Le drame de Noubir Amaoui c'est qu'il s'est trompé sur sa stature politique. Le leader de la CDT l'a appris à ses dépens dès qu'il a quitté, sur un coup de tête, son parti d'hier, l'USFP, lors de son 6ème congrès à Casablanca. Depuis que Noubir Amaoui a fait de la surenchère syndicale son terrain de chasse. En embuscade, le sniper Amaoui rêve de paralyser le pays et de toucher au cœur le gouvernement, à quelques semaines des élections, par des mots d'ordre de grève à répétition. Sans résultat. Les deux grèves générales lancées à l'initiative de son syndicat la CDT, le 4 et 28 juin pour pousser l'exécutif à “satisfaire les revendications de la classe ouvrière“, auront été un grand flop dans la grisaille ambiante. Aucun impact perceptible sur le fonctionnement des pans de l'économie. Les travailleurs sont partis travailler. En appelant à un débrayage national par deux fois, Amaoui voulait peut-être connaître le véritable poids de sa centrale ? Maintenant, il est édifié. Pas suivie par les autres syndicats notamment l'UMT et l'UGTM, la CDT n'a pas visiblement les moyens des ambitions démesurées de son chef. Les observateurs ne sont guère dupes sur le sens profond de l'agitation amaouiste nourrie à leurs yeux moins d'une militance syndicale sincère que de ses états d'âme de personnage dépité. En ligne de mire de la muleta sociale qu'il agite, Abderrahamne Youssoufi et l'USFP. Faire monter la fièvre contestataire pour atteindre ses amis d'hier et en même temps se positionner en véritable défenseur de la classe laborieuse. Depuis qu'il s'est fait larguer lui-même de l'USFP lors de son sixième congrès, fin mars 2000 à Casablanca, et les tribulations qui s'en suivirent, Noubir Amaoui a du mal à exister. Politiquement s'entend. Il n'a pas attendu longtemps pour s'en rendre compte. Pour réaliser que l'importance qu'il pensait avoir dans le paysage à la marocaine, il la puisait dans son appartenance au parti de Abderrahmane Youssoufi et non pas de ce qu'il incarnait lui-même. Du coup , le leader de la CDT découvre les trahisons, les retournements de veste et la fumisterie de l'encensoir qu'on agitait autour de lui des années durant. L'effet baudruche était dans l'ordre des choses. Isolé après avoir été sollicité, pris à son propre jeu d'homme impulsif, il ne trouve à ses côtés qu'un seul fidèle, Abdelmajid Bouzoubaâ. Tous les autres se sont égaillés dans la nature. Il fait monter son ami en première ligne comme chef du parti du congrès national ittihadi (CNI). Et lui reste en retrait. Un parti pour rebondir et dont il rêve de faire un moyen pour jouer dans la cour des excès. Quand le soldat Amaoui monte au front syndical, il fait en même temps campagne pour sa nouvelle structure partisane. La CDT et le CNI, deux faces d'une même médaille. C'est à la lumière de tout cela qu'il convient de lire la psychologie actuelle du personnage pour capter ce qui le fait courir réellement. “ Par son comportement schizophrénique, Amaoui est en train de détruire la CDT ou ce qui en reste“, explique un de ses ex-compagnons. “ Amaoui est toujours téléguidé par ses anciens mentors, ceux qui savent le manipuler“, renchérit un député USFP. Pour n'avoir pas su s'adapter aux bouleversements qui se dessinent sous le Maroc nouveau, la CDT a t-elle atteint sa date de péremption ? Pendant que Noubir Amaoui rue dans les brancards, les usines ferment, les patrons se braquent et le climat social se détériore. Une chose est sûre : les solutions des problèmes sociaux du pays ne se trouvent pas dans la boîte à outil de la CDT et encore moins dans l'état d'esprit actuel de son patron.