire, s'insurge-t-on à l'IMTC. Le transbordement est réservé aux navires battant pavillon marocain». Un argument peut-être vrai sur le plan théorique, mais à en croire certains opérateurs, qui ne tient pas sur le terrain. Car, beaucoup d'opérateurs seraient en porte-à-faux avec cette circulaire. Des sociétés font recours à des bateaux étrangers sur les lignes en question!» Bref, la Comanav dit être sur une autre dynamique. Après les énormes difficultés qu'elle a traversées, la compagnie nationale envisage désormais de passer à une autre étape. Par exemple, acheter des navires à son compte. En achetant des navires, elle ferait du coup taire les critiques qui lui reprochent une tendance affichée pour l'affrètement. D'autant que le contrat-programme prévoyait l'achat de deux navires à la fin 2003. Le retard serait dû à plusieurs facteurs, argue-t-on. «En deux ans, les prix du navire ont quasiment doublé, les prix du soute en ont fait de même. Nous n'étions plus dans la même équation que le contrat-programme». En attendant, l'affrètement bat son plein.