Se rendre dans un établissement hospitalier quand la maladie nous rattrape ou quand nous devons faire des bilans biologiques, radiologiques, ou tout simplement accompagner un ami pour une hospitalisation est quelque chose qui concerne chacun de nous dans le courant de sa vie.Une fois à l'hôpital, nous souhaitons tous être bien accueillis, accompagnés,soutenus, écoutés et convenablement soignés, ce qui est un droit de tout citoyen, de tout malade. Mais souvent, nous oublions que le personnel de santé, les médecins, les infirmières et infirmiers ont aussi des droits, dont celui d'être protégés. Malheureusement, les nombreux cas de violences en milieu hospitalier montrent combien les professionnels de santé sont en souffrance et leurs droits bafoués. Synonyme de maladies, de souffrances, de soins et surtout de quiétude, de calme, de sérénité, de paix et de sécurité, l'hôpital est un lieu que tout le monde a tendance à respecter. En effet, tous ces éléments confèrent à l'hôpital un caractère particulier.C'est la raison pour laquelle on dit que l'hôpital est un miroir de la société. Mais malheureusement tout n'est pas rose, bien au contraire. Parfois on est devant une réalité traumatisante, douloureuse et choquante, surtout quand il est question de la sécurité à l'intérieur de nos hôpitaux ou plus exactement de la violence au sein des hôpitaux. Aujourd'hui, nous assistons à une recrudescence de la violence et des agressions dont sont victimes les professionnels de santé dans l'exercice de leurs fonctions. Il faut savoir que le problème des agressions au niveau des hôpitaux, et plus particulièrement aux urgences, n'est pas en soi quelque chose de nouveau. On peut même dire que la violence fait partie du métier des professionnels de santé (médecins et infirmiers). Ces derniers sont quotidiennement confrontés à des personnes qui agissent sous l'effet de l'alcool, des drogues dont le karkoubi ou des cas psychiatriques. Relativement inexistant ou minime dans les années 70-80, le phénomène des agressions à l'hôpital, a pris de l'ampleur au cours de ces dernières années, marquées par la violence au niveau des quartiers, les agressions quotidiennes, le hooliganisme au niveau des stades... Un phénomène de société Quand on cherche à comprendre, à savoir ce qui peut motiver de tels agissements, ce qui peut expliquer de tels comportements, on finit toujours par en déduire que c'est un phénomène de société. Ces agressions au sein même des établissements sanitaires, dont sont victimes des infirmières et des médecins, sont en réalité l'expression d'un mal vivre, qui se montre au grand jour, et dont les professionnels de santé paient un lourd tribut. Ces actes de violences s'expriment par des actes d'incivisme, des insultes, injures, menaces, et parfois par des coups. Ce qui finit par mettre sous haute tension les services hospitaliers et détériorent les conditions de travail des soignants. Il n'est pas exagéré de dire avec une certaine amertume que le phénomène de la violence, de l'insécurité et des agressions au sein de nos hôpitaux est le résultat d'un laxisme ascendant, d'une démission qui existe depuis quelques années (15 à 20 ans), lorsque notre société a commencé à tout accepter, à fermer les yeux sur bien des dépassements, des égarements, qui ont permis à des délinquants d'agir comme bon leur semble. Nous constatons ces dérives au sein même de l'école, qui peine à assurer son rôle premier d'éducateur et où des enseignants sont quotidiennement insultés, menacés par des jeunes qui veulent dicter leur propre loi au sein des établissements scolaires. Le résultat, on le constate aujourd'hui, la dégradation des biens publics, des terrains de foot qui ont coûté une fortune, sont saccagés par des hordes de sauvages, qui n'ont plus peur de personne et qui s'attaquent même aux agents des forces de l'ordre. Le service public est une cible privilégiée de ces individus, la destruction des bus, du tram, des lampadaires, des bancs, des arbustes à Casablanca fait partie intégrante des matchs de foot, sans oublier les vols et agressions dont sont victimes d'honnêtes citoyens. Médecins et infirmières, principales victimes Les violences et agressions qui surviennent au niveau des hôpitaux qui sont implantés au niveau de toutes les villes du pays ont pour principales victimes les médecins et les infirmières. Ces agressions sont devenues courantes et l'agression survenue à l'hôpital public de Taounat, la énième du genre dont sont malheureusement victimes les hôpitaux, ne sera pas la dernière. A ce sujet, il est utile de rappeler quelques cas que la presse avait rapportés. On se souvient tous de l'agression à l'arme blanche perpétrée par trois individus survenue à l'hôpital Moulay Youssef de Casablanca (mai 2013), au cours de laquelle une patiente hospitalisée et une infirmière du service de chirurgie furent délestées de leurs téléphones portables. Il y a aussi lieu de rappeler le cas de l'infirmière qui a subi une agression pendant l'exercice de ses fonctions à l'hôpital El-Ghessani à Fès, le 6 juin 2013. L'agresseur avait porté des coups avec une bouteille, ce qui a causé une blessure profonde au niveau du visage et une hémorragie. L'agression dont ont été victimesles médecins et infirmières aux urgences de l'hôpital El Mansour à Hay Bernoussi, menacés par un individu multirécidiviste. Les agressions survenues à l'hôpital Ibn Sina de Rabat oùune bande composée de 15 individus armés avait fait irruption au service des urgences. Une autre agression a eu lieu à l'hôpital Ibn Tofail à Marrakech, quand un individu armé d'une longue épée a fait irruption au niveau de la réanimation et a proféré des insultes et des menaces. L'hôpital d'El Jadida où des individus sous l'effet de drogues et armés de couteaux ou sabres ont envahi la structure hospitalière et ont insulté, violenté les professionnels de santé plus particulièrement ceux qui travaillent au service des urgences... Ferme condamnation de la tutelle Le phénomène de la violence dans les hôpitaux a tendance à se banaliser et pratiquement chaque jour apporte son lot d'agressions, de désolation et de crainte. C'est ainsi que pour le début de ce mois de Juillet 2018, pas moins de quatre agressions sont survenues, la première le lundi 9 juillet. La victime est un infirmier en plein exercice de ses fonctions aux urgences de proximité relevant de l'arrondissement urbain d'Ait Ourei. La 2e concerne un gynécologue de l'hôpital provincial Ibn Baja à Taza qui s'est vu infligé tout genre d'injures et d'abus verbaux, physiques et psychologiques de la part du proche d'une patiente. Une troisième victime, exerçant en tant que médecin interne à l'hôpital régional Hassan II à Agadir, a été agressée samedi 14 juillet à la salle des consultations médicales. Et puis il y a la quatrième agression survenue à l'Hôpital de Taounate. La victime est une infirmière qui a reçu des coups sur la tête, ce qui a causé une plaie profonde avec hémorragie. Face à cette montée des agressions dont les premiers à pâtir sont les infirmiers, infirmières, médecins, on ne peut que condamner avec la plus grande fermeté l'insécurité à laquelle sont quotidiennement confrontés certains hôpitaux, plus particulièrement ceux qui sont situés dans des quartiers chauds à forte densité démographique où se mêlent à la fois l'habitat insalubre, le chômage, la prostitution, les drogues, les dealers... Dans un communiqué en date du 19 Juillet, le ministère de la santé a condamné ces agressions répétitives contre les professionnels de santé et a décidé de poursuivre en justice les agresseurs. La tutelle condamne fermement ces comportements ignobles et irresponsables, soulignant avoir pris des mesures procédurales pour la poursuite des auteurs de ces actes, dans le cadre de son soutien aux cadres de la santé, victimes de ces agressions flagrantes. Tout en saluant les décisions prises par le ministère de la santé, il y a lieu de rappeler que la sécurité des professionnels de santé dans l'exercice de leurs fonctions doit être une priorité. Aujourd'hui, il n'est plus permis de rester les bras croisés et de regarder en spectateurs passifs ce qui se déroule sous nos yeux au moment où les professionnels de santé toute catégorie et grade confondus ne cessent de tirer la sonnette d'alarme sur cette dérive. Il ne s'agit pas de mettre un policier près de chaque médecin ou infirmier, ou de poser des caméras partout dans les urgences, mais les pouvoirs publics doivent impérativement intervenir et œuvrer à la limitation du phénomène qui commence à prendre de l'ampleur au sein de certains hôpitaux.