* L'Algérie est confrontée à la tâche de réinventer son économie alors qu'elle est en proie à plusieurs crises et au mécontentement de l'opinion publique. Rabat – L'Algérie voit ses exportations de pétrole chuter malgré les nouveaux sommets atteints par les prix internationaux du pétrole, dans un contexte de demande croissante, alors que l'économie mondiale se redresse. L'indépendance économique de l'Algérie repose depuis longtemps sur ses importantes réserves de gaz naturel et de pétrole. Ce garant des recettes de l'Etat commence à s'évaporer, non pas à cause d'une extraction excessive, mais plutôt à cause de l'instabilité et des crises intérieures continues qui sont devenues la norme pour l'Algérie ces dernières années. Les Algériens sont de nouveau confrontés à un palais présidentiel vide, ce qui suscite des comparaisons gênantes avec l'état du pays pendant les années de déclin du régime de l'ancien président Bouteflika. On demande à nouveau aux citoyens de faire confiance à un président presque tout-puissant qu'ils ne voient qu'en photos et en affiches. Le président Abdelmadjid Tebboune était déjà considéré comme un prolongement de l'armée, une perception qui n'a fait qu'empirer en raison de son lent rétablissement en Allemagne, tandis que le rétablissement de l'Algérie semble être gelé dans le temps jusqu'à son retour. * La chute des exportations de pétrole La dépendance de l'Algérie à l'égard de son industrie pétrolière est facile à constater. Bien que le pays soit membre de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), il n'est pas membre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Dans un effort pour rester indépendante des diktats internationaux en matière de libéralisation commerciale et économique, l'Algérie a naturellement craint les institutions financières internationales telles que la Banque mondiale et le FMI. Pourtant, maintenant que le pays est pris au milieu de crises concurrentes, il ne peut plus dépendre de ses revenus pétroliers pour apaiser les critiques nationales et internationales, avec peu d'options économiques alternatives disponibles. Tant que l'or noir coulait, l'Algérie était capable de fournir un soutien économique à son peuple, atteignant le statut de pays à revenu moyen sur le dos de sa ressource la plus précieuse. Mais en 2020, un krach pétrolier sans précédent a suivi une crise économique mondiale tout aussi dévastatrice provoquée par la COVID-19. L'OPEP s'est engagée à plafonner la production de pétrole, ce que de nombreux membres ont dépassé en essayant désespérément de combler les déficits budgétaires. Pourtant, en Algérie, l'industrie pétrolière nationale n'a même pas réussi à atteindre le plafond de production dans un contexte d'instabilité et de crise intérieures. * Une économie paralysée Actuellement, les prix du pétrole connaissent de nouveaux sommets, le gaz naturel ayant connu une hausse en janvier. Mais l'Algérie n'a pas pu profiter de cette reprise, car le pays n'a tout simplement pas produit assez d'excédent pour pouvoir vendre ses produits lorsque les prix ont atteint de nouveaux sommets. Des années de baisse de la production pétrolière ont entraîné une diminution constante des réserves de devises étrangères. L'Algérie dépend des ventes de pétrole et de gaz pour ses dollars. Cette dépendance excessive semblait assez raisonnable il y a quelques décennies, mais aujourd'hui, elle menace le bien-être du pays de manière de plus en plus visible. Lorsque le zèle révolutionnaire s'est répandu dans le monde arabe il y a une décennie, l'élite dirigeante de l'Algérie a mis à disposition des milliards de dollars en soutien social et en subventions, ce qui a effectivement étouffé la dissidence. Mais comme il ne reste pas grand-chose dans sa tirelire pour venir en aide aux citoyens mécontents, l'Algérie connaît actuellement des crises qui rivalisent ou dépassent les niveaux de mécontentement de 2011… Avec son président bloqué en Allemagne pour le traitement COVID-19, l'Algérie est maintenant confrontée à plusieurs crises entrelacées sans pouvoir utiliser ses revenus pétroliers pour soulager la douleur. Cette douleur continue à être ressentie quotidiennement par les Algériens ordinaires qui recherchent simplement la stabilité et des opportunités économiques plus nombreuses ou meilleures. * Se réinventer Face à COVID-19, à une crise économique et de leadership et maintenant à l'émergence de la grippe aviaire H5N8 au cœur du pays, l'Algérie est une bataille difficile pour se réinventer économiquement. Au milieu de cet amoncellement de crises toujours plus nombreuses, le pays devra probablement reconsidérer son adhésion à l'OMC. Il devra peut-être même demander des prêts à la Banque mondiale et au FMI, ce qui implique de faire la paix avec le fait qu'ils exigeront des réformes économiques profondes qui risquent de créer encore plus de troubles. Bien que la situation du pays soit désastreuse, la réaction de l'élite algérienne n'inspire guère confiance. Au lieu de mobiliser le public dans un effort pour diversifier et élargir la production économique du pays, le gouvernement pointe du doigt les croque-mitaines étrangers pour inciter le public à canaliser sa colère contre des menaces étrangères souvent anonymes et fabriquées de toutes pièces. Chérif Belmihoub, le « ministre de la prospective » du pays, a présenté son plan de relance économique en janvier et a dû admettre que « l'Algérie n'est plus un pays pétrolier ». L'Algérie, a-t-il conseillé, doit abandonner les « défauts bureaucratiques » et le « gaspillage des fonds de l'Etat ». 1. Belmihoub a déclaré que l'Algérie a besoin de toute urgence de réformes profondes et structurelles. « Nous devons sortir du face-à-face investisseur-banque publique, et créer un marché financier et d'autres mécanismes de financement », a-t-il dit. Le fait qu'un ministre puisse être aussi sincère et direct en soulignant aux Algériens le chemin difficile qui attend leur pays semble être la meilleure indication que le gouvernement est à court d'options alors que de nouvelles crises entrecroisées se profilent à l'horizon. Mais la question de savoir si l'élite politique et financière du pays tiendra compte des appels de M. Belmihoub pour des réformes indispensables afin de se sortir de décennies de « défauts bureaucratiques » est tout autre.
Article écrit ParJasper Hamann-10 février 2021 (https://www.moroccoworldnews.com/2021/02/334608/algeria-collapsing-oil-exports-spell-doom-for-economy/) Traduit par Sahar NASRY-11 février 2021