En revenant des travaux des champs, Aîcha et Nadia sont attaquées par un clochard, qui les conduit chez lui sous la menace d'un couteau et les viole toutes les deux. Huit ans de réclusion. Mardi 9 avril 2002. dans l'après-midi. La Chambre Criminelle près la Cour d'Appel d'El Jadida. Au box des accusés, Hafid ne manifeste aucun signe d'inquiétude. A vingt-six ans, c'est un habitué des salles d'audiences, des box des accusés, des magistrats, des avocats, des geôles…C'est un monde qui lui est familier… Il clame son innocence devant Aïcha et Nadia, qui l'accusent de les avoir violées sous la menace d'un couteau. «…Je n'ai contraint personne sous la menace de couteau de faire l'amour avec moi…Elles sont entrées chez moi de leur plein gré…Mais Aïcha ne m'a pas plu et j'ai demandé à Nadia de faire l'amour avec moi et elle a accepté pour cinquante dirhams…», déclare-t-il devant la Cour. Aicha, trente-deux ans, mariée, mère de quatre enfants et Nadia, vingt-sept ans, divorcée, mère d'un enfant, se tiennent près de Hafid, les yeux hagards, échangeant des regards, ne sachant quoi dire. Aïcha, perturbée, tourne la tête derrière, cherche son mari, comme si elle voulait lui dire : «Attention ! …il ne dit que des mensonges !». Elle n'arrive pas à le voir. Le président lui demande de ne plus tourner la tête. «Il faut respecter la Cour…». «Mais, Monsieur le président, il dit n'importe quoi…Il m'accuse de prostitution…alors que je suis une femme mariée, mère de quatre enfants…», se défend-elle en sanglotant tellement qu'elle ne peut plus continuer ses déclarations. Le président lui demande de cesser de pleurer, de reprendre ses déclarations, et que la justice rendra à César ce qui est à César. «Nous avons quitté les champs qui se situent à Beni H'lal, à destination de chez nous, moi et ma voisine Nadia…“ reprend-elle. Il était 18h00, en ce samedi 6 avril, lorsqu'elles sont arrivées près d'une maison, à hauteur du cimetière de Sidi Bennour. Elles parlaient de tout et de rien, des petits problèmes de la vie, des enfants… «Attention !…Attention ! Aïcha…Au secours»…, crie soudain Nadia, tentant de s'enfuir. Mais Hafid ne leur laisse pas la moindre chance de s'enfuir, ni même de bouger. Il est brusquement sorti de son domicile, un couteau à la main.»…Stop, filles de p… !», les menace-t-il. Nadia et Aïcha se figent, ne peuvent crier, tremblent de peur. Hafid met le couteau au niveau des côtes gauches de Aïcha, saisit violemment les cheveux de Nadia, et conduit les deux femmes terrifiées vers son domicile. «Je tuerai celle qui criera…Vous avez compris ?». Elles obtempèrent. «déshabillez-vous ! ». Lui aussi se dénude. Ils restent tous nus. Les deux Eves n'osent pas lever leurs yeux. Hafid tire Nadia, lui demande de s'allonger. Il lui met le couteau sur le cou, s'adresse à Aïcha : « …Tu regardes ce que je lui fais et si tu réagis, je la tuer…attention je ne rigole pas… ». Il abuse de Nadia, une fois, deux fois, comme un animal, un monstre… Viens, toi…» s'adresse-t-il à Aïcha. Elle s'approche de lui. Il lui met son couteau sous la gorge, la viole. Les larmes coulent en cascade de ses yeux sans qu'elle ose ouvrir la bouche. Nadia regarde, sanglote… «Viens, toi», s'adresse-t-il à Aïcha. Elle s'approche. Il lui demande des choses contre-nature. Elle cède. Une fois fini, il tire Nadia vers l'autre chambre, lui demande, elle aussi, la même chose. Elle refuse. Il prend alors une petite barre en fer, et lui torture les parties intimes. Le sang coule. Nadia crie, hurle, crie au secours. Aïcha entre très vite et remarque le couteau près de lui. Elle s'élance, s'en saisit et le jette par la fenêtre. Elles commencent à le frapper de leurs mains. Ivre, il perd l'équilibre, tombe par terre, tente de résister. Mais c'est trop tard, car leurs forces sont décuplées. Hurlant, elles le frappent au point qu'il perd connaissance. Elles se rhabillent, sortent de la maison, courent vers le poste de la Gendarmerie Royale, déposent plainte. Aussitôt, des gendarmes se dépêchent sur les lieux, mettent la main sur Hafid, le conduisent au poste. «Je suis un enfant du divorce…Né à Casablanca, j'y ai passé seize ans chez mon père…puis, j'ai rejoint ma mère à Sidi Bennour…». C'est là qu'il a appris le vagabondage. Il retourne de temps à autre chez sa mère pour regagner le monde de la rue et des prisons par la suite. Mais, devant la Cour, il n'hésite une seconde de clamer son innocence, accusant les deux femmes de prostitution. La Cour n'est pas convaincue et le condamne, mardi 9 avril, à huit ans de réclusion.