Larbi Belcadi (1939 – 2001), garde, dans le paysage artistique marocain, l'image d'un « petit maître », malgré l'engouement dont son œuvre n'a cessé de faire l'objet. En effet, ses peintures et ses compositions relevées de cuivre sont accrochés sur d'innombrables murs : demeures cossues, maisons bourgeoises ou grandes administrations et entreprises. Malgré cela, il n'a jamais fait fortune, vivant même, parfois, dans la gêne… Simple, gentil, discret, rieur, le cœur sur la main, il était l'antithèse du « créateur » à l'ego surdimensionné. Personnage solaire, sa peinture est tout, sauf terne. Comme lui, elle est directe, sincère, honnête, raffinée mais sans maniérisme, professionnelle mais sans clinquant. Trois figures tutélaires dominent son œuvre : le cheval, la mère et le soleil. Autant dire les emblèmes de la société marocaine, sans que leur représentation ne verse dans le folklorisme, et encore moins dans ce pseudo orientalisme en carton-pâte qui perdure avec ses ruelles de guingois, ses ânes bâtés, ses mouquères et ses porteurs d'eau aux jambes arquées… Le Maroc « authentique », nous dit-on… C'est peut être parce qu'il est passé par la caricature, dans les années 50, que Belcadi a su en éviter les écueils quand il est passé à cette peinture de genre, y imposant son style propre, fait en même temps de fougue et de sensibilité, et où l'apparente répétitivité des scènes (chevauchées, mère et enfant…) n'est jamais redondante, grâce aux jeux des nuances et les attitudes. A cet égard, n'oublions pas qu'il a aussi suivi une formation de cinéma en France… « LES QUATRE SAISONS » reproduit ici, est un quadriptyque réalisé en 1978. Etonnante composition où chaque panneau représente une des saisons de l'année, ou plutôt la suggère de manière à la fois, expressionniste , symbolique et moderne, à travers les variations de tons des bâtiments, des arbres, du ciel et surtout du soleil, personnage central dont la carnation passe progressivement du jaune blafard au rouge sang. Il a fallu qu'il meurt, et même qu'il tombe quelques temps dans l'oubli, pour que sa côte remonte sensiblement, sans toutefois atteindre les sommets indécents sur lesquels surfent certains de ses confrères, morts ou vifs… Mais attention ! des faux ont été mis sur le marché. Ils sont repérables à leurs teintes glauques, à leurs chevaux boursoufflés, sans élégance ni noblesse, et à leurs nuages de poussière ressemblant à des bouses de vaches… * Artiste peintre