Plus de cent ans après sa commercialisation, l'aspirine n'en finit pas de dévoiler ses secrets. Des chercheurs ont en effet découvert les vertus insoupçonnées de l'aspirine dans la prévention de certains cancers. La découverte pourrait révolutionner la prévention. Nous vous proposons de faire le point sur les bienfaits et les risques de ce médicament. Acide salicylique : 153 ans et pas une seule ride Les médicaments tels que nous les connaissons aujourd'hui proviennent de diverses sources. Ils sont fabriqués à partir de minéraux, de plantes, d'animaux, d'humains. Devant la raréfaction de certains produits, de certaines plantes que l'homme a fini par épuiser, les laboratoires pharmaceutiques se sont attelés à synthétiser certains produits médicamenteux. Parler des médicaments et de leur histoire nous amène à retracer l'itinéraire de la plus vieille molécule thérapeutique que l'homme a su merveilleusement adapter au fil du temps. Il s'agit de l'aspirine ou si l'on préfère de l'acide acétylsalicylique qui est le nom scientifique de cette vieille dame blanche qui n'a pas pris une seule ride après plus de 100 ans. L'aspirine, d'une origine très lointaine, est certainement l'un des plus vieux médicaments du monde, dont l'utilisation remonterait à 500 ans avant J.C, par les Grecs et les Amérindiens, pour calmer les douleurs et les fièvres, En 1829, Pierre-Joseph Leroux, un pharmacien français, tente de concentrer une décoction d'écorce de saule blanc et obtient des cristaux solubles qu'il baptise saliciline (du latin salix, saule). Par la suite, des scientifiques allemands purifient cette substance active, qui est d'abord appelée salicyline, puis acide salicylique. En 1859, Kolbe réussit la synthèse chimique de l'acide salicylique. En 1897, Felix Hoffmann, un chimiste allemand qui travaille pour les laboratoires Bayer, reprend les travaux antérieurs de Charles Frédéric Gerhardt. Il est le premier à obtenir de l'acide acétylsalicylique pur et à réaliser sa production industrielle. Le brevet de l'aspirine est déposé par la société Bayer en 1899, sous le nom commercial d'Aspirin. Ce nouveau médicament arrive en France en 1908 et est commercialisée par la Société chimique des usines du Rhône. Personnellement et aussi loin que remontent mes souvenirs au niveau de ma petite ville de Sefrou, je garde en mémoire l'image et le gout amère de l'Aspro, qui n'est autre que de l'aspirine que l'on pouvait acheter chez le Bakal du coin (épicier). Aspro c'était dans les années 50 et 60 le médicament aux multiples vertus médicinales, une sorte de potion magique Un mal à la tête ? Un aspro. De la fièvre ? De l'aspro et on attendait que le corps fasse le reste. Il faut dire qu'en ces temps là, on avait pas le choix, c'était ça ou rien. Aujourd'hui, l'acide acétylsalicylique est synthétisé chimiquement. Il est le principe actif de nombreux médicaments aux propriétés analgésiques, antipyrétiques et anti-inflammatoires. Il est aussi utilisé comme antiagrégant plaquettaire (substance qui empêche la coagulation du sang). A noter : l'acide acétylsalicylique entre dans la composition de plus de 230 médicaments vendus au niveau des officines. L'aspirine est aujourd'hui encore le médicament le plus consommé au monde, avec 35.000 tonnes de comprimés produites chaque année. Des vertus insoupçonnées Pour beaucoup de monde et depuis longtemps, l'aspirine est une panacée. Car ce médicament, qui combat efficacement douleurs et fièvre (à forte dose), a un effet préventif contre les maladies cardiovasculaires (à très faible dose). Qui plus est, il pourrait aussi (à dose moyenne) non seulement prévenir un grand nombre de cancers fréquents, mais aussi ralentir leur évolution et le risque de développer des métastases. Une panacée dont l'usage doit toutefois être modéré en raison de la gravité potentielle de ses effets secondaires. Trois articles très récemment publiés - deux dans le Lancet et un dans le Lancet Oncology - provenant de l'équipe du Pr Peter Rothwell de l'hôpital universitaire John Radcliffe à Oxford, viennent conforter des travaux antérieurs sur le rôle protecteur de l'aspirine contre le cancer (notamment les tumeurs colorectales). Ces mêmes spécialistes avaient déjà démontré que la prise quotidienne d'aspirine réduisait le risque à long terme de décès par cancer. Mais les effets à court terme étaient moins certains, en particulier pour les femmes, et le rapport bénéfices/risques était mal évalué. Des études encourageantes, mais …. Pour commencer, il faut savoir que toutes ces découvertes ont été réalisées en analysant les résultats d'études destinées à confirmer les effets de l'aspirine sur la prévention des problèmes cardiovasculaires. Ce qui a été le cas. Mais en plus, la première publication qui a porté sur une cinquantaine d'essais contrôlés (et sur plus de 77 500 patients) a montré qu'une faible dose quotidienne de ce traitement entraînait une baisse d'environ 20 % du développement des cancers à partir de trois ans de traitement, chez les hommes comme chez les femmes. La réduction atteint même 37 % avec une prise d'aspirine pendant cinq ans ou plus. Le second travail porte sur les métastases, grâce aux données provenant de cinq essais menés au Royaume – Uni avec 75 mg d'aspirine ou plus par jour, toujours en prévention des événements vasculaires. Avec un suivi moyen de 6,5 ans, les patients qui prenaient de l'aspirine avaient un risque réduit de 36 % de voir apparaître des métastases, le taux étant de 46 % pour les adénocarcinomes (cancers du poumon, du côlon et de la prostate) et de 18 % pour les autres tumeurs solides (de la vessie et du rein). Selon les chercheurs, ce médicament réduit le risque d'adénocarcinome avec métastases au moment du diagnostic de 31 %, le risque de métastases par la suite de 55 %, et en particulier pour les cancers colorectaux (baisse de 74 %). Qui plus est, ces effets positifs sont indépendants de l'âge et du sexe des malades. Quant à la troisième étude, publiée dans le Lancet Oncology, elle a également porté sur les métastases, mais à partir d'une autre méthode, comparant des essais. Là encore, les auteurs ont trouvé une réduction du risque de cancer colorectal d'environ 40 %, ainsi que de ceux de l'œsophage, de l'estomac, des voies biliaires et du sein, dans les mêmes proportions. Malheureusement, les effets secondaires de l'aspirine - notamment le risque d'hémorragie digestive - limitent fortement son emploi. Mais de tels résultats, même s'ils sont issus d'études de prévention cardiovasculaire, vont évidemment relancer les recherches pour améliorer cette molécule découverte il y a plus de 120 ans et définir le type de personnes vraiment susceptibles d'en bénéficier. Si ces découvertes s'avèrent probantes, il est trop tôt pour que l'on puisse recommander, à ce stade de la recherche, la prise d'aspirine chez les patients. La meilleure solution reste d'en parler à son médecin traitant pour voir avec lui les effets indésirables que pourrait entraîner son utilisation. L'aspirine reste contre-indiquée dans plusieurs cas, antécédents d'ulcères digestifs ou de gastrite, anomalies de la coagulation, asthme, grossesse, diabète, goutte….. Ce médicament a des effets secondaires potentiellement dangereux. En raison de son action anticoagulante, il ne faut pas l'associer à d'autres traitements anti-inflammatoires ni le prendre avant une intervention chirurgicale ou des soins dentaires à cause du risque d'hémorragie. Les différentes formes et présentations Pour pouvoir être commercialisable, l'aspirine doit répondre à diverses exigences thérapeutiques telles qu'efficacité, sécurité, stabilité, compatibilité avec l'organisme, facilité d'absorption... Il faut aussi qu'elle s'adapte aux utilisations que l'on souhaite en faire. C'est dans cette optique qu'on peut la trouver sous différentes formes galéniques. On distingue en premier lieu l'aspirine dite simple, qui peut se trouver sous forme de comprimé ou de poudre. Elle se décline en deux types : le premier est l'aspirine soluble, que l'on doit dissoudre dans de l'eau avant de pouvoir l'absorber, et dont le principe actif comporte souvent de l'amidon et l'aspirine à croquer ou à sucer, dont l'ingestion est rendue agréable par la présence d'arômes (orange, pêche-abricot...). Par ailleurs, on trouve l'aspirine dite retard, ou aspirine dragéifiée. Il s'agit d'un comprimé d'aspirine entouré d'un gastro-résistant qui l'empêche d'être dissous dans la solution gastrique. Il n'est soluble que dans la solution intestinale où il est absorbé par le plasma sanguin. En outre, il existe l'aspirine tamponnée, qui peut exister sous deux formes. La première est effervescente. Elle contient de l'hydrogénocarbonate NaHCO3 avec lequel réagit l'acide acétylsalicylique au cours d'une réaction acide en présence d'eau dont se dégage du CO2, d'où l'effervescence. Les cristaux d'aspirine ainsi formés sont très fin, ce qui facilite leur absorption par l'estomac. La seconde ne se dissout pas par effervescence, mais elle est très soluble dans l'eau; on peut prendre l'exemple de l'Aspégic, un dérivé de l'aspirine que l'on trouve en poudre, et dont le principe actif est l'acétylsalicylate de lysine. Celui-ci se transforme en acide acétylsalicylique lorsqu'il atteint le milieu acide de l'estomac, et passe alors dans le plasma. Quant à l'aspirine non tamponnée, elle peut être ingérée en cachets ou en poudre, mais également disponible en suppositoires et en solutions injectables. Enfin, l'aspirine est également commercialisable sous forme "vitaminée", qui comporte de l'acide ascorbique, ou vitamine C. Les voies d'administration du produit il existe trois voies d'administration différentes pour l'aspirine : la voie orale, la plus commune (avec notamment les poudres, les gélules et les comprimés oraux, apparus dès 1960), la voie intraveineuse depuis 1980, grâce aux solutions injectables d'aspirine, et la voie rectale, rendue permise depuis 1960 avec les suppositoires. En conclusion, La vigilance est de mise Quel que soit le médicament que vous allez prendre, notre conseil reste le même : consultez votre médecin traitant, ne vous aventurez pas à prendre des médicaments sans ordonnance médicale, c'est ça le plus important. S'agissant de l'aspirine, si des symptômes digestifs inhabituels apparaissent, notamment des saignements gastro-intestinaux en début de traitement et particulièrement chez les personnes âgées, il faut immédiatement arrêter l'aspirine et consulter tout de suite votre médecin. Il faut faire attention, la prise d'aspirine augmente le risque hémorragique en cas de geste chirurgical, même mineur comme une extraction dentaire. Parlez-en avec votre médecin ou chirurgien avant l'intervention. Pour plus de clarté, mais aussi plus de précisions, il y a des contre-indications à la prise d'aspirine, vous devez faire attention et les respecter dans votre intérêt, ces contre – indications sont les suivantes : Hypersensibilité à l'aspirine et antécédents d'asthme avec l'aspirine ou un anti-inflammatoire. Maladies ou risques hémorragiques. Ulcère gastroduodénal en évolution. Insuffisance hépatique, rénale ou cardiaque. Association avec les anticoagulants oraux L'aspirine est formellement contre-indiquée chez les femmes enceintes à partir du 6e mois (en dehors d'utilisations cardiologiques ou obstétricales extrêmement limitées et qui justifient une surveillance spécialisée). Ce médicament peut avoir des conséquences graves sur l'enfant à naître, parlez-en à votre obstétricien afin de bénéficier d'une surveillance adaptée. Par mesure de précaution, l'aspirine est à éviter en cas d'allaitement….. Comme on peut le constater, toute chose aussi bonne et utile soit-elle, possède son revers de la médaille et dans le cas de la bonne et vieille aspirine, il suffit de prendre des précautions et de ne jamais dépasser la dose prescrite par votre médecin. D'ici là portez-vous bien L'aspirine A pour acétylation : réaction utilisée lors de la synthèse chimique. SPIR pour spirea, genre des plantes auxquelles appartient la reine des prés. INE comme c'est la règle pour les suffixes en chimie industrielle.