Le pétrole algérien est au cœur d'une nouvelle affaire de guerre d'information à l'international. Depuis la publication de données sur le niveau des exportations et de production du pétrole en Algérie par l'agence américaine Bloomberg, les officiels algériens ont rapidement réagi en dénonçant un nouveau « complot » contre leur pays. Alors que l'agence Bloomberg a annoncé des chiffres concernant la production de pétrole et de gaz par l'Algérie, notant une baisse historique mettant à mal le rôle du pays en tant que l'un des principaux pays sur les 14 faisant partie de l'OPEP. Si l'année 2020 a été une année difficile sur tous les niveaux et cela s'est ressenti sur le brut également qui a vu la demande baisser en raison d'un monde à l'arrêt causé par la pandémie du coronavirus, et la production de pétrole a baissé d'un commun accord entre les pays OPEP et non OPEP pour équilibrer le marché, l'Algérie resterait à la traine risquant de perdre sa place de grand pays producteur de pétrole et de gaz selon Bloomberg. Ne pas profiter de la hausse des prix du pétrole « La production globale de pétrole a légèrement augmenté en janvier (2021, ndlr), mais reste à son niveau le plus bas depuis 2002 », a affirmé l'agence américaine concernant la situation inquiétante de l'Algérie qui est fortement dépendante de la rente pétrolière représentant plus de 90% de ses recettes extérieures. Pourtant, les indicateurs mondiaux sont plus intéressants en ce début 2021, avec une augmentation de la production mondiale poussée par une la Libye qui est en voie de stabilité après 11 ans de guerre et par l'Arabie saoudite, le Venezuela et l'Iran qui ont fait augmenter la production à 181.000 barils par jour de plus en janvier par rapport à décembre 2020, pour atteindre une production totale de 25,496 mb/j, selon le rapport de l'Opep. Le prix du baril a également connu une embellie par rapport à 2020 qui a vu les prix atteindre un niveau très bas en raison de la pandémie du coronavirus. Mais « avec sa production anémique, l'Algérie risque de passer à côté de la récente reprise du brut », indique l'agence. En janvier, l'Algérie a enregistré une baisse 36% des exportations de pétrole par rapport au mois décembre dernier pour se situer à seulement 290.000 barils/jour, indique l'agence qui souligne qu' »il s'agit du niveau le plus bas jamais atteint depuis 2017″. Cette situation intervient au moment où tous la majorité des pays de l'OPEP ont dépassé leurs quotas tandis que l'Algérie n'a généralement pas atteint son plafond. « Au moment où les prix des hydrocarbures repartent à la hausse (50%) de gagné en à peine 3 mois, il est regrettable de constater que l'Algérie, en proie à une grave crise financière, ne profitera pas, ou très peu, de l'embellie du marché pétrolier », regrette de son côté le site Algérie-éco. La demande interne en gaz ne permet plus d'exporter Pays producteur de pétrole et de gaz, l'Algérie a baissé sa production de gaz également au cours des derniers mois, relève l'agence. Selon le forum des pays exportateurs de gaz, Alger a baissé en 2019 à au moins une décennie sa production de gaz. Et cette baisse s'explique par ailleurs par des données socio-écnomiques, car « le pays brûle davantage de combustible dans les centrales électriques locales à mesure que sa population augmente, ce qui laisse moins de place aux exportations », indique Bloomberg qui s'étonne que le Premier ministre Abdelaziz Djerad ait ordonné des réductions de dépenses pour stabiliser les finances du pays sans réduire les subventions sur l'électricité et les produits alimentaires. Seulement, cette dernière donnée trouve son explication dans une réalité historique et sociale dans le pays qui a toujours compté sur les subventions sociales pour maintenir la population sous contrôle outre un contexte de haute tension depuis 2019 où les marches populaires pacifiques du Hirak se sont déroulées sans discontinuation pendant une année contre le pouvoir avant d'être arrêtées à cause des restrictions liées au coronavirus. Selon la même source, les exportations algériennes de gaz naturel brut et liquéfié ont baissé d'environ 30% en 2020 et continue sa baisse en 2021 ce qui n'a pas permis au pays de profiter de la la flambée des prix du GNL à la mi-janvier, car « il manquait de gaz excédentaire à vendre sur le marché au comptant ». « L'Algérie connaît l'un des plus gros budgets sociaux par habitant de ses pairs de l'OPEP », a déclaré le directeur de la société de recherche énergétique Enverus, cité par Bloomberg et ajoutant que le maintien de ces importantes subventions est essentiel pour éviter les manifestations. Le ministre de l'Energie crie au mensonge Mais pour le ministre algérien de de l'Energie, Abdelmadjid Attar (ancien PDG de la compagnie nationale de pétrole et de gaz Sonatrach), les chiffres annoncés par l'agence américaine seraient faux et viseraient à entacher la réputation de l'Algérie. Le pays exporte 937 000 barils/jour, a-t-il affirmé devant le Parlement, cité par Echorouk-Online. Interrogé en marge d'une séance de l'APN, le ministre algérien de l'Energie a mis les choses à leur place, assurant que l'Algérie exporte 937 000 barils/jour (contre les 290.000 barils/jour en décembre annoncées par Bloomberg), selon le site Echorouk-Online qui rapporte ses propos. « Ce sont les vrais chiffres et ils sont mis en ligne sur le site du ministère depuis la première semaine de l'année », a indiqué le ministre, pour qui « la publication de ces données erronées relève de desseins malsains visant l'Algérie ». En avril 2020, l'agence chinoise Xinhua avait cité le ministre algérien de l'Energie, Mohamed Arkab (qui a été remplacé démis de ses fonctions en juin 2020 après 14 mois au poste) qui avait annoncé que l'Algérie comptait baisser sa production dans le cadre de l'effort de l'Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) et ses alliés visant la stabilisation des prix du brut. L'agence chinoise avait annoncé un quota de baisse de la production algérienne fixé à 200.000 barils par jour (bj) (sur une production moyenne de 1,1 million bj) durant les deux mois de mai et juin, avant d'atteindre les 145.000 bj pendant le second semestre de l'année 2020. A en croire le dernier rapport annuel du ministère algérien de l'Energie, la production du pétrole a baissé à 142 millions de tonnes en 2020 contre 157 millions de Tonnes d'équivalent pétrole (TEP) en 2019, soit une baisse de 30%. La demande en interne a enregistré une baisse causée par la pandémie du coronavirus (-13 %, de 67 à 59 millions TEP) et le volume des exportations algériennes de pétrole ont également connu des baisses considérables (82,2 millions de TEP exportés) de 40% en en moins en termes de valeur et 11% en moins en volume par rapport à l'année 2019, ce qui a provoqué une baisse des recettes de 31% par rapport à 2019.