Sur quel pied danse l'université marocaine? Vraisemblablement, elle ne sait plus à quel saint se vouer, en ces moments de trébuchement complet du système de l'enseignement scolaire et supérieur marocain. Il est bien évident que l'Etat consent un effort des plus considérables, en termes d'investissement sur la structure technique et la ressource humaine. Toutefois, on voit mal les retombées de ce sacrifice. Certainement, la gouvernance continue à faire défaut dans ce chantier national dont les visées décisives ne sont plus à démontrer. Dans les rouages de l'université et à croire même les déclarations des plus hautes sphères du département, nombre de doyens de facultés, de directeurs d'établissements et de présidents sont généralement nommés, non pas pour leur compétence et leur savoir-faire, mais pour le degré de «compatibilité» avec les exigences des milieux sécuritaires. En fait, selon toujours des sources dignes de foi, ce sont plutôt les postulants «dociles» et «réactifs» qui sont les plus favorisés dans cette épreuve. En effet, il ressort de ce constat déplorable que le souci de la sécurité hante constamment l'appareil étatique. Certes, l'université marocaine est présentement infestée par des groupuscules extrémistes qui sèment le désordre dans l'enceinte de l'institution universitaire. Cette situation déconcertante affecte sérieusement, non seulement la qualité des apprentissages et des formations, mais surtout la vie estudiantine axée sur le civisme, la tolérance et la symbiose. Il va sans dire également que cet état d'esprit qui prolifère sans relâche suscite de nouvelles conduites chez les générations montantes, d'autant plus que ces mêmes étudiants ont déjà été «malformés» au niveau de l'enseignement scolaire. Une continuité contagieuse occasionnant, au fil du temps, des phénomènes insolites dans la société marocaine. Devant toute cette déchéance, le staff formateur et instructeur se trouve dans l'impossibilité de prodiguer des connaissances qui répondent aux conditions requises, d'autant plus que les curricula demeurent obsolètes. D'autre part, on conviendra aussi que l'encadrement laisse à désirer, au point de se retrouver avec des étudiants horriblement en deçà des attentes, notamment dans les langues. Sans trop s'étendre sur ces maux irascibles qui ne cessent de ronger le corps universitaire national, on s'interrogera alors sur la nature et la finalité de l'enseignement supérieur qui engloutit en son sein des multitudes d'étudiants, sans visibilité. Dans une université «abattue» telle celle d'IbnZohr qui couvre pas moins de quatre régions du sud du pays, soit plus de la moitié de la superficie du royaume, on se demande vers quel dessein se dirige toute cette kyrielle humaine «tassée» par milliers dans des amphithéâtres bondés, sans formules de groups ni moyens didactiques suffisants... Loin de toute idée de faire incomber ces déficits aux gestionnaires locaux, ni aux corps professoraux qui se démènent, pour une bonne partie d'entre eux, comme de beaux diables, il y a lieu d'interpeller tout le système universitaire pour remédier à cette débâcle chaotique.