Marc Ravalomanana a finalement été déclaré lundi vainqueur officiel de l'élection présidentielle malgache. Une décision de la Haute Cour aussitôt dénoncée par son rival Ratsiraka et ses partisans. Plus de quatre mois après les résultats controversés du premier tour de l'élection présidentielle malgache, le recompte des voix effectué par la Haute Cour Constitutionnelle, a conclu ce lundi à la victoire de Marc Ravalomanana. Elu avec 51,46 % des suffrages exprimés contre 35,90 % pour le président sortant Didier Ratsiraka, le nouveau chef d'Etat s'est aussitôt déclaré «très ému». Si l'un ne cachait pas son émotion après des semaines de protestation, l'autre avait déjà annoncé dimanche qu'il ne reconnaîtrait pas l'éventuelle victoire de son adversaire. De retour d'un séjour en France, Didier Ratsiraka avait prévenu que dans un tel contexte, il appellerait à la tenue d'un référendum. «Je ne reconnais pas cette HCC, c'est la HCC invalidée que je reconnais», avait-il déclaré à son arrivée à l'aéroport de Toamasina, son fief de la côte Est. Et ce malgré la réconciliation de Dakar qui avait mis d'accord, le 18 avril dernier, les deux protagonistes sur un recompte des voix et les recours en cas d'impasse. Ce lundi, le gouverneur d'Antsiranana (Nord), Jean-Robert Gara, considéré comme un des plus durs partisans de Didier Ratsiraka, a pour sa part annoncé qu'il allait «déclarer l'indépendance» de sa province. Une initiative qui risque de se propager aux autres régions de l'île, cinq provinces étant favorables au président sortant. Le gouverneur de Toliara (sud-ouest) avait d'ailleurs déjà menacé la semaine dernière de proclamer lui aussi son indépendance. Ce même jour, une autre menace se développait dans le pays avec le maintien des barrages par les partisans de Ratsiraka, des blocus routiers qui isolent la capitale malgache et empêchent toute activité économique. Le gouverneur de la province de Mahajanga (Nord-Ouest), Etienne Razafindehibe, craignait aussi «des manifestations de violence». «J'apréhende un durcissement des positions des provinces fidèles à M. Ratsiraka, et je m'attends dans l'après-midi ou dans la nuit à des manifestations de violence», a-t-il déclaré. Prévu pour créer le consensus sur l'île, le recompte des voix risque donc bel et bien de mener Madagascar à une nouvelle flambée de violences et d'affrontements qui ont déjà fait près d'une vingtaine de morts ces dernières semaines. Si les uns ont été séduits par Marc Ravalomanana, cet ancien laitier devenu industriel puis homme politique qui méprise la grande bourgeoisie, d'autres dénoncent sa démagogie et la vacuité de sa profession de foi politique. Patron du premier groupe agro-alimentaire malgache, le nouveau chef d'Etat est en effet entré en politique en novembre 1999, sur un «oup de tête». Elu à la mairie d'Antananarivo sans étiquette politique ou idéologie, amateur de poker, il aime avancer par coups de bluff, disent ses proches. Protestant très pratiquant, il est devenu vice-président de l'Eglise de Jésus Christ et a gagné le soutien de toutes les églises chrétiennes du pays, y compris catholique. Des méthodes qui occultent cependant des pratiques plus sombres qui lui ont d'ailleurs récemment valu un redressement fiscal de 51,5 millions d'euros. Après l'expulsion sans ménagement d'un millier de mal logés… Ceux-là mêmes qui lui ont apporté leur soutien.