L'effet miroir Paradoxalement et contrairement à ce que l'on peut dire, l'élection du nouveau gouvernement, la nomination d'une seule ministre, le non respect de l'article de la constitution sur la parité ont rendu plus visibles les femmes, non par leur présence, mais par leur absence dans les sphères politiques. La société marocaine par différentes composantes, mouvements progressistes, médias ont contesté, analysé, argumenté cette absence. Cette question s' est immiscée dans toute la société marocaine ets'y est meme installée. Depuis lors, celle-ci essaye de se positionner, de trancher sur un sujet qui fache et divise. Cette nouvelle question a pris toute sa légitimité. La société marocaine, avec ses différences socioculturelles est contrainte à ne plus continuer à considérer l'égalité homme femme comme un problème superflu à régler, mais plutôt comme une réalité qui requiert de profondes reflexions ainsi qu'une évolution. De plus en plus, la société ne s'interroge plus sur la légitimité de la question relative à l'égalité homme femme, mais davantage sur la nature et la forme de cette égalité, sur les références voire les modèles possibles. L'année 2012-2013 a marqué un tournant important dans l'approche de la question de l'égalité homme femme, notamment avec trois variables qui révèlent une nouvelle dimension dans la perception de cette problématique. Par la constitutionalisation des droits des femmes, les femmes, féministes et femmes politiques se sont activées pour faire reconnaitre leurs droits. Une façon de construire un socle solide et légitime pour leur combat. Avec l'évènement gouvernemental sur le non respect de la parité, le mouvement des femmes a entaméun bras de fer avec ceux qui occupent les postes décisionnels. Les féministesse sont révelées de vraies professionnelles de la politique,du droit et du social en portant les questions de l'égalité homme femme et de la parité aux plus hautes sphères de décision. Elles ont imposé par leurs multiples actions une nouvelle orientation , une nouvelle ère de droits des femmes, en se positionnant comme égales aux hommes dans leurs droits politiques et ont interpellé le gouvernement sur ses raisons de discrimination et de manquement au respect de la constitution. Ce dernier ne s'interroge plus sur la pertinence de la présence des femmes dans le gouvernement, mais se justifie, tente d'y remédier par des explications qui ne font qu'enflammer le débat et révéler au grand jour un droit bafoué non seulement par certains conservateurs du gouvernement, mais aussi par des partis progressistes. Une nouvelle rivalité nait ainsi au sein de la société marocaine : uncombat politique entre femmes et hommes en vue d'un partage équitable du pouvoir. Avec une rivalité politique entre femmes, alimentée parleur appartenance politique plurielle, les actions des femmes ne se limitent plus à défendre les droits des femmes, mais aussi à défendre leurs appartenances politiques. Les femmes unies pour faire respecter leur combat en faveur de la femme s'affrontent également dans une rivalité politique qui trouve ses fondements dans leurs differentes appartenances politiques, mais aussi dans leurs références socioculturelles. Les débats télévisés du 8 Mars 2013 ont rendu visible cette confrontation politique entre femmes. Tandis que certainesplaident pour le respect des droits des femmes marocaines, d'autres, rattachées au mouvement politique au pouvoir,défendent les orientations politiques actuelles. Il faut dire que l'année 2012- 2013 adémontréque les droits des femmes ne sont plus uniquement la cause des femmes et des féministes pionnières, mais de toute la société marocaine.Elle a aussi révélé qu'étant dans l'ère post-constitution, la problématique du respect des droits politiques devient on ne peut plus importante. *Professeur de Sociologie à l'Université Hassan II Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Mohammédia