Le gouvernement Benkirane est dans une mauvaise impasse. Deux des centrales syndicales les plus représentatives décident de rompre le contact avec l'Exécutif. «Nous considérons l'année 2012 comme une année blanche concernant le dialogue social», lance d'emblée le secrétaire général de la FDT (Fédération démocratique du travail), Abderrahmane Azzouzi. Après l'organisation d'une marche qui a réuni des milliers de personnes à Casablanca dimanche dernier, la FDT et la CDT (Confédération démocratique du travail) ne comptent pas s'arrêter en si bon chemin. Les deux syndicats ont décidé de boycotter les réunions du dialogue social en attendant l'application complète de l'accord du 26 avril 2011. Cette décision intervient après la réception d'une invitation de la part du ministère délégué chargé de la fonction publique et de la modernisation de l'administration pour entamer cette semaine les réunions des six commissions créées dans le cadre du dialogue social. «Une commission mixte formée par la CDT et la FDT s'est réunie lundi matin. Elle a décidé de ne pas participer aux travaux des commissions thématiques. Nous avons dans ce sens demandé au ministère de tutelle de retarder la tenue de ces réunions en attendant l'application de l'accord de 2011 dans son intégralité», souligne M. Azzouzi. Pour ce dernier, plusieurs clauses contenues dans l'accord ne devraient pas coûter de l'argent aux caisses de l'Etat. Et pourtant, leur concrétisation tarde toujours. «L'adoption de la convention internationale sur les libertés syndicales, l'abrogation de l'article 288 du code pénal, l'unification du SIMG et du SMAG (salaire minimum dans le secteur agricole), le volet d'avancement et de promotion dans la fonction publique, l'institution d'une indemnité de perte d'emploi, la révision des grilles des salaires, sont autant d'engagements qui n'ont pas été honorés», déclare ce responsable syndical. Ce n'est pas tout. Les deux syndicats demandent que la commission du secteur privé se fasse dans le cadre d'un dialogue tripartite associant les centrales, le gouvernement et le patronat. Après cette décision, les réunions programmées par le gouvernement seront-elles maintenues? En tout cas, des sources affirment que les premières réunions des commissions créées devraient être consacrées à l'étude du statut général de la fonction publique ainsi que l'accord du 26 avril 2011. Si ces réunions ne sont pas tenues, c'est tout le dialogue social qui sera probablement paralysé. D'autant plus que les syndicalistes semblent être mécontents des résultats de leurs réunions avec le ministre de l'emploi et de la formation professionnelle. «Non seulement le ministère a attendu jusqu'à l'appel à la marche pour se réunir avec les syndicats mais il nous a demandé de rediscuter à nouveau de l'accord d'avril 2011», poursuit le secrétaire général de la FDT. Le gouvernement doit, par ailleurs, tenter de convaincre la CDT mais également l'UMT (Union marocaine du travail) de la nécessité d'adopter des lois sur la grève et les syndicats. Au cours des premières réunions, les deux centrales avaient émis des réserves sur ces sujets. Pour l'instant, seules l'UGTM (Union générale des travailleurs du Maroc) et l'UNTM (Union nationale du travail au Maroc), deux syndicats proches des partis de la majorité gouvernementale semblent répondre favorablement à l'invitation du gouvernement. «Nous allons participer à cette réunion et nous comptons défendre devant les responsables plusieurs revendications à commencer par les libertés syndicales», affirme Abdessamad Lamrimri, secrétaire général adjoint de l'UNTM, relais syndical du PJD (Parti de la justice et du développement), chef de file de la majorité gouvernementale. S'agissant du secteur privé, Lamrimri informe que la réunion avec le ministre de l'emploi a permis d'arrêter une méthodologie de travail. «Le ministre s'est réuni séparément avec les différents syndicats. Il a, par la suite, annoncé qu'il présentera son rapport au chef de gouvernement avant de nous rencontrer de nouveau», conclut-il.